Au Nigeria, on meurt par centaines… Après trois jours d'affrontements sanglants, dans les différentes régions du pays, entre les forces de l'ordre et les islamistes radicaux autoproclamés talibans, près de 300 personnes ont péri. Un très lourd bilan de guerre, nettement plus important que les tueries sur le front de l'Afghanistan ! « Durant la seule journée de lundi, pas moins de 206 personnes ont été tuées uniquement à Maiduguri, dans le nord-est du Nigeria », a déclaré un policier sous le couvert de l'anonymat. « Lundi, nous avons compté 197 cadavres de talibans qui ont été déposés dans l'enceinte du commissariat central (...). Les talibans ont tué 9 policiers », a-t-il ajouté. Depuis dimanche, le nord du Nigeria est le théâtre de violents affrontements entre membres de cette secte de radicaux islamistes se réclamant des talibans d'Afghanistan et les forces de sécurité. La situation y est tellement dangereuse que le président de ce grand pays d'Afrique, multiconfessionnel et riche en ressources naturelles, Umaru Yar'Adua, a décrété hier « l'alerte totale » dans tout le pays. Un bilan officiel, communiqué lundi, faisait état de 55 morts à Bauchi et à Yobe, tandis que des témoins, cités hier par des agences de presse, ont indiqué avoir vu lundi une centaine de cadavres entreposés dans un poste de police à Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno. « D'après ce que nous avons vu, il y aurait plus de 100 corps amenés dans la cour du commissariat », a affirmé l'un d'eux, Ibrahim Bala, un journaliste travaillant pour une radio locale. Mais les affrontements se sont vite répandus dans les Etats de Bauchi, Borno, Kano et Yobe. En déplacement lundi dans le sud-ouest du pays pour l'inauguration d'une centrale électrique, le chef de l'Etat du Nigeria a ordonné « de prendre toutes les mesures nécessaires pour contenir et repousser les attaques ». Ce plan de riposte de Umaru Yar'Adua semble avoir eu l'effet escompté puisqu'une baisse de violence a été enregistré. Le président nigérian s'est d'ailleurs réjoui, hier après-midi, de ce que la situation était « sous contrôle » dans le nord du pays. « Nous avons la situation sous contrôle et je pense que d'ici la fin de la journée, tout sera rentré dans l'ordre », a-t-il déclaré à l'aéroport d'Abuja, juste avant de partir pour le Brésil. Evoquant la situation à Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno, où des combats se poursuivaient mardi après-midi, le président Yar'adua a indiqué que l'assaut final contre le leader spirituel des extrémistes de la secte des talibans, Mohamed Yusuf, était en cours. Hier, à l'heure où nous mettions sous presse, l'armée nigériane tirait au mortier sur la maison du leader spirituel du groupe extrémiste à Maiduguri (nord-est). Parallèlement à cette vigoureuse riposte militaire l'Organisation de la conférence islamique (OCI) a ôté toute couverture religieuse à la guérilla des talibans « version Nigeria ». Les autorités reprennent le contrôle Dans un communiqué rendu public hier, l'organisation dirigée par Ekmeleddin Ihsanoglu a appelé au calme au Nigeria et a rejeté la violence « commise au nom de l'Islam ».L'OCI, qui s'est dite « profondément consterné par ces tristes incidents », exhorte les chefs religieux à favoriser le dialogue pour « surmonter les malentendus et les idées reçues, et promouvoir la tolérance et l'entente entre musulmans et chrétiens ». M. Ihsanoglu, dont l'organisation compte 57 membres dont le Nigeria, proclame dans ce contexte son « rejet total de la violence commise au nom de n'importe quelle religion, y compris l'Islam qui prêche la coexistence pacifique, la compassion et la tolérance ». De son côté, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, s'est déclaré « inquiet » de la situation de « violence sectaire » au Nigeria. Le secrétaire général des Nations unies espère que « ceux qui sont derrière ces attaques seront identifiés et traduits devant la justice ». Il a également appelé les responsables religieux et locaux « à travailler ensemble pour s'attaquer aux causes profondes des affrontements religieux (...) et pour qu'une solution puisse être trouvée via le dialogue, la tolérance et la compréhension mutuelle ».