La rente pétrolière représente plus 46% du PIB 2011, près de 98% des exportations. La contribution au PIB du secteur industriel ne cesse de diminuer, il est passé de 8,5 en 2003 à 5,3 en 2011. Seules 400 entreprises publiques représentent le parc industriel de l'Etat. L'investissement public pèse 10% du PIB, la production locale hors hydrocarbures ne représente que 39% du PIB et est répartie comme suit : agriculture 8%, BT 7%, industrie 5%, services privés 19% PIB. Les importations ont un poids de près du 1/3 du PIB. On peut donc déduire que la réorientation économique des années 1980, décidée juste après les événements liés au terrorisme, ont complément déconnecté, voire dévié, les recettes pétrolières de leurs objectifs doctrinaux. Résultat : à part un effort visible entrepris dans l'infrastructure routière, et à quel prix, car l'affaire de l'autoroute Est-Ouest n'a pas encore livré tous ses secrets, plus de 178 milliards de dollars sont déposés dans des banques étrangères sans une idée précise de leur utilisation éventuelle pour le développement national. Des alternatives proposées en débat à ce jour – L'ouverture des capitaux des entreprises ou la privatisation : Il a été constaté que désormais les investisseurs, notamment étrangers, s'intéressent plus aux secteurs à forte croissance pour la partager avec les Algériens et leur laisser la prise en charge du coût social au risque d'enflammer le pays. Quant aux Algériens, ils s'emparent des activités accessoires et ancrent leurs ventouses dans le seul but de sucer la rente pétrolière. Selon l'Office national des statistiques (ONS), organisme étatique en la matière, il a été recensé en 2011 près de 959 718 entités économiques en Algérie, dont plus de 853 370 unités, soit 88,92% restent versées, soit dans le commerce soit dans les services, toujours est-il, très éloignées de la production proprement dite. – Diversifier l'économie : Depuis pratiquement 1985, les experts n'arrêtent pas de lancer cette formule générique sans pour autant circonscrire les domaines dans lesquels l'Algérie pourrait exceller pour faire face au marché international. Que reste-t-il de l'agriculture, de l'industrie, de l'éducation, des services, etc. L'informel guide l'économie aujourd'hui. C'est un fait incontestable. – Ne plus vendre du pétrole : Le laisser dans le sous-sol ne garantirait pas le maintien de sa valeur dans le temps et surtout ne fructifierait pas son rendement, sauf si les cadres algériens sont réellement en panne d'idées. – Investir les fonds souverains à l'étranger : Si les cadres algériens n'ont pas réussi à utiliser ces fonds pour le développement national, comment pourraient-ils les redéployer à l'international face aux mastodontes des investissements. Ce débat autour d'une stratégie alternative au pétrole dure dans le temps, mais l'objet autour duquel se situe cette discussion interminable demeure une source tarissable. Alors, avons-nous assez de temps pour continuer ce débat ? Pour répondre, nous faisons un rappel de l'existant en matière de ressources en hydrocarbures en Algérie. Quelques chiffres du secteur des hydrocarbures L'Algérie jouit d'un vaste domaine minier estimé à plus de 1 536 442 km2, dont uniquement 774 688 km2 sont utilisés. Un peu moins de la moitié, soit 761 754 km2, reste vierge et susceptible de renfermer des hydrocarbures. 371 850 km2 sont soit en phase de prospection soit en celle de recherche. Cela est un atout considérable que seuls les Français et partant les Américains en sont conscients. Le cadre législatif a évolué depuis 1986 dans un souci d'attirer les investisseurs pour trois raisons : – partager le risque d'exploration ; – explorer les zones en profondeur du Sahara ; – augmenter les réserves. Il y a eu successivement : la loi 86-14 du 19 août 1986 amendée en 1991, pour alléger les dispositions fiscales ; la loi très contreversée sur les hydrocarbures 05-07 du 26 avril 2005 ; l'ordonnance 6-10 du 29 juillet 2006. On est donc passés d'un régime de «partage de production» à un autre dit de «concession évoluée». Il faut souligner que depuis la promulgation de cette dernière ordonnance, les investisseurs ne se bousculent pas pour prendre les blocs proposés par l'agence Alnaft. Cela devrait contraindre les pouvoirs publics à revoir leur copie pour certainement assouplir le système fiscal. En général, il est admis en exploration qu'entre le moment d'investir et le début d'exploitation, il faut compter au moins 5 ans pour la phase de recherche et de délinéation et de 2 à 4 ans pour le développement, donc toutes les découvertes actuelles sont l'œuvre des contrats de partage de production qui ont conduit depuis 1986 à plus de 266 découvertes, dont 155 ont été faites par Sonatrach seule et 111 en association. On annonce 4 autres découvertes en 2012. Selon le revue de BP Statistical Review of World Energy, on attribue à l'Algérie les réserves de : – pétrole : 12,2 milliards de barils, soit 18,5 ans au rythme de production actuel. – Gaz : 4500 milliards de m3, soit 55,3 ans Ces chiffres sont contestés par le milieu officiel, et le ministre de l'Energie et des Mines a déclaré, le 4 janvier 2011, que nos réserves ne vont pas s'épuiser dans ces délais sans donner d'autres chiffres. On peut uniquement se contenter des déclarations du P-DG de Sonatrach dans sa conférence de presse du 7 février 2012, qui situe leur augmentation de 40 à 50% ces dix dernières années. De la nouvelle donne du marché des hydrocarbures Elle dicte de revenir aux fondamentaux avec des projections quantifiées. En dépit de la crise européenne, toutes les études prospectives s'accordent pour prévoir : – une demande de pétrole, alimentée surtout par les pays émergents et qui oscillerait autour de plus ou moins 2%/an et notamment en diminution cette année ; – malgré la croissance modeste, la part des hydrocarbures reste prépondérante ; – une importance marquée du gaz naturel ; – la production de pétrole restera concentrée dans les pays du Moyen-Orient, l'OPEP est amenée à doubler sa production pour passer de 30 à environ 60 Mbj à l'horizon 2030. Les marchés des hydrocarbures sont plus que jamais globalisés, cela implique : – les réformes de libéralisation/privatisation des industries énergétiques ; – l'amélioration des conditions d'accès aux ressources et des codes pétroliers des pays producteurs ; – le développement généralisé des marchés spots, à terme, futurs, etc. ; – le débat sur la prise en compte du pétrole à l'OMC se précisera dans les deux à trois années à venir ; – la mondialisation pose enfin de la question des réformes politiques et de la démocratie dans les pays producteurs. En ce qui concerne le jeu des acteurs, on peut retenir : – de plus en plus un jeu complexe se noue entre les acteurs-clés du marché pétrolier : Etats-Unis, OPEP (Arabie Saoudite), Russie, Chine et maintenant le Qatar ; – l'accès au pétrole du Moyen-Orient restera plus que jamais un enjeu majeur pour les grandes économies importatrices ; – la question de la sécurité d'approvisionnement est toujours posée par l'Europe ; – la question de la domination pétrolière mondiale par les Etats-Unis est sérieusement posée et implique un décryptage de la politique pétrolière extérieure américaine en fonction des élections en cours dans ce pays. Doit-on conclure qu'avec les recollements des morceaux suite aux derniers scandales, Sonatrach reste très loin de ces préoccupations stratégiques ?