Vue d'ensemble : «L'agriculture maghrébine dispose de 23,1 millions d'hectares de surface agricole utile (SAU) pour une population dépassant les 80 millions d'habitants», souligne le chercheur Omar Bessaoud dans son exposé intitulé «Les politiques publiques de modernisation agricole au Maghreb, enjeux et défis pour le futur» et paru dans l'ouvrage Pouvoirs, sociétés et nature au sud de la Méditerranée (voir l'article ci-dessous). Le potentiel foncier maghrébin est ainsi bien inférieur à celui de pays comme la France, dont la SAU est de 27,5 millions d'hectares ou de l'Espagne avec ses 24,8 millions d'hectares. D'où donc l'urgence d'une politique de gestion rigoureuse bannissant toute forme de gaspillage et d'accaparement pour les pays du Maghreb. Comparée à ses voisins de la région, l'Algérie est dans une posture davantage difficile en la matière. L'auteur de l'étude en question souligne, en effet : « L'Algérie est un pays au climat sec. Les zones arides et semi-arides, qui sont sujettes à des sécheresses fréquentes, représentent 85% de la superficie totale du territoire ». La raison qui fait que les vulnérabilités en Algérie sont beaucoup plus accentuées réside dans les retards énormes que le pays accuse en matière de modernisation des systèmes d'exploitation de ses ressources. Le monde rural face aux disparités «A peine un peu plus de 7% de la SAU globale du pays est consacrée aux superficies irriguées à forte intensité productive, soit 569 000 ha et la part de la SAU par habitant est en réduction continue, passant de 0,75 ha/hab en 1962 à 0,25ha/hab aujourd'hui», note M. Bessaoud à cet égard. Ces tensions, bien qu'elles soient présentes, mais d'une moindre intensité en Tunisie, par exemple, où les terres cultivées couvrent environ un tiers du territoire (5,2 millions ha sur un total de 16,4 ha), dont 400 000 ha consacrés à l'agriculture irriguée. Cependant, « le Maroc dispose de terres plus étendues par rapport aux pays voisins avec une SAU de 9,3 millions ha», est-il encore noté. Par ailleurs, parallèlement à la dégradation naturelle des espaces due essentiellement à l'érosion hydrique au nord du pays et la salinisation des sols et la désertification au sud, le facteur humain n'est pas moins menaçant pour les rares ressources foncières en Algérie. Ainsi, le rythme accéléré de l'urbanisation du pays risque de se répercuter négativement sur ces ressources. Evoquant ce point, il est souligné dans le même sillage que « le renversement de tendance historique a eu lieu au cours des années 1980. La population rurale qui représentait encore en 1966 plus de deux tiers de la population (68,6%) est descendue à 49,7% en 1987 et à 39% en 2005 ». Paradoxalement, l'étude en question fait ressortir qu'au moment où la population urbaine observe une croissance rapide, le monde rural ne fléchit pas. Bien au contraire, la croissance démographique dans les régions rurales estimée à environ 1% demeure en constante augmentation. En conséquence, cette situation n'a pas manqué de véhiculer des inégalités importantes entre le monde rural et l'espace urbain, sachant que «les facteurs de progrès ne se sont pas diffusés de manière continue et n'ont pas toujours profité de manière équitable à l'ensemble des populations rurales», tandis qu'en termes d'emploi, faute de débouchés et de diversification des activités économiques exercées au niveau local, l'agriculture continue d'occuper environ 40% de la population active dans les zones rurales en Algérie. Ces emplois restent toutefois précaires en non-permanent dans la majorité des cas.