Le 25 octobre, au terme d'un processus plébiscitaire conduit à marche forcée depuis près de deux ans, mobilisant tous les moyens et le faste grandiloquent de la propagande de l'appareil de l'Etat, le président Zine El Abidine Ben Ali inaugurera, à 73 ans, son 5e – et en principe – dernier mandat présidentiel de cinq ans. Le taux de participation à ce scrutin verrouillé – qui se double le même jour d'élections législatives une fois de plus totalement faussées – ne saurait être, du moins officiellement, en deçà des 85% du corps électoral et le président Ben Ali sera élu par plus de 94% des suffrages censés s'être exprimés ! Face à cette débauche de moyens déployés, dont le coût est évalué à l'équivalent de 15 à 17 millions de dinars tunisiens, l'opinion, lassée par cette « overdose » de liturgie de l'Etat-RCD, affiche un scepticisme, voire une indifférence, à tous égards révélateurs de son désintérêt pour la chose publique et pour la vie politique. Il ne s'agira, au demeurant, que de la consécration d'un véritable rituel d'allégeance, comme la Tunisie n'en a probablement jamais connu depuis l'indépendance en 1955. S'inscrivant dans la logique despotique de la réforme constitutionnelle imposée par le référendum du 26 mai 2002 ; ce sacre – auquel la première dame de Tunisie est étroitement associée – confirmera que, par-delà les apparences formelles d'une consultation en trompe-l'œil, le système politique de l'Etat-RCD n'a de nom dans aucun traité de droit constitutionnel. Le référendum de 2002, puis les élections de 2004 et de 2009 constituent des moments décisifs sur la voie du renforcement du despotisme et du système d' impunité, qui en est l'un des principaux fondements. Cette dérive ainsi que l'embrigadement des composantes autonomes de la société civile (journalistes, magistrats, défenseurs des DH), et les atteintes systématiques et quotidiennes aux droits de l'homme, unanimement constatées par les observateurs internationaux, sont évidemment niées par le pouvoir. Le contexte de ces élections est marqué, de surcroît, par les effets longtemps niés de la crise économique mondiale, une corruption galopante et la montée des tensions sociales illustrée notamment par la révolte légitime des populations du bassin minier de Redeyef- Gafsa (sud-est) fermement réprimée, ainsi que par les manœuvres en direction de l'Islam politique. Après avoir diabolisé et réprimé de façon implacable le parti islamiste En Nahdha, le pouvoir s'est engagé dans la voie d'une surenchère piétiste conservatrice. Toujours est-il que l'échéance des élections du 25 octobre sera une nouvelle occasion manquée d'amorcer une timide ouverture.