Depuis quelques années, les saisons des pluies en Algérie se suivent et se ressemblent de par les dégâts occasionnés, causant mort d'homme dans plusieurs cas. Et l'on affirme, de mémoire d'homme, ne jamais avoir assisté à un tel déchaînement des éléments, invoquant les effets du réchauffement climatique. Pourtant, les météorologues ne sont pas aussi catégoriques. L'Office national de la météorologie (ONM) affirme, en effet, qu'on ne peut pas, aujourd'hui, constater et quantifier les bouleversements induits par le réchauffement climatique dans notre pays. Pour ce faire, il faudrait effectuer une étude sur 100 ou 200 ans et relever des situations caractéristiques selon leur fréquence et leur sévérité à l'échelle planétaire », assure Brahim Ambar, chargé de la communication au sein de l'ONM. Pourtant, de nombreuses inondations ont eu lieu ça et là à travers le pays, occasionnant plusieurs morts. De même, l'année hydrologique, qui a débuté le 1er septembre en cours, a enregistré un pic pluviométrique, puisque durant les premiers jours du mois, 58 millimètres d'eau – ordinairement la quantité mensuelle enregistrée – sont tombés en une heure et demie. « Les perturbations climatiques qu'a connues dernièrement l'Algérie sont des perturbations "classiques", de "saison" », rassure-t-il. Ainsi, ces dernières intempéries sont des orages automnaux de transition, une activité tout à fait normale pour ce mois de septembre, et qui devraient donc se poursuivre durant le mois d'octobre. Ces phénomènes, des plus impressionnants de par leur violence, ne sont toutefois que des orages localisés, dont la durée est très réduite. Ce qui démontre, selon le spécialiste, la variabilité du climat algérien. « Le problème en Algérie, et l'une des raisons du caractère transitoire de la météo, est que le pays est situé dans une zone tempérée et, de par sa particularité géographique, subit toutes les influences du Bassin méditerranéen ainsi que des différents massifs montagneux qui l'entourent, chaînes telliennes ou chaînes du sud de l'Europe », explique M. Ambar. Ce qui fait de cette région à physiographie particulière une zone de transition qui lui confère une variabilité météorologique et climatique des plus élevée. Ce qui tend à se caractériser par une modification de l'intensité et de la répartition des précipitations et une amplification des phénomènes extrêmes. Prévenir en amont Mais ce qui rend ces perturbations atmosphériques spectaculaires et, comme constaté au fil des années, meurtrières, est surtout du fait de l'activité humaine et du développement anarchique de l'occupation du sol. « La vulnérabilité de l'Algérie aux intempéries est donc beaucoup plus due à l'urbanisation qui ne respecte aucune norme, et qui contribue à la réduction des espaces d'écoulement des eaux pluviales. Avec les conséquences que l'on sait », déplore M. Ambar, ajoutant : « Evidemment, ceci n'exclut pas que ces intempéries soient le résultat du réchauffement climatique. Toutefois, les experts ne peuvent pas se permettre d'infirmer ou d'affirmer une telle relation. » Mais si effets il y a, quels seront-ils pour l'Algérie ? « A long terme, les effets du réchauffement climatique se traduiront par une augmentation des phénomènes climatiques, orages, dépressions, sécheresses, mais aussi et surtout par l'amplification de la violence de ces perturbations en termes de fréquence et de sévérité », répond l'ONM. C'est donc pour cela qu'il est urgent de prendre en charge les aspects « prévisibles » de tels phénomènes, et ce, en réduisant la vulnérabilité des régions à risque. Comment ? En veillant à une gestion de l'espace qui respecte les normes de sécurité et surtout à interdire toute construction ou installation sur terrain inadapté, sur des lits d'oueds par exemple, ou sur le passage d'écoulement des eaux. « Lorsqu'il n'y a que quelque 30 à 40 millimètres de pluie qui tombent sur Alger, par exemple, l'on peut voir que toute la ville est paralysée et que l'ensemble de la population est en état d'alerte. Imaginons alors quels seraient les dégâts si la pluviométrie était de l'ordre de 600 millimètres durant quelques heures... » Et ces situations ont bel et bien déjà eu lieu. Au mois de mars 1974, un épisode orageux a duré près de 60 heures dans la région centre du pays, durant lequel près de 700 millimètres d'eau étaient tombés. Moyenne bien au-dessus de celles enregistrées lors des inondations de Bab El Oued ou plus récemment de Ghardaïa. D'où l'importance d'un réel travail en amont pour tenter d'endiguer les désastres que pourraient occasionner de tels déchaînements des éléments, si cette tendance à la hausse de la pluviométrie, en relation ou non avec le réchauffement climatique, devait devenir « structurelle ».