L'agriculture ne peut pas, à elle seule, garantir la sécurité alimentaire ni même régler le problème du chômage dans les pays du Maghreb, compte tenu de la croissance démographique et des ressources naturelles qui s'aménuisent de plus en plus dans cette région, a estimé, jeudi dernier, l'expert Omar Bessaoud, lors d'une conférence sur "la sécurité alimentaire et les politiques agricoles et rurales au Maghreb ", tenue au siège du CENEAP. "On ne peut s'appuyer sur le seul secteur agricole pour atteindre les objectifs en matière de lutte contre la dégradation des ressources naturelles, de sécurité alimentaire et de création d'emplois", a affirmé ce spécialiste en analyse des politiques agricoles et rurales. Par ailleurs M. Bessaoud a indiqué que quels que soient les efforts qu'on puissent déployer pour accroître la production et l'offre agricole, on ne pourra jamais satisfaire la demande de la population, compte tenu de leur évolution démographique sans compter la question des prix. "Aucun pays ne produit tout ce qu'il consomme", a-t-il ajouté, estimant que la sécurité alimentaire n'est pas une question agricole, mais une question économique globale. "Ce sont les capacités à dégager, pas seulement par la rente pétrolière, mais aussi nos capacités à produire au niveau national et à exporter d'autres produits", a-t-il dit en parlant de l'Algérie, citant le tourisme, les services et l'industrie. D'après Bessaoud, l'agriculture constitue pour les pays de l'Afrique du Nord, le principal secteur d'activité car elle contribue à hauteur de 15 à 20% au PIB et représente 20 à 40% de la population active, alors que les 3/4 des ménages ruraux sont des ménages agricoles. Quant à la région du Maghreb, elle compte plus de 3 millions d'exploitants agricoles dont la majorité est concentrée dans de très petites exploitations, dont 80% ont moins de 4 hectares. "Ces populations agricoles exercent une pression sur des ressources en terres et en eau fortement limitées", selon ce dernier , qui a cité les bilans établis dans les trois pays du Maghreb dont l'Algérie, la Tunisie et le Maroc. Ce spécialiste fait état d'une pression croissante sur les capacités de reproduction de la fertilité naturelle des terres du fait de l'érosion, de la désertification et de surexploitation des nappes d'eau. Deux tiers des terres agricoles de la région Maghreb sont situés dans des zones arides et semi-arides, les plus exposées à la sécheresse, a-t-il ajouté. Ce dernier affirme que le Maroc est en train de puiser dans des nappes hydriques non renouvelables pour irriguer ses 1,2 million d'hectares de terres, alors que l'Egypte va devoir renégocier son quota d'eau qui représente 55 milliards de m3/an qu'elle puise du Nil. "nos contraintes sont fortes et elles vont s'accentuer, pour cela, nous ne pouvons pas confier à l'agriculture un rôle qu'elle ne peut pas assumer", a t- il résumé . Par ailleurs, ce spécialiste considère que la sécurité alimentaire au niveau mondial est intimement liée à la hausse des prix du pétrole, la spéculation foncière et aux politiques de réduction de l'offre appliquées par les pays de l'union européenne. "La hausse des prix du pétrole incite au développement des biocarburants à base de matières agricoles comme le maïs notamment aux Etats-Unis, alors que les pays européens réduisent de plus en plus les surfaces agricoles et les subventions à l'agriculture", a-t-il expliqué. On ce qui concerne l'Algérie, cet expert estime que compte tenu de la facture alimentaire enregistrée lors du premier trimestre de 2011 qui est de 2,1 milliards de dollars, les importations alimentaires pourraient atteindre 6, voire 7 milliards de dollars pour l'ensemble de l'année en cours.