On veut une justice au sein de l'Etuto ». Déployée par les protestataires à l'entrée de l'entreprise, la banderole dévoile le malaise que vivent les quelque 80 employés de l'Etablissement de transport urbain de Tizi Ouzou, six mois seulement après sa création. Depuis hier, ils ont entamé une grève illimitée pour dénoncer des cas de licenciements abusifs sans motif valable par le directeur, affirment-ils, et la falsification des contrats de travail (modification de la période d'essai sans préavis). La plate-forme de revendications contient quatre autres points : suppression des contrats de travail déterminé et leur remplacement par des CDI, le retour de tous les employés licenciés sans conditions, une commission d'enquête ministérielle à propos de la falsification des contrats de travail et enfin l'augmentation des salaires. La répression des libertés syndicales est telle au sein de l'entreprise que les grévistes ont été empêchés de s'adresser aux journalistes. Même les photos étaient interdites. « Il faut l'aval du directeur ». D'ailleurs, il a fallu « négocier » âprement avec des agents de sécurité, zélés pour daigner « libérer » chauffeurs et receveurs pour les besoins de l'entretien. Nous les avons rencontrés non sans peine à l'extérieur. Le ras-le-bol est sur toutes les langues. « Nous touchons des salaires minables alors que nous travaillons du matin au soir dans des conditions extrêmement difficiles. Nous avons protesté pacifiquement mais le directeur a refusé de nous recevoir. Sur notre insistance, il nous a rétorqué : vous pouvez aller voir la justice », dira un employé qui a été relevé de ses fonctions à son retour de congé, sans qu'aucune explication ne lui soit donnée, selon ses dires. Un responsable de la sécurité a subi le même sort après cinq mois de travail. Motif invoqué : essai non concluant. « On a mis fin à mes fonctions depuis le 1er août sans aucun motif valable. Je n'ai eu ni avertissement, ni retard, ni mise à pied ». Les grévistes ont évoqué un autre cas de licenciement abusif. Il s'agit d'un ingénieur en électromécanique affecté au service maintenance. Ce dernier a été « remercié » alors qu'il venait de rentrer d'un stage d'une semaine en Belgique. Les mauvaises conditions de travail au sein de cette entreprise revenaient telle une litanie tout au long de la discussion. « Le salaire d'un chauffeur de bus ne dépasse pas 15 000 DA alors que des agents de l'administration touchent jusqu‘à 35 000 DA. Les mêmes horaires ont été reconduits durant ce mois de Ramadhan sans prévoir une pause pour la rupture du jeûne. Avant le Ramadhan déjà, il nous était strictement interdit de nous arrêter pour nous restaurer ou de prendre un sandwich même dans le bus », témoigne-t-on. Les grévistes déplorent par ailleurs l'inexistence d'une station digne de ce nom. Rencontré dans les couloirs de l'administration, le directeur de l' Etuto s'est refusé à faire le moindre commentaire aux journalistes présents sur les lieux.