«Les événements en Kabylie ont eu une très forte influence sur la politique marocaine, en ce sens que les hommes politiques marocains évitent de faire les mêmes erreurs qu'en Algérie», explique Ahmed Hafid, chercheur à l'Institut royal de la culture amazigh au Maroc. Au royaume chérifien, depuis le printemps berbère, les acquis culturels en la matière sont bien visibles. En 2001, le roi Mohammed VI officialise le tamazight comme composante de l'identité nationale, mettant fin à de longues années de déni, et crée l'Institut royal de la culture amazigh qu'il place directement sous sa tutelle. Par la suite, en 2003, l'enseignement de tamazight devient obligatoire, à raison de 3 heures par semaine. Depuis cette date, près de 13 000 enseignants ont été formés. L'année 2006 marque l'intégration de tamazight dans l'audiovisuel public ; quant à une chaîne entièrement berbère, elle n'émet que depuis un mois. Meriem Benatia, chercheuse et militante pour les droits culturels amazighs, souligne le paradoxe de ces avancées et se projette dans les combats à venir. «Les acquis obtenus sont en dehors de tout cadre légal et encore moins constitutionnel. Il ne s'agit que de simples circulaires administratives pouvant être retirées selon le bon vouloir des autorités. Un simple changement de ministre et c'est tout notre combat qui tombe à l'eau», analyse-t-elle. Une fragilité juridique exacerbée par des moyens limités et une réticence des autorités à jouer le jeu. «Les officiers refusent toujours d'inscrire les noms berbères sur les registres d'état civil !», précise-t-elle. Face à ces défis, Meriem Benatia note «une convergence des tendances» : «Le temps de la division est passé, la nouvelle génération est beaucoup plus exigeante, impatiente aussi. Les discours type droits de l'homme n'ont plus d'effet et on va vers une radicalisation des discours.»