Située dans la daïra de Tigzirt, à 35 km au nord du chef-lieu de la wilaya de Tizi Ouzou, la commune de Mizrana n'arrive pas à décoller, tant les projets de développement affectés à cette municipalité restent en deçà des attentes de la population locale. Si le problème d'alimentation en eau potable semble être un souvenir lointain notamment pour les habitants d'Aït Saïd, chef-lieu de la commune, il n'en demeure pas moins que le secteur de la santé est devenu le parent pauvre dans cette division territoriale. Ainsi, le centre de santé est dépourvu d'un service des urgences. De ce fait, le citoyen est contraint de se déplacer sur plus de 10 km, pour la plupart des villageois, vers la ville de Tigzirt. Même la maternité est fermée en raison de l'absence du personnel médical et paramédical. L'on note aussi l'insuffisance des moyens de ramassage scolaire pour les élèves scolarisés au niveau des lycées de Tigzirt, étant donné que la localité est dépourvue d'un établissement d'enseignement secondaire. Aussi, selon un élu, le problème de la dénatalité préoccupe la collectivité, qui risque, dans quelques années, de voir plusieurs de ses écoles vouées à la fermeture. A l'école primaire de Tamazirt Ourabah, l'on a enregistré, à la dernière rentrée scolaire, 37 élèves seulement. Dans certaines classes, l'on ne trouve pas plus de 5 écoliers. « Pratiquement, 90% de tous les projets alloués à notre commune ont été réalisés, notamment dans le volet assainissement. Le point noir reste toujours le cas de Vomga, dans le village Tibcharine, à l'endroit du réseau de distribution en eau potable, alors que le réservoir est implanté dans la commune d'Afir, wilaya de Boumerdès », précise un élu à l'APC. Au chapitre jeunesse, les habitants de Mizrana ne peuvent jouir ni de l'activité sportive, ni celle du théâtre ou d'autres actions culturelles au niveau de leur localité. Dans ces villages, même le football n'est pas roi et l'équipe communale a dû mettre la clé sous le paillasson, en raison de l'absence d'infrastructures et de moyens financiers. « Le projet du complexe sportif de proximité piétine toujours », nous dira Ferhat Ghanmi, président du CSA US Aït Saïd. Par ailleurs, dans le chapitre logement, la commune enregistre un manque en matière d'aides à l'habitat rural. La région n'a bénéficié que de 330 subventions depuis 2005. Pour ce qui est de la formation, l'annexe du CFPA demeure toujours fermée. « Le ministre de la Formation professionnelle nous a promis, en 2005, lors de sa visite dans la région, d'ouvrir une annexe au chef-lieu de notre commune, mais depuis, il n'a rien fait », nous a expliqué Lounès Hamoudi, ancien maire de Mizrana, une commune créée après le découpage administratif de 1984. Notre interlocuteur ajoute que la localité est frappée de plein fouet par un chômage galopant. La jeunesse est livrée à elle-même, sans aucune perspective d'avenir. La région ne dispose d'aucun tissu économique susceptible de générer des postes d'emploi. D'ailleurs, il n'y a ni agriculture ni industrie pour absorber cet important taux de chômage. De son côté, Mohamed Saïd Habarek, ex-président du comité du village d'Azrou, estime que la forêt ne cesse d'être polluée en raison de l'absence d'une décharge contrôlée. « Il y a toujours des oppositions. Beaucoup de terrains relèvent du domaine forestier. Cela empêche le développement de la commune », nous a-t-il dit, avant d'ajouter : « La localité doit avoir sa quote-part des revenus de l'exploitation du liège de la forêt de Mizrana. » Toutefois, cet avis ne concorde pas avec les propos d'un élu local qui estime que « l'exploitation du liège apportait jadis d'importants bénéfices. Mais, ces dernières années, depuis l'apparition du terrorisme, la récolte est devenue maigre. Les exploitants ne peuvent pas accéder à la forêt », nous a-t-il souligné. Justement, parlant de la situation sécuritaire, la quiétude commence à revenir de plus en plus dans cette localité. « Vous savez, durant les années 1990, on a vraiment subi les affres du terrorisme, mais ces dernières années, la situation s'est améliorée. Il y a eu, certes, des attentats, mais loin des villages, dans la forêt », nous a raconté un citoyen qui ajoute : « En 1994, on a assisté, à cet endroit, à un accrochage avec des terroristes où un patriote de notre village avait été assassiné. Durant la même année, les terroristes ont incendié le parc communal. » Par ailleurs, dans l'optique de faire revenir les citoyens qui ont quitté leurs villages pendant les années du terrorisme, l'APC entreprend des projets de développement dans certaines bourgades de la commune. C'est le cas de Tikiouèche, un hameau qui s'est pratiquement vidé de ses habitants, notamment depuis l'assassinat par des terroristes, il y a quatre ans, d'un responsable des GLD, dans un faux barrage. La population de Mizrana, qui vient de sortir des griffes du terrorisme, ne demande que sa part de développement pour rompre avec un quotidien plein d'aléas.