Tikjda, une station climatique perchée à plus de 1400 m d'altitude, située à une vingtaine de kilomètres au nord de la commune d'El Asnam, attire de plus en plus de visiteurs ces dix dernières années. Au fil des week-ends, ce cœur palpitant du Djurdjura s'anime. Les visiteurs viennent des quatre coins d'Algérie. Il faut rappeler que ce haut lieu de villégiature n'a pas été épargné par la sauvagerie des hordes terroristes. Au début des années 1990, les infrastructures hôtelières ont été incendiées. Le site a donc été déserté pendant une dizaine d'années. Mais, depuis l'an 2000, Tikjda reprend ses couleurs. Dame nature charme l'homme et le temps de la «disette» touristique est bel et bien révolu. Samedi 25 février. Premier week-end ensoleillé après deux semaines d'intempéries déprimantes qui avaient paralysé tout le nord du pays, la station de Tikjda, encore couverte d'une couche importante de neige, a été prise d'assaut par des centaines de personnes. Manifestement, cette poudreuse qui, il y a quelques jours, avait provoqué la colère des populations, aujourd'hui se fait pardonner. Les enchante. Leur fait oublier les soucis du quotidien. L'homme se réconcilie avec la neige. La journée s'annonce radieuse. Un doux soleil de février réchauffe le corps et le cœur. Il est déjà 11 h et le calme y règne encore ! Les villégiateurs, ce samedi, ne sont pas encore arrivés. Contrairement à la journée de vendredi où la route a été bloquée dès le début de la matinée. Du côté du Centre national des sports et loisirs (CNSLT), les employés de l'hôtel travaillent sans répit. L'établissement tourne à plein régime. Les responsables du centre s'en réjouissent, évidemment. Le fait qu'il ait neigé en grande quantité cette fois, a fait venir beaucoup de touristes. «Que la neige reste encore longtemps ! », espèrent-ils. L'homme charmé par Dame nature A quelques encablures de la station, la RN 33 commence à se rétrécir. Ici, la neige n'a pas totalement fondu. Dans l'enceinte du CNSLT, la neige est si abondante, que les employés et les clients empruntent une sorte de labyrinthe pour aller d'un endroit à un autre. Les automobilistes n'ont pas le droit de s'arrêter une fois sur la route, car cela crée d'énormes embouteillages. Il faut à tout prix rouler. La neige, dont l'épaisseur dépasse de loin un mètre, cerne le chemin des deux côtés. «Regardez ! On dirait qu'il a neigé hier. Tout est encore blanc», s'exclament les visiteurs tombant nez à nez avec l'immensité de cette neige immaculée qui domine le flanc sud du Djurdjura. Midi approche. Quelques familles font leur apparition dans ce décor hivernal. Même les visiteurs, qui ont passé la nuit à l'hôtel, devraient être debout à cette heure-là. Les enfants, eux, ne perdent pas de temps pour se mettre à jouer. Les uns font des bonhommes de neige et les autres courent et se jettent sur la poudreuse. Un peu plus loin, d'autres gamins font du ski. D'ailleurs, c'est la saison pour les amoureux des sports de montagne de s'adonner au plaisir de la glisse et au slalom. Dans ce site touristique, on rencontre des personnes de tout âge. Mais, il n'y a pas que les humains qui ont droit d'en profiter. Le singe magot n'est pas en reste. Ce primate a dû quitter sa cédraie d'à côté pour venir «quémander» de la nourriture chez les visiteurs, bien qu'il soit interdit par la loi du Parc national de Djurdjura (PND) où se situe Tikjda, de leur donner à manger. Les autres singes qui ne s'aventurent par vers les gens, fouillent dans les poubelles. A quelques mètres plus haut, sur les cimes des cèdres, la neige niche encore. Cependant, un bémol à ce cadre idyllique, c'est l'absence de parking pour garer les véhicules. La neige a tout couvert. Il n'y a que les routes qui sont ouvertes à la circulation. Aussi, durant la journée de vendredi, les automobilistes sont restés bloqués dans un immense embouteillage. «Il y avait beaucoup de monde. La route était pleine de voitures, nous avancions difficilement. Nous sommes restés coincés dans l'embouteillage pendant plusieurs heures. Ce n'est qu'en fin d'après-midi que nous avons pu sortir», témoigne un visiteur qui était là le vendredi. «Aujourd'hui, il y a moins de monde. C'est mieux comme ça, les gens pourront venir et repartir tranquillement », a-t-il ajouté. A cause de ce bouchon, nous avons appris également que plusieurs familles qui avaient réservé à l'hôtel, n'ont pu rejoindre leurs chambres qu'aux environs de 22 h. L'informel au secours des touristes La station de Tikjda n'attire pas uniquement les touristes en quête de villégiature. Les commerçants à la sauvette y viennent également, chaque week-end, installer leur charrette n'importe où. Ces derniers ne s'inquiètent pas d'être chassés par les services de sécurité. Ils sont nombreux à squatter les bords de la route. On y vend tout, du thé, des sandwichs, des cailles, etc. Une véritable activité commerciale qui s'anime en toute irrégularité et une absence totale des normes d'hygiène. La présence de ces commerçants, bien qu'illicite, rend service à beaucoup de gens. Pour ceux qui ne peuvent se permettre un plat de 1000 DA dans les restaurants du CNSLT, ils peuvent tout de même «casser la croûte» chez ces restaurateurs de circonstance, sans trop dépenser. Il est impératif que les pouvoirs publics mettent au point une stratégie afin de mettre un terme à cette anarchie qui prend de l'ampleur, et surtout offrir à tout le monde, riches et pauvres, l'opportunité de passer un agréable séjour à Tikjda. La journée tire à sa fin. D'aucuns sont déçus de ne pas avoir pu visiter Tighzert. La route y menant est encore bloquée par la neige. Idem pour l'Akoukeur. Mais chacun promet de revenir. Le soleil se retire doucement vers l'Ouest et le silence ne tarde pas à envelopper Tikjda. Sur le chemin du retour, on n'entend plus que le son des eaux qui ruissellent sous la neige. En Attendant la fonte des neiges avec l'arrivée du printemps, les randonneurs redécouvriront un autre visage de Tikjda, celui de la verdure, d'air frais et de sérénité.