Une bonne partie de la basse ville de Jijel était, hier, une cité morte suite aux émeutes qui se sont déclenchées après la tentative d'immolation d'un jeune homme de 25 ans, au quartier dit Village Moussa, à l'est du chef-lieu de wilaya. Tout a commencé dans la matinée d'hier, quand des policiers se sont présentés devant le jeune R. Hamza pour lui ordonner de démanteler la boutique de fortune qu'il avait installée pour vendre des cigarettes et des cosmétiques. L'échange de propos avec les policiers a apparemment énervé le jeune Hamza. Selon des témoins que nous avons rencontrés près de la bicoque de la victime, c'est un coup de pied d'un policier qui a mis le feu aux poudres ; il a cassé les vitres d'un comptoir en aluminium, suscitant la colère du jeune homme, qui n'a pas hésité à remplir une bouteille d'essence puisée d'une mobylette, de la déverser sur son corps avant d'y mettre le feu. Il s'est ensuite jeté sur les deux agents et a sauté à l'intérieur du fourgon de la police. Transporté dans un premier temps à l'hôpital Mohamed-Seddik Benyahia, le jeune homme sera, après les premiers soins, évacué au CHU de Constantine. Les deux policiers ont été légèrement blessés. Une source hospitalière nous a affirmé que la victime se trouve dans un état grave et souffre de brûlures du 3e degré. Cet acte de désespoir a suscité un grand émoi chez les habitants de Village Moussa, particulièrement les jeunes qui ont instantanément investi la rue pour crier leur colère. La situation a rapidement dégénéré en émeute. Les jeunes en furie se sont attaqués à la sûreté urbaine de Village Moussa avec des pierres, avant de se rendre au centre-ville. En cours de route, les panneaux d'affichage de listes des candidats se trouvant place du Bateau ont été arrachés alors que les vitres d'une dizaine de véhicules stationnés près de la prison de Jijel ont volé en éclats sous les jets de pierres. L'appel à la rescousse des forces antiémeute n'a pas, jusqu'en fin d'après-midi, atténué la tension ; des dizaines de jeunes émeutiers se trouvaient toujours près du siège de la wilaya, faisant face aux policiers. La ville basse était quasi déserte et les commerces avaient baissé rideau de peur de subir la colère des jeunes. Aux abords du quartier Village Moussa, l'air pollué picotait fortement les narines du fait des gaz lacrymogènes, alors que du côté de la police, au moins une dizaine d'éléments ont été évacués vers les urgences de l'hôpital pour des soins. Un policier que nous avons croisé au niveau de l'établissement hospitalier avait la lèvre inférieure fendue.