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Entre la recherche de la structure et la valorisation de la culture amazighe
À propos des textes de lecture dans les manuels scolaires amazighs du cycle moyen
Publié dans El Watan le 04 - 08 - 2009

« Les topiques ou toponymes et lieux-dits à travers toute l'Afrique du Nord constituent [. . .] un festival de la langue berbère, et l'on bute sur ces noms, devenus familiers aux vieilles générations d'Algériens connaissant leur pays, dans les moindres recoins du sous-continent maghrébin [ ... ]. Ne serait-ce que pour cela ( ce qui est déjà énorme), cette langue devrait être enseignée à tous les enfants algériens afin de leur permettre de redécouvrir leur pays dans le détail et non par le biais de l'abstraction idéologique imposée au nom de la qawmiya baâthiste et faisant de l'école une institution étrangère, sinon à notre identité proclamée en surface, du moins à notre être national véridique, fruit intime de la géographie et de l'histoire [. .. ]. » Lacheraf Mostefa, Des noms et des lieux, Alger : Casbah éditions, 1998, p.161
Introduction
L'introduction de tamazight dans le système éducatif algérien à partir de 1995 constitue un précédent historique d'une importance capitale. D'une langue bannie de tous les secteurs officiels, stigmatisée à l'extrême, considérée comme anachronisme, Tamazight se voit maintenant enseignée au sein des écoles dans lesquelles elle était interdite. Cet enseignement qui a connu une longue période de tâtonnements s'est vu, ces derniers temps, doté de programmes confectionnés dans le cadre de la réforme du système éducatif algérien. Cette réforme a débouché sur la confection de nouveaux manuels. Nous tenterons dans cette modeste communication d'aborder un segment de ces manuels, à savoir les textes proposés pour la lecture et à la préparation de l'écrit. Nous essayerons dans un premier temps de situer le contexte d'apparition de ces manuels scolaires de tamazight ; dans un deuxième temps nous verrons comment les concepteurs des programmes ont pensé intégrer ce nouvel enseignement dans l'enseignement des langues en Algérie. Nous essayerons notamment de le situer par rapport à la langue française.
En dernier, nous tenterons de voir si ces textes sont en mesure de rendre nos apprenants - amazighophones et non amazighophones - capables de témoigner de leur culture et, par ricochet, arriver à susciter en eux un intérêt, susceptible de valoriser leur patrimoine culturel comme le stipulent tous les documents d'orientation qui accompagnent les programmes de tamazight. Notre travail s'attellera uniquement aux quatre manuels du cycle moyen. De ce fait, nous ne ferons aucune référence aux cinq autres manuels : deux pour le primaire, trois pour le secondaire. Les textes concernés sont tous les textes en prose proposés pour la lecture ou à la préparation à l'écrit, les poèmes inclus à la fin de chaque séquence ne sont aucunement concernés par cette modeste étude.
1995 : Au commencement ... il y avait le vide pédagogique :
L'introduction de tamazight dans le système éducatif algérien fût avant tout un acte politique. Tous les animateurs du mouvement berbère, ainsi que les premiers enseignants de tamazight étaient conscients que rien n'a été préparé en amont (1) pour une prise en charge sérieuse de l'enseignement de cette langue qui, de surcroît, ne bénéficiait pas encore d'un statut juridique. Sur le plan pédagogique, à l'exception de la « tajerrumt » de Mammeri, de l' « Amawal », ainsi que du roman de Mezdad, Id d wass, les enseignants n'avaient presque aucun autre outil qui leur aurait permis d'affronter une tâche qui s'est avérée très difficile. Le choix d'occuper le terrain en ouvrant, dès 1995, les premières classes pilotes au niveau de seize wilayas (2) sans attendre la préparation pédagogique qui permettrait la réussite d'une entreprise d'une telle envergure était dicté par des considérations purement politiques. Tout un chacun de nous sait pertinemment que l'introduction de tamazight dans le système éducatif algérien était une conséquence de la grève du cartable que les tendances (3) du Mouvement culturel berbère (MCB) avaient lancée dès la rentrée scolaire de 1994. Le pouvoir en place avait, après plusieurs mois de boycott scolaire, cédé sur un point que les militants de la cause amazighe considéraient comme un acquis historique : introduire tamazight comme matière dans les écoles algériennes. Cet acquis était dû - ce qui n'est pas dénué de sens - à un rapport de force qui penchait, à l'époque, en faveur du MCB.
En 1995, aucun outil didactique n'était mis à la disposition des enseignants de tamazight. Ces derniers vont s'apercevoir très tôt qu'ils étaient livrés à eux-mêmes du fait qu'aucun organisme ne les a aidés dans leur travail. Même les deux universités de Kabylie qui avaient chacune un département de langue et culture amazighes n'ont pas pu suivre la dynamique enclenchée en 1995. Cette situation a fait en sorte à ce que les enseignants (5) eux-mêmes tentèrent de pallier ce problème en organisant le premier séminaire (6) dans le but d'arrêter un programme qui sera appliqué par l'ensemble des enseignants de tamazight, du moins ceux de la wilaya de Tizi Ouzou, vu que l'initiative émanait de l'Association des enseignants de cette wilaya. Il est à signaler que les résultats des travaux de ce séminaire n'avaient rien de contraignant étant donné qu'ils n'émanaient pas du ministère de l'Education nationale. La situation d'anarchie pédagogique prévalait toujours. En effet, chaque enseignant enseignait ce qu'il voulait sans qu'il se sente obligé de rendre compte à qui que ce soit ! Afin de remédier à ce problème épineux, le MEN avait, en 1998, édité un recueil de textes pour la lecture.
Un recueil qui ne répondait à aucune norme pédagogique : des textes d'inconnus, fabriqués pour la majorité, écrits dans plusieurs variantes de tamazight et transcrits dans les trois graphies (latine, arabe et tifinagh). Ce recueil a été très mal accueilli par les enseignants de tamazight qui l'ont tous rejeté. A partir de l'an 2000, il y a eu une initiative de quelques enseignants qui ont pu éditer, à compte d'auteur, trois recueils de textes pour la lecture. Chacun d'eux s'adressait à l'un des trois niveaux que comptait le cycle moyen avant la réforme. Il fallait attendre l'année scolaire 2003-2004 pour qu'apparaisse le premier manuel de tamazight qui répond à un minima de normes pédagogiques. La conception de ces manuels était confiée à un groupe d'enseignants et d'inspecteurs qui font partie du GSD7. Chaque niveau des trois paliers où la langue tamazight est dispensée a son manuel. Nous comptons maintenant neuf manuels en tout : deux pour le primaire ; quatre pour le moyen et trois pour le secondaire. Ces manuels ont été d'un apport considérable pour l'avancement de l'enseignement de tamazight, notamment en contribuant à orienter cet enseignement en le dotant d'un programme et d'objectifs clairs ainsi qu'à mettre fin à la situation d'anarchie pédagogique qui nuisait énormément à cette matière.
La place de tamazight dans la nouvelle réforme du système éducatif :
En l'an 2003, le ministère de l'Education nationale opéra une réforme du système éducatif. Une réforme qui a eu pour conséquence la révision des programmes d'enseignement de tous les paliers et, par ricochet, la « confection » de nouveaux manuels. Cette réforme se base sur l'approche par compétence. La compétence est définie comme « un ensemble de savoirs, de savoir-faire et de savoir être acquis par les apprenants et que ces derniers devraient être capables de mobiliser dans des situations scolaires et non scolaires » (8). L'enseignement de tamazight qui était à sa huitième année à l'époque a été touché par cette réforme. Les concepteurs des nouveaux programmes ont mis sur un pied d'égalité la langue amazighe avec les deux autres « grandes langues écrites » (9) à savoir l'arabe et le français en lui assignant presque les mêmes objectifs malgré le fait que chacune d'elles a son propre statut, ainsi que des fonctions sociales bien spécifiques. La spécificité de tamazight comme langue non encore standardisée a été soulignée dans le document d'accompagnement du programme de la première année moyenne (10). Cette spécificité aurait pu nécessiter l'élaboration d'un programme spécifique en mesure de la promouvoir en lui permettant d'accéder à un statut supérieur et d'occuper par conséquent des fonctions sociales qu'elle a, soit perdues ou qu'elle n'a jamais pu avoir du fait de sa marginalisation par tous les pouvoirs qui se sont succédé sur le sol africain. Il a été mentionné à ce sujet que « les contenus retenus pour l'élaboration de ce programme sont justifiés par le statut de la langue amazighe et sa place dans le système éducatif algérien : langue nationale à promouvoir ». (11) Mais lorsqu'on regarde de près la progression retenue au collège pour le français et tamazight, nous constatons aisément que les types de textes enseignés sont presque identiques.
Nous constatons à travers ce tableau que pour la langue française, les concepteurs des programmes ont privilégié un type de texte pour chaque niveau du cycle moyen. En effet, durant les quatre années du collège, l'apprenant doit être en mesure de maîtriser la narration, la description, l'explication, l'injonction et enfin l'argumentation. Pour tamazight, nous constatons que l'étude de la narration constitue le socle de l'enseignement dans le cycle moyen auquel viennent s'ajouter les autres types de textes, à savoir la description, l'explication et enfin l'argumentation en fin de la quatrième année moyenne. « L'étude du récit constitue le pivot autour duquel viennent se greffer d'autres formes du discours et techniques d'expression (l2) ». Nous retrouvons la même chose dans le programme de la deuxième année moyenne. « L'objectif est d'amener les élèves à maîtriser la compréhension logique des textes à dominante narrative, à identifier les principaux constituants du récit et leur agencement, notamment pour l'insertion de description et de dialogue. « On s'intéressera, en plus, à la description (indépendamment de la narration) et à l'explication.
« A ce niveau, on abordera la pratique de l'argumentation. » (13) Malgré le fait que la spécificité de tamazight soit soulignée dans les textes accompagnant les programmes pour le cycle moyen, il se trouve que les objectifs qu'on lui a assignée versent tous dans l'objectif global de l'enseignement des langues en Algérie ( l'arabe et le français). Les concepteurs des programmes ont une vision monolithique de l'enseignement des trois langues, malgré les assertions que nous retrouvons dans l'introduction générale qui octroie à chacune d'elles un objectif global spécifique (l4). La place qu'occupe l'enseignement de tamazight dans la nouvelle réforme du système éducatif algérien est explicitement mentionnée dans le programme de la troisième année moyenne ; « Les compétences relatives à l'apprentissage de la langue amazighe et l'acquisition des formes variées du discours dans cette langue, seront associées aux thèmes transversaux inclus dans les programmes des autres langues, notamment l'arabe et le français, tels que les formes du discours induites dans les programmes de ces disciplines, l'éducation à la citoyenneté [ .. ]. Cette association des apprentissages qui se font grâce à la nécessaire coordination entre les groupes disciplinaires, à celle des enseignements eux-mêmes, devraient favoriser le renouveau pédagogique souhaité par tous. »(15)
Les textes des manuels de tamazight : entre la recherche de la structure et les formes du discours et la réappropriation de la culture amazighe :
En se référant aux textes accompagnant les programmes de tamazight, nous constatons qu'en plus de l'objectif visant la maîtrise des différents types de textes, un autre objectif Iui a été ajouté. En effet, l'enseignement de cette langue doit contribuer à l'éducation du citoyen (l6), ainsi qu'« à la réhabilitation d'un élément important de l'identité algérienne (17) ». Afin d'arriver à cet objectif, l'apprenant doit avoir accès à la langue écrite durant toute la durée de sa scolarité dans le cycle moyen (l8). La lecture occupe une place importante dans le processus d'apprentissage des apprenants. « La lecture doit être une activité formatrice de l'intelligence et de la sensibilité » de l'apprenant (19). Les concepteurs des programmes ont avancé quelques critères permettant le choix des textes qui seront les futurs supports de cette activité pédagogique. En effet, selon eux, « seuls les textes qui maintiennent les élèves en haleine et qui permettent de réfléchir et de faire le point doivent être choisis. (20) ». Un peu plus loin, ils proposent, à titre de suggestion pour les concepteurs des manuels l'idée que « les documents devront constituer une collection d'indices, de signes culturels d'appartenance à une collectivité régionale, nationale et universelle [ ... ] ».(21) Cet objectif sera réitéré dans le programme de la troisième année moyenne : « Grâce à la lecture assidue d'extraits de textes appartenant au patrimoine culturel amazigh, maghrébin et universel, l'élève [...] aura eu l'occasion d'approfondir cette culture enrichie, dans le but de s'ouvrir sur son milieu, d'élargir sa vision du monde, d'acquérir le plaisir de lire qu'il a ressenti en classe. (22) » Cette lecture, notamment des textes appartenant au patrimoine culturel amazigh, doit donc amener l'apprenant à témoigner de sa culture.
Pour les concepteurs des programmes, cela constitue une quatrième compétence en plus de la lecture, de l'écriture et de la communication orale. (23) Mais qu'en est-il réellement des textes proposés (24) dans les quatre manuels pour la lecture ? Tableau récapitulant les textes des quatre manuels de tamazight : Comme nous pourrons aisément le constater, le recours à la traduction et à la création ex-nihilo est systématique. En termes de pourcentage les proportions se situent comme suit : Ce tableau met en exergue la dominance de la traduction et le recours à la confection de textes. En effet, sur l'ensemble des textes proposés, 47,91 % ont fait l'objet de traduction et d'une seule personne de surcroît (25). A cela s'ajoutent 32,81% de textes qui sont créés ou fabriqués, ce qui fait que 80,72% ne sont pas authentiques. Le recours à la traduction est bel et bien avancé dans les textes accompagnant les programmes. Ce recours est préconisé uniquement comme palliatif à l'inexistence de certains types discursifs et comme truchement par lequel l'apprenant amazighophone pourrait s'ouvrir sur les autres cultures (26).
Il est vrai que tamazight n'offre pas tous les types discursifs mentionnés dans les programmes du cycle moyen, ce qui fait du recours à la traduction l'unique moyen permettant de combler ce déficit. Mais lorsque nous constatons que le genre littéraire le plus dominant dans notre langue, à savoir les contes et les fables, n'apparaît presque pas dans les textes enseignés, alors que nous trouvons dans le premier projet du manuel de la deuxième année que quatre contes sur six sont des traductions et qu'un des contes, Tiwkilin, existe dans le manuel de la première année de langue française sous le titre de la fée, là nous devons nous poser des questions sur les raisons d'une telle démarche. Le même constat est valable pour le manuel de la quatrième année moyenne, où la traduction-adaptation de la nouvelle de Prosper Mérimée, Matéo Falcone,occupe 50% des textes proposés à la lecture. A première vue, la traduction ne remplit ici aucunement la fonction de palliatif à un besoin urgent, étant donné que ce type de textes est disponible soit dans les anciens textes, notamment ceux publiés dans la collection du Fichier de documentation berbère (FDB), ou ceux appartenant à la néo-littérature amazighe pour ne citer que Rachid Alliche, Amer Mezdad, Salem Zénia et Kamal Bouamara. Comme elle ne remplit pas le rôle de truchement permettant l'ouverture sur l'Autre, car toutes les traductions, sans exception aucune, ont, sous le couvert de l'adaptation, déformé le contexte originel pour les fondre dans un univers kabyle, ce qµi remet de facto en cause l'argument de l'ouverture sur les autres cultures. Alors comment expliquer ce recours à la traduction ?
Nous avons tenté d'expliquer plus haut que l'enseignement de tamazight est pensé de la même manière que celui des autres langues enseignées en Algérie, notamment le français. Nous avons toutes les raisons de penser que les concepteurs des manuels du cycle moyen n'ont voulu chercher à travers les textes proposés pour la lecture et la préparation à l'écrit que la structure, c'est-à-dire l'aspect formel. D'ailleurs, lorsque nous nous référons de nouveau aux programmes de tamazight, nous constaterons que l'objectif réel est d'« amener les élèves à maîtriser la compréhension logique des textes à dominante narrative, à identifier les principaux constituants du récit et leur agencement [ ... ]. » (27) La reproduction des types de textes enseignés constitue l'activité pivot de tout l'enseignement, la quasi-totalité des exercices proposés dans le cadre de la préparation à l'écrit versent dans l'unique objectif d'apprendre telle ou telle structure textuelle.
A vouloir chercher à inculquer aux apprenants « les principaux constituants du récit et leur agencement », à l'instar de ce qui se fait en français, les concepteurs des manuels ont eu directement recours aux textes en langue française déjà didactisés, le cas de la nouvelle de Prosper Mérimée, Matéo Folcone, est un cas révélateur, en ce sens où ce texte est surétudié dans tous les manuels de langue française. Pourrions-nous oser le terme de facilité ? Ces concepteurs des manuels cherchaient-ils la facilité en recourant à la traduction ? La réponse est aisée à trouver. Cette approche reste, selon nous, nuisible, car toutes les compétences installées chez nos apprenant, c'est-à-dire cet « ensemble de savoirs, de savoir-faire et de savoir-être acquis par les apprenants et que ces derniers devraient être capables de mobiliser dans des situations scolaires et non scolaires » vont être mis au profit du français et de l'arabe étant donné que tamazight a subi une régression presque totale de ses fonctions sociales. Dans le quotidien de nos élèves, tamazight est presque inexistante. Toutes les structures que nous enseignons (la lettre, la description, l'injonction) vont être mobilisées pour les autres langues.
Le contenu et le message, ainsi que les valeurs culturelles véhiculées par ces textes ne sont donc, d'aucune utilité ? C'est ce qui ressort des thèmes retenus dans les manuels. Exception faite de quelques textes de Feraoun, dont une partie à déjà été traitée dans les manuels de langue française, les références culturelles qui permettraient à l'apprenant de témoigner de sa culture sont inexistantes. Pour ce qui est des auteurs cités tout au long des quatre manuels, nous en avons dénombré vingt en tout. Les sept premiers auteurs les plus cités se positionnent comme suit : Comme nous pourrons le constater, la culture amazighe est représentée par un français ! A cela, s'ajoute l'absence de plusieurs auteurs dont l'apport à nos langne et culture est plus qu'importante. A ce titre, nous citerons : Bélaïd Aït Ali, Salem Zénia, Bensdira ... D'autres auteurs d'une importance primordiale, même s'ils sont cités, leurs œuvres restent sous-exploitées à l'instar de Brahim ZeIIal, Amer Mezdad, Rachid AIliche et Saïd BouIifa.
Conclusion
L'apparition des manuels de tamazight à partir de 2003 dans le paysage scolaire algérien constitue en soi une avancée pédagogique dont aucun de nous ne peut nier l'importance tant sur le plan pratique que sur le plan symbolique. Mais, le fait de vouloir mettre tamazight au même pied d'égalité que les autres langues enseignées en Algérie, notamment le français ; et au lieu de puiser dans la littérature amazighe ce qui pourrait être utilisé comme matériau didactique réunissant en son sein la structure recherchée et la référence culturelle amazighe, les concepteurs des manuels ont opté pour la facilité en recourant systématiquement à la traduction des textes français en leur donnant par l'usage de l'adaptation l'impression d'être authentiques. L'apprenant amazighophone et plus particulièrement le non-amazighophone ne peut arriver, à travers ce genre de textes, qu'à reproduire machinalement une structure, un type de texte. En fait, cette approche ne fait que renforcer ses acquisitions en d'autres langues, en français notamment ! Par contre il ne pourra pas les investir dans son quotidien étant donné que la langue amazighe est toujours absente de tous les domaines officiels. Avant de penser à la typologie des textes, il serait intéressant de favoriser un processus de valorisation de la culture amazighe chez l'apprenant en recourant à des textes authentiques, notamment ceux du FDB et faire en sorte que cet enseignement devienne réellement un moyen à travers lequel nous pourrons aménager Tamazight. C'est uniquement grâce à cela que notre langue puisse devenir l'égale des « grandes langues écrites » et reconquérir toutes ses fonctions sociales perdues à cause de sa marginalisation et sa stigmatisation qui n'ont pas encore disparu en Algérie.
Bibliographie :
Berdous, Nadia, Quelle norme écrite enseigne-t-on ?, Communication présentée lors du colloque de CNPLET, (Inédit).
Lacheraf, Mostefa, Des Noms et des lieux, Alger : Casbah éditions, 1998.
Mansouri, Habib Allah, Un enseignant de tamazight raconte son expérience pédagogique, ln : La Tribune /, le 10juin 1996, Pp.12-13.
Ministère de l'Education nationale, direction de l'enseignement fondamental, Document d'accompagnement des programmes de la première année. (langue amazighe). ONPS, avril 2003, Pp. 5-27.
Ministère de l'Education nationale, direction de l'enseignement fondamental, Commission nationale des programmes, Programmes de la deuxième année. (Langue amazighe). ONPS, décembre 2003, Pp. 3-25.
Ministère de l'Education nationale, direction de l'enseignement fondamental, Commission nationale des programmes, Programmes de la troisième année. (langue tamazight). ONPS, juillet 2004, Pp. 3-17.
Ministère de l'Education nationale, Direction de l'enseignement fondamental, Commission nationale des programmes, Programmes de la quatrième année. (Langue amazighe). ONPS, juillet 2005, Pp. 3-27.
Ministère de l'Education nationale, direction de l'enseignement fondamental, Commission nationale des programmes, Introduction générale aux programmes de la deuxième année .. ONPS, décembre 2003, Pp. 2-19, (en arabe).
Note de renvois :
1) L'unique action qui a été menée en ce sens et celle du Haut commissariat à l'amazighité (HCA) qui a organisé durant l'été 1995 trois semaines de formation pour les premiers enseignants. Le stage a eu lieu au niveau de la cité universitaire de Ben Aknoun. L'objectif de la formation était de doter ces enseignants des rudiments de grammaire berbère et d'une teminologie. Sur ce sujet, cf. notre article « Un enseignant de tamazight raconte son expérience pédagogique », in La Tribune, 10 juin 1996, pp. 12-13.
2) En réalité, les seules wilayas dans lesquelles il y avait un sérieux dès le départ étaient les trois wilayas de Kabylie, à savoir Tizi Ouzou, Béjaïa et Bouira. D'ailleurs, c'est dans ces wilayas que l'enseignement de tamazight se maintient vaille que vaille, malgré tous les obstacles administratifs que les premiers enseignants ont pu subir.
3) Il s'agit de la Coordination nationale du MCE, proche du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD) et des commissions nationales du MCE, proches du Front des forces socialistes (FFS).
4) Nous avons toutes les raisons de penser que le pouvoir misait beaucoup à l'époque sur la lacune de l'inexistence d'une préparation pédagogique pour que cet enseignement échoue. En effet, réussir l'enseignement d'une langue qui n'a jamais été enseignée dans aucun pays d'Afrique du Nord ou ailleurs, qui, de surcroît, n'est pas standardisée, à cela s'ajoute le fait qu'aucun travail didactique n'existait et les enseignants sont tous novices en la matière ne pourrait relever que du miracle ! D'ailleurs pour mettre toutes les chances en faveur de l'échec, l'enseignement de tamazight était optionnel, la note n'était pas comptabilisée et les premières classes pilotes concernaient uniquement la 9e année fondamentale et les classes terminales, c'est-à-dire les classes d'examens qui n'avaient en tête que l'idée de réussir leurs examens de fin de cycle. Sans parler du fait que la tranche horaire qui lui a été réservée n'était pas incluse dans les heures de travail réglementaire, les cours étaient dispensés entre 13h - 14h et 16h - 17h !
5) Il y avait en 1995 trois profils d'enseignants de tamazight : la première catégorie était constituée d'enseignants qui enseignaient déjà une autre matière, notamment l'arabe, et qui vont se reconvertir en enseignants de tamazight ; la seconde catégorie était composée de licenciés dans des filières autres que le tamazight, du fait que la licence de tamazight n'était pas encore ouverte ; la troisième, qui était la minorité, était constituée de personnes qui avait le niveau de terminale pour la majorité. Dans l'état actuel des choses, les licenciés en langue et culture amazighes constituent la majorité des enseignants de tamazight.
6) Ce séminaire a eu lieu en 1997 au niveau du lycée Rabah Stambouli, à Tizi Ouzou. Il est à signaler qu'un autre regroupement a eu lieu l'année précédente, 1998, à Larba Nath Iraten (Fort national).
7) Groupe spécialisé disciplinaire. Il est dirigé par M. Harrouche, un fonctionnaire du MEN en retraite. S Programme de la deuxième année moyenne, p.7.
9) Nous empruntons cette expression à Mouloud Mammeri. Cf. sa présentation au roman de Rachid Alliche Asfel, Paris, Fédérop, 1981, p.9.
10 « La langue de référence de ce programme est la variante kabyle. Partant du principe que l'hypothèse de koinè pan-amazighe n'est pas à l'ordre du jour, il est recommandé à tout utilisateur de l'adapter au parler réel des élèves de sa classe », in : document d'accompagnement des programmes de la première année moyenne, avril 2003
11) Ibid. p. 6.
12) Ibid. p. 9. [C'est nous qui soulignons].
I3) Programmes de la deuxième année moyenne (langue amazighe), décembre 2003, p. 6. [C'est nous qui soulignons]. '
14) Cf. Introduction générale des programmes. Document d'accompagnement des programmes de la deuxième année moyenne, op. cil. p. Il ( en arabe).
15) Programmes de la troisième année moyenne, juillet 2004, pA. [C'est nous qui soulignons].
16) Programmes de la première année, Op. Cil. p.6.
17) Ibid.p.I5.
18) Ibid. p.9.
19) Programme de la première année moyenne, Op. Cil. p. 12.
20) Ibid.
21) Ibid. p. 27.
22 )Programme de la troisième année moyenne, Op. Cil. p. 4.
23) Ibid.
24) Voir en annexe à la liste de tous les textes des quatre manuels.
25) Il s'agit de R. A. qui fait partie de l'équipe GSD chargée de la confection des manuels du moyen.
26) Programme de la troisième année, Op.CiI. Pp. 6-7.
27) Programme de la deuxième année moyenne, Op. Cil. p. 6.
L'auteur est inspecteur-Stagiaire de tamazight.


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