Un sommet crucial des pays d'Amérique du Sud (Unasur) se tient aujourd'hui à Bariloche (ouest de l'Argentine) dans le but de calmer la tension entre Caracas et Bogota sur un accord permettant à Washington d'utiliser sept bases militaires en Colombie. Le président vénézuélien, Hugo Chavez, a prévenu, à quelques heures de la réunion qui doit avoir lieu dans cette station de sports d'hiver, au bord du lac Nahuel Huapi, que son pays allait « préparer la rupture des relations avec la Colombie ». Il a déclaré mercredi qu'il ne s'attendait « à aucun changement » d'attitude à Bariloche de la part de son homologue colombien, Alvaro Uribe. « La Colombie n'a aucunement l'intention de s'asseoir à la place des accusés. Elle y va la tête haute », a riposté un haut responsable colombien. Bogota a accusé, mercredi, Caracas devant l'Organisation des Etats américains (OEA) d'avoir un « projet expansionniste ». Caracas a dénoncé une opération de « diversion » à l'approche du sommet. Mais la tension ne se limite pas au face-à-face entre les deux frères ennemis. D'autres pays de la région ont également fait part de leur préoccupation, à l'image du Brésil lui aussi frontalier de la Colombie. Le président brésilien Luiz Inacio « Lula » da Silva a déclaré vendredi à son homologue américain, Barack Obama qu'il existait « une certaine sensibilité dans la région » et que « dans certains pays, cette sensibilité était plus grande ». Brasilia a demandé « des garanties » que tant l'équipement que le personnel ne pourront être utilisés à d'autres buts que ceux déclarés par la Colombie. L'accord américano-colombien prévoit que Bogota mette sept de ses bases à la disposition des Etats-Unis dans le cadre d'opérations contre le trafic de drogue et les guérillas. Quelque 300 militaires américains sont déjà basés dans le pays sud-américain dans le cadre du « Plan Colombie » de lutte contre le trafic de drogue, mais le nouvel accord lui permettrait de déployer jusqu'à 800 soldats et 600 civils. Le ministre de la Défense brésilien, Nelson Jobim, a insisté mardi à Bogota auprès de son homologue Gabriel Silva pour que ces garanties soient « juridiques ». La Colombie « devra garantir que leur activité sera strictement limitée à ses problèmes de politique intérieure », a également souligné la ministre de la Défense argentine, Nilda Garré. Un envoyé spécial américain, le sous-secrétaire d'Etat adjoint Christopher McMullen, effectue une tournée pour expliquer la position américaine. Il s'entretenait hier à Buenos Aires avec les autorités argentines. Washington a fait valoir que l'accord ne crée pas de bases américaines en Colombie et ne fait que fournir « un accès » à des bases colombiennes pour l'armée américaine. Des GI's indésirables et encombrants en Colombie Les Etats-Unis craignent que cette tension croissante ne mette en danger le changement voulu par M. Obama dans les relations avec l'Amérique latine. Pour le Venezuela et l'Equateur, voisins de la Colombie et fers de lance de la gauche radicale latino-américaine, l'accord américano-colombien représente une menace pour la stabilité régionale. Le président bolivien, Evo Morales, a appelé, mercredi, à organiser un référendum dans tous les pays de l'Unasur sur cet accord controversé. L'Unasur doit aussi se pencher sur les craintes d'une course aux armements dans la région. Les dépenses d'armement ont totalisé 51 milliards de dollars (36 milliards d'euros) dans la région en 2008, soit 30% de plus qu'en 2007, selon les experts de l'institut de recherches argentin Nueva Mayoria.