C'est à la faveur de cette période de grande consommation de viande rouge, le mois sacré de Ramadhan, que le massacre d'une des races ovines algériennes les plus nobles, celle d'Ouled Djellal, prend toute son ampleur dans cette wilaya steppique. Ce massacre s'opère à travers l'abattage des brebis de moins de 5 ans, notamment l'antenaise de 2 ans, située entre la brebis adulte et l'agnelle. L'abattage de cette catégorie d'ovin s'exacerbe en cette année agricole exceptionnelle où la diminution du cheptel est recherchée des éleveurs, engendrant de fait la rareté de l'agneau. Maquignons et chevillards, face aux besoins incompressibles en viande ovine, se rabattent sur la brebis et l'agnelle (moins de 10 mois d'âge) et égorgent à tour de bras des milliers de têtes dans l'impunité la plus totale. Cette situation n'est pas le fruit du hasard, elle obéit à une motivation purement économique : la viande d'agneau étant plus rémunératrice que les autres viandes, maquignons, chevillards et bouchers sacrifient l'antenaise et l'agnelle et la cèdent au même prix. Ce massacre s'opère à grande échelle dans cette wilaya où l'on compte seulement 11 abattoirs pour 47 communes. La plupart ne répondent pas aux normes, nous dit Bouabane Rachid, chef de service vétérinaire à la DSA de M'sila : « Ces abattoirs sont plutôt des décharges tant l'insalubrité est flagrante, sauf pour M'sila, Bou Saâda et Sidi Aïssa. Plusieurs communes à forte concentration de population, voire même des daïras ne disposent pas d'abattoirs. » « Dans ces agglomérations, soutient M. Bouabane, ce n'est pas que les gens ne mangent pas de viande ovine du fait cette défaillance. Mais on tue le mouton chez soi, sans aucun contrôle, et on vend la viande sur les étals des bouchers en toute impunité. » Dans de telles conditions, l'abattage illicite ne peut être qu'à grande échelle. On sacrifie à tour de bras, n'épargnant rien et ne respectant rien pas même les dispositions réglementaires stipulées par le décret exécutif n° 91-514 du 22 décembre 1991 relatives aux animaux interdits d'abattage. Parmi les animaux interdits d'abattage figurent les femelles ovines âgées de moins de 5 ans (antenaises et agnelles) qui font l'objet présentement d'un massacre systématique sans que les structures en charge du contrôle n'y mettent un terme. L'ampleur de ce phénomène se mesure à l'aune des agissements des maquignons et chevillards de Barhoum qui, au fil des ans, se constituant en véritables gangs, égorgent, hors de l'abattoir communal, les animaux interdits d'abattage à l'exemple des antenaises et les agnelles, dont on estime que pas moins de 3000 têtes sont décimées chaque mois. L'ampleur du gâchis est confirmé par ce chiffre, qui représente en fait trois fois le nombre d'ovins (1333) tués à l'abattoir de Barhoum durant le mois d'août 2008. Il faut dire que la fonction de contrôle n'est pas efficace dans cette contrée. Maquignons, chevillards et bouchers continuent leurs œuvres macabres depuis des lustres, se constituant des fortunes ; ils ont toute latitude d'œuvrer dans une ambiance de complaisance, qui a annihile toute velléité de contrôle. Pour avoir une idée de la défaillance du contrôle, il suffit de faire un tour à Barhoum où des carcasses sans estampillage trônent dans les boucheries de l'avenue principale de la ville sans que personne n'y trouve à redire. Les conditions de stockage sont lamentables aussi bien pour la viande rouge que les volailles, qui sont exposées dans des conditions inappropriées. Au niveau de la direction du commerce, le premier responsable nous a expliqué que l'abattage illicite relève de la compétence des services vétérinaires et que sa structure ne peut vérifier la qualité de la viande. Mais ce qui ne nous a pas été expliqué par ce directeur, c'est que l'abattage illicite peut être décelé par le contrôle de l'estampillage dont l'authenticité relève de la compétence des services de la répression des fraudes et non pas des vétérinaires, lesquels procèdent au contrôle de la qualité du produit en examinant l'animal avant et après l'abattage, avant l'estampillage qui le valide à la consommation.