L'école algérienne ne prodiguera pas de cours le vendredi car cette journée est sacrée ! » C'est par cette sentence intrigante que le ministre de l'Education nationale, Boubekeur Benbouzid, a entamé lundi dernier la séance de travail et de concertation avec les syndicats de son secteur. Une réunion consacrée, entre autres, au réaménagement de l'emploi du temps des élèves afin de l'adapter au nouveau week-end semi-universel. Sur cette question justement, l'ensemble des syndicats n'ont pas saisi complètement cette notion de « journée sacrée » et parlent d'une cacophonie et d'une désorganisation au niveau de plusieurs secteurs. Un chamboulement induit par le réaménagement du week-end et qui aura incontestablement un impact et des retombées sur la réforme du système éducatif. Pour certains, le gouvernement a fait marche arrière en décrétant le vendredi comme étant une journée de repos. « Nous avons fait un pas en avant et deux en arrière. Le gouvernement est revenu sur sa décision quant à la matinée du vendredi, de crainte de subir les foudres des islamistes. En plus clair, le gouvernement n'a pas eu le courage de sa décision, d'où cette situation inexplicable », pense un syndicaliste qui a carrément suggéré au ministre l'application de l'ancien week-end au niveau de son secteur. Ce qu'a réfuté M. Benbouzid arguant qu'il s'agit là d'un décret présidentiel signé par Bouteflika. Une décision hautement politique qui doit être, selon lui, respectée à tous les niveaux et ce, quelles que soient les circonstances. A ce propos, M. Mériane, porte-parole du Snapest, a qualifié de « n'importe quoi » et d'« antipédagogique » les propositions du ministre destinées à assurer la scolarité des élèves d'une manière continue tout au long des cinq journées : du dimanche à jeudi de 8h à 12h et de 13h30 à 17h30 ou alors celle de faire fonctionner les établissements le samedi en consacrant l'après-midi du mardi au repos. « Sur le plan pédagogique, le ministre n'avait pas à faire ce genre de propositions car elles sont antipédagogiques et ne respectent pas les critères scientifiques consistant à laisser un temps nécessaire aux élèves pour l'apprentissage, l'assimilation des cours et un temps pour le repos. Pourquoi, dans ce cas-là, ne pas rester dans l'ancien week-end ou aller carrément vers un week-end universel », a souligné notre interlocuteur. Les syndicats de l'éducation sont persuadés que le ministre de tutelle les a associés à ce dossier, très sensible, pour ne pas assumer seul cette lourde responsabilité. « Nous aurions aimé que le ministre fasse appel à nous pour débattre du régime indemnitaire et des augmentations de salaires », lance un syndicaliste. Durant les débats et après échange de points de vue, le ministre a fait part d'une autre proposition liée à la réduction de la durée de la séance des cours à 45 minutes au lieu d'une heure actuellement. Une mesure destinée, en toute vraisemblance, à autoriser une meilleure répartition de l'emploi du temps un peu chargé dans certains cycles et, en particulier, dans le moyen. « Nous avons proposé initialement au ministère une translation de l'ancienne semaine sur la nouvelle, c'est-à-dire une journée de samedi libre, alors que la matinée de vendredi sera consacrée pour dispenser les cours programmés pendant la matinée de jeudi dans l'ancien système. Le ministre a refusé », a déclaré M. Mériane qui précise que l'option (de 45 minutes) nécessite afin de rattraper le quart d'heure perdu l'étirement de l'année scolaire à 35 semaines au lieu de 27. Cette variante, qui a fait, plus au moins, le consensus sera, probablement, entérinée dimanche prochain lors de la dernière réunion qui regroupera les partenaires sociaux et le ministre. Seulement, les enseignants à travers leurs syndicats conditionnent l'application d'une telle proposition par le recrutement d'enseignants. « L'enseignant est redevable de 18 heures par semaine, en réduisant la séance à 45 minutes, l'enseignants sera-t-il alors dans l'obligation de faire 24 heures par semaine ? Nous rejetons catégoriquement cela », a fulminé un syndicaliste. Les syndicats dans leur totalité déplorent l'attitude du gouvernement qui joue, à chaque fois, la carte du fait accompli en prenant des décisions aléatoires. « S'il y a une déconfiture dans l'économie algérienne, le fonctionnaire algérien n'est pas responsable de cette catastrophe. Les secteurs de l'éducation, de l'enseignement supérieur, de la santé... devraient être à l'abri de tout enjeu politique », note un enseignant. M. Chouguiat, de l'Unpef, reproche de son côté au gouvernement son manque de communication. « A notre sens, une décision pareille aurait dû faire objet d'un large débat en impliquant les pédagogues, les enseignants et les spécialistes, car un tel chamboulement à la veille d'une rentrée scolaire ne peut que nuire à l'école algérienne », relève notre source. Sadali du Satef regrette également l'attitude du gouvernement qui prend des décisions en solo. « La réforme du système éducatif a été vidée de sa substance, le gouvernement a toujours fait dans l'habillage : la preuve vient d'être donnée à travers ce nouveau chamboulement qui a été décidé sans la consultation de personne », a souligné M. Sadali. Aujourd'hui, le ministre de l'Education rencontrera les associations de parents d'élèves. Néanmoins, il faut attendre dimanche prochain pour être fixé sur la nouvelle réorganisation scolaire.