Le marché du médicament connaît, ces derniers mois, une perturbation assez importante. L'indisponibilité de certains produits pharmaceutiques, que ce soit au niveau des officines ou dans les hôpitaux, crée une véritable tension dans le secteur. Une réalité que les pouvoirs publics réfutent. Pourtant, grossistes, fournisseurs, importateurs et pharmaciens ne cessent de tirer la sonnette d'alarme sur les dangers que peut engendrer cette situation et risque d'affecter sérieusement les malades algériens. Si les nouvelles mesures de la loi de finances complémentaire 2009 viennent modifier subitement les règles financières pour l'importation des médicaments – un marché déjà régi par des dispositions réglementaires drastiques – d'autres problèmes viennent se greffer et compliquer sérieusement la situation. La direction de la pharmacie au ministère de la Santé n'arrête pas d'innover en matière de restrictions allant dans le sens de la réduction de la facture d'importation. Après avoir exigé des importateurs de réduire de 50%, voire de 60% les quantités de produits importés, cette même direction a décidé, cette semaine, d'instruire verbalement les directeurs techniques des entreprises d'importation et de production, en prévision du dépôt des programmes d'importation pour l'année 2009-2010, de maintenir les quantités importées jusqu'au 31 août 2009 et de les diviser par deux pour les quatre mois qui suivent. En d'autres termes, si un importateur a importé 100 boîtes jusqu'au 31 août 2009, il lui sera autorisé d'acquérir, la même quantité de janvier à août 2010 et la moitié pour les quatre derniers mois de l'année. Une procédure jugée par les importateurs pénalisante et favorisant une situation de monopole. « Celui qui n'a pas importé de quantités importantes durant cette période, risque de ne plus importer. Ceci favorise directement des situations de monopole », dénoncent certains opérateurs, qui n'écartent pas le risque de connaître dans les prochains mois une forte rupture des stocks de médicaments. Une rupture est déjà vécue depuis quelques mois sur le terrain. Le malade reste le plus touché par cette indisponibilité. Des spécialistes en la matière affirment que « les raisons sont aujourd'hui connues de tous et les responsabilités sont partagées ». Si les importateurs pointent du doigt les pouvoirs publics en raison de la promulgation de mesures très restrictives, les grossistes, l'autre maillon de la chaîne de la distribution, parlent d'asphyxie et de blocage. Lequel est souvent imputé à l'importateur. Les grossistes des différentes régions du pays que nous avons rencontrés signalent qu'outre les nouvelles mesures prises par le gouvernement, à savoir l'interdiction de certains produits à l'importation, la LFC 2009 et les cahiers des charges du ministère de la Santé sont les premières raisons de ces ruptures. Des problèmes sont aussi à signaler du côté de certains importateurs. Devant une concurrence féroce entre eux, les procédures d'approvisionnement se compliquent de plus en plus. « Les grossistes font aujourd'hui face à des pratiques commerciales inacceptables comme la vente concomitante. L'importateur, qui est souvent producteur, impose ses produits fabriqués localement pour nous approvisionner », signale un grossiste de la région ouest. Pour lui, il y a beaucoup d'anomalies, comme par exemple la différence des prix pour un même produit importé par différents opérateurs. Il arrive que le prix de certains médicaments passe du simple au double. « Les restrictions de certains importateurs ne permettent plus de s'approvisionner et constituer des stocks. Des ruptures sont signalées, c'est parce que les quantités demandées ne sont pas toujours honorées par les importateurs. » Il est aussi à signaler, continue notre interlocuteur, que certains importateurs « nous incitent à prendre des quantités importantes de produits essentiels sous prétexte qu'une tension sur ce produit est prévue dans les prochaines semaines. Ce qui nous amène par moments à avoir des difficultés à déstocker ces produits ».