Mourad Preure, expert pétrolier international et directeur du cabinet MP Strategy Consulting, a estimé hier, lors d'un débat relatif aux effets de la LFC 2009 sur les entreprises et les moyens de protection de la production nationale, que « la correction ne pouvait être que brutale ». Il a relevé un déficit de communication du gouvernement et de concertation avec les acteurs du secteur économique et les associations patronales ainsi qu'avec les représentants des travailleurs qui aurait été nécessaire pour trouver des mesures réalistes et faciliter leur mise en pratique. Il a décelé ce qu'il a appelé « une espèce de catastrophisme dans la presse, ce qui laisse supposer que des intérêts ont été menacés par les mesures gouvernementales. Ce qui a été retenu est essentiellement lié à l'imposition du crédit documentaire et l'interdiction du crédit à la consommation ». L'approche développée par l'Etat algérien à travers les dernières décisions prises est « en rupture avec ce qui était avancé par le passé. Il semble que l'Etat algérien a pris la mesure des vulnérabilités de notre économie et qu'il s'emploie à y faire face. Les mesures prises pour contenir l'importation demandent à être affinées car il convient de distinguer l'importation de biens et services qui entrent en amont des processus productifs et ceux qui découragent toute production nationale et annihilent tout effort d'accumulation interne ». Selon M. Preure, « il faut que l'Etat reste le grand ordonnateur du développement scientifique et technologique. L'Etat doit identifier le périmètre stratégique de l'économie qui englobe les industries stratégiques (énergie, télécommunications) et les jeunes pousses à haute valeur technologique ou positionnées sur des marchés émergents ». Protéger les entreprises stratégiques, selon son analyse, « est l'objectif premier du patriotisme économique ». Il est clair qu'outre Sonatrach y figurent en bonne place les banques, Algérie Télécom et Air Algérie, toutes deux sacrément malmenées par la concurrence internationale. Songeons un peu aux conséquences de leur disparition, mais aussi celle de champions comme Cevital et l'ETRHB. Les PME algériennes ont durement souffert de la prospérité pétrolière qui s'est traduite pour elles par l'irruption sur leur marché domestique de produits concurrents provenant de pays à bas coûts de main-d'œuvre. L'industrie ne représente que 5% du PIB algérien, ce qui lui inspire la déduction suivante : « Autant dire que l'Algérie tend à devenir un pays sans usines. » Selon Brahim Bendjaber, président de de la CACI, « l'investissement étranger doit être réorienté. Il faut se poser la question de savoir quelles sont les filières qui ont de l'avenir en Algérie ». Boulnouar El-Hadj Tahar, porte-parole de l'Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), qui a organisé la rencontre, a déclaré : « A priori, nous sommes favorables à la promulgation de la loi, mais il faut qu'elle soit suivie par d'autres mesures : il faut réfléchir à une véritable stratégie pour éradiquer le marché informel source de fraudes fiscales, le blanchiment d'argent et la corruption, revoir le système des impôts, revaloriser le développement local en impliquant concrètement les APC dans le développement économique et la création d'un réseau national de distribution. »