Jeudi 13 août, veille du passage au week-end « aménagé ». Alger, en cette journée, sous un soleil de plomb, connaît son habituelle effervescence de fin de semaine. Les principales artères de la ville sont bondées de monde. Jeunes et moins jeunes vaquent à leurs occupations. Cependant, même si le nouveau week-end n'entre en vigueur que vendredi, une certaine confusion semble s'être emparée des Algériens. En ce dernier jeudi de congé, synonyme d'ouverture des mairies, des banques et des assurances, nombre de citoyens en profitent pour faire certaines démarches qui leur seront dorénavant « très difficiles » à accomplir. Dans les locaux du service d'état civil d'une APC de la capitale, il y a foule. Rien d'anormal pour un jeudi, serait-on tenté de dire. Toutefois, certains voient là les signes que, « justement, un changement est sur le point d'arriver », affirme un employé de ce service. « Il y a plus de monde qu'en temps normal et d'après ce que j'ai pu comprendre, les gens profitent tous de ce dernier jeudi pour retirer des documents », ajoute-t-il. Il est conforté dans ce sens par une jeune femme qui raconte : « J'ai payé mes factures, réglé mon assurance, fait des courses et je suis passé à la banque. Maintenant je retire des extraits de naissance. Je sais qu'à partir de la semaine prochaine, j'aurai du mal à faire tout cela. » Car malgré l'intention affichée par certaines APC d'ouvrir leurs bureaux le samedi, le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales a, dans un communiqué publié mercredi soir, fixé les jours ouvrables des APC du dimanche au jeudi. Pourtant, manque de coordination ou faute de communication, un responsable au sein d'un service d'état civil avance que les employés travailleront le vendredi matin « jusqu'à 11h30 ». Ignorant des dispositions prises par le ministère de tutelle, il n'en démord pas, preuve de l'imbroglio entourant cette nouvelle mesure. « Normalement, on nous a notifié qu'à l'avenir, on travaillerait vendredi matin. » Au niveau des bureaux de poste, les choses sont beaucoup plus claires puisque le rythme de travail ne changera en rien après le 14 août. « C'est une bonne chose puisque le samedi, les postes seront toujours ouvertes », confie une professeur d'université, qui ne ressentira pas ce chamboulement puisqu'elle est en vacances. Les appréhensions semblent être le lot de la plupart des Algériens et tout particulièrement des commerçants, qui ne savent pas encore ce que leur réserve ce week-end semi-universel. C'est le cas du gérant d'un salon de thé situé en face de la faculté centrale d'Alger, qui fait salle comble le jeudi après-midi. « C'est notre plus grande journée car c'est jour de sortie pour les lycéens et les étudiants. Le vendredi est jour de repos pour nous. Maintenant, la clientèle du jeudi sera en cours ou au travail, car c'est un jour de semaine. Se rattraperont-ils le samedi ? », s'interroge-t-il. Concernant les nouveaux jours d'ouverture de son établissement, ce dernier se montre perplexe : « Dans un premier temps, nous allons tenter d'ouvrir nos portes le vendredi, le matin et l'après-midi, après les heures de prière. Ensuite, selon l'affluence, nous déciderons du maintien de cette journée ou de sa fermeture », expose-t-il. L'exploitant de la salle de cinéma l'Algeria avoue être confronté au même problème. « Le jeudi après-midi et le samedi étaient les jours durant lesquels l'affluence était la plus élevée, d'une part grâce aux étudiants et lycéens, d'autre part par rapport aux personnes qui ne travaillaient pas le samedi. Pour ce jeudi 13 août, la différence ne se fait pas encore ressentir. Il faudra attendre samedi 15 afin de savoir si le samedi sera un vendredi bis ou un jeudi après-midi », s'inquiète-t-il. Même son de cloche dans les magasins d'habillement ou de décoration qui enregistrent leurs meilleures recettes le jeudi, surtout durant l'après-midi. « De deux choses l'une : samedi sera une journée morte, comme un vendredi, et cela sera catastrophique pour les commerçants. Ou bien et c'est ce que l'on espère tous, samedi sera une journée entière, que les Algériens consacreront aux sorties et aux courses et cela sera alors tout bénéf' pour nous », spécule le responsable d'une boutique d'habillement située sur la rue Didouche Mourad. L'animation que connaîtront les rues du pays dépendra donc de l'attitude et du comportement qu'adopteront les citoyens et les consommateurs vis-à-vis de ce réaménagement du congé hebdomadaire. « Le jeudi était jour de sortie, de courses et une occasion pour régler des problèmes administratifs, par exemple. Et le vendredi un jour de repos, de ménage et de prière, mais aussi et surtout une journée pour récupérer parce qu'on aura veillé jeudi soir. A partir de la semaine prochaine, le vendredi sera le premier jour du congé hebdomadaire et restera, selon toute vraisemblance, un jour de repos. Et le samedi ? Sera-t-il un jour de sortie et de courses ? Dans ce cas-là, on se reposera le vendredi avant d'être sortie le samedi et l'on entamera la semaine, dimanche donc, complètement fatigués parce qu'on sera sortis samedi... », s'embrouille une jeune fille, qui profite de ce dernier jeudi « normal » pour faire les magasins.