La dernière fois où il avait été aperçu, c'était pendant la matinée du mardi 19 avril, au Centre de recherches en anthropologie culturelle (Crasc). Il préparait la tenue d'un colloque prévu le lendemain à Oran. Selon les témoignages de certains de ses proches, vers midi, une personne avec laquelle il avait rendez-vous l'aurait appelé à midi et depuis son téléphone ne répond pas. Toutes les recherches entreprises par sa famille et ses proches se sont avérées vaines. Une plainte pour disparition a été déposée mercredi par son épouse alors que la LADDH (Ligue algérienne de défense des droits de l'homme) a demandé officiellement aux autorités policières et juridiques de «prendre en charge cette disparition par tous les moyens que permet la loi, notamment en procédant à la localisation de son téléphone portable avant épuisement de la batterie». Contacté hier, Chouicha Kaddour, universitaire et collègue de Kerroumi, déclare n'avoir reçu aucune nouvelle sur cette disparition. «Nous voulions entamer une opération d'affichage d'un avis de disparition avec la photo de Kerroumi dans tous les quartiers de la ville pour collecter d'éventuels témoignages à même de localiser le disparu, mais nous avons été empêchés par les services de police. Ils nous ont déclaré qu'il fallait une autorisation pour tout affichage, même s'il s'agit d'un avis de disparition…», a-t-il dit. Contactés, les services de la DGSN ont affirmé par la voix du chargé de la communication, M. Boudalia, qu'une «enquête sur cette disparition a été ouverte par le commissariat du 6e arrondissement près la sûreté de wilaya d'Oran, et que la police judiciaire est en train de mener des investigations. Le procureur a d'ailleurs été avisé. L'avis de recherche a été diffusé au niveau national». A propos du refus de la police de délivrer l'avis de disparition à la famille de Kerroumi, le divisionnaire explique : «Cet avis a été signé jeudi après-midi mais n'a pas été récupéré par l'épouse. Celle-ci a signalé la disparition le 20 avril et tout a été fait entre les 20 et 21. Il y avait juste des délais à respecter…» Ce qui suppose, pour l'instant, que Kerroumi n'est pas au niveau des commissariats. En tout état de cause, si jusqu'à hier, ce militant n'a toujours pas réapparu, à Ghardaïa, les cinq autres militants de la LADDH, interpellés par la police mercredi dernier, alors qu'ils distribuaient des communiqués de leur organisation, ont finalement été relâchés. Selon le président de la section locale, Kamel Eddine Fekhar, les cinq militants : Achkabkab Hadj Hamou, Sariaâ Brahim, Tebakh Aïssa, Moussa Ouali Mustapha auraient été interpellés par un groupe de policiers à l'américaine, embarquant les quatre personnes, sous prétexte qu'elles collaient les affiches illégalement. «Pourtant, celles-ci portent l'entête de la LADDH et son contenu concerne la situation des sinistrés des inondations de 2008. Les mis en cause n'ont été relâchés que tard dans la soirée du mercredi. Nous avons de tout temps affiché des communiqués sans aucune autorisation de quiconque.» Selon lui, l'interrogatoire de la police a porté sur l'organisation et le contenu du communiqué et affirmé qu'une convocation lui a été adressée par les mêmes services pour le même motif. En fait, et selon toujours M. Boudalia, la police a interpellé les quatre personnes sus-citées et une cinquième, le nommé Bouhdiba Mahfoud, aux environs de 15h. «Ils affichaient des tracts appelant à un sit-in pour le 25 avril. Les policiers ont procédé à l'examen de leur situation, et les ont libérés après. L'affichage public est soumis à une autorisation des pouvoirs publics.» En tout état de cause, ces interpellations, qu'elles soient à Oran ou à Ghardaïa, laissent croire que la levée de l'état d'urgence n'a pas permis la levée de toutes les entraves qui violent les libertés collectives.