Le président afghan sortant Hamid Karzaï a annoncé son intention de lancer, s'il est réélu, un « dialogue de réconciliation nationale » avec les talibans « dans les cent premiers jours » de son éventuel nouveau mandat, dans un entretien publié hier dans Le Figaro. « C'est quelque chose que je vais faire dans ces cent premiers jours », a-t-il précisé, en ajoutant : « Pas question d'un dialogue avec des talibans qui ne renonceraient pas à leurs liens avec Al Qaïda, ou qui refuseraient de reconnaître la Constitution afghane ». « C'est quelque chose que l'Arabie Saoudite doit bien retenir », a-t-il observé, en évoquant implicitement le rôle d'intermédiaire que joueraient les Saoudiens auprès des talibans. Il a précisé qu'il était prêt « dès demain » à accorder des sauf-conduits aux talibans pour qu'ils puissent venir négocier à Kaboul. La Commission électorale indépendante (IEC) a annoncé dimanche que Hamid Karzaï restait en tête de l'élection avec 48,6% des votes, d'après des résultats portant sur 74,2% des bureaux de vote. Les résultats définitifs doivent être annoncés le 17 septembre. Interrogé sur la possibilité évoquée pendant sa campagne qu'il puisse offrir un poste à son concurrent Abdullah Abdullah, M. Karzaï est resté évasif : « Si je sors vainqueur, je proposerai à tous les Afghans compétents, souhaitant travailler avec moi pour le bien du pays, une place dans mon gouvernement ». M. Karzaï est revenu sur le raid de l'Otan près de Kunduz qu'il avait déjà vivement critiqué : « Quelle erreur de jugement ! Plus de 90 morts pour un simple camion, qui était de surcroît immobilisé dans le lit d'une rivière ! Pourquoi n'ont-ils pas envoyé des troupes au sol pour aller récupérer la citerne ? » Il a indiqué que le commandant des troupes américaines et de l'Otan en Afghanistan, le général américain Stanley McChrystal, en lui téléphonant pour lui présenter « ses excuses », lui avait indiqué « qu'il n'avait pas lui-même donné cet ordre de bombardement ». Le chef de l'Etat afghan a accusé les Américains d'« attaquer Karzaï en sous-main », parce qu'ils l'aimeraient plus docile. « Ils ont tort, car il est de leur intérêt, en tant qu'amis et alliés, que l'Afghanistan ait un président respecté par son peuple ». « Personne n'a intérêt à ce que le président afghan devienne une marionnette américaine », a-t-il observé. Selon lui, les médias britanniques cherchent à délégitimer le futur gouvernement afghan, par une manipulation qui a pour but d'« installer un gouvernement de marionnettes ». « En Afghanistan, les marionnettes n'ont jamais porté chance à leurs maîtres étrangers », a-t-il remarqué, rappelant les échecs des « empires britannique et soviétique ». « J'espère que les Américains n'essaieront pas la même chose car ils s'exposeraient au même destin », a-t-il mis en garde.