Le Premier ministre israélien Ariel Sharon se rendra prochainement en Tunisie, pays avec lequel Israël n'entretient pas de relations diplomatiques. Très officiellement, il ne s'agit pas d'en établir, mais de participer au sommet mondial sur la Société de l'information qui se tiendra en Tunisie du 16 au 18 novembre. En tout état de cause, Sharon a accepté une invitation du président tunisien Zine El Abidine Ben Ali à se rendre en Tunisie pour une visite sans précédent comme la qualifient d'ores et déjà les milieux israéliens. « Le chef du gouvernement a reçu une invitation à se rendre en Tunisie dans le cadre d'une conférence sur la coopération scientifique et a l'intention d'effectuer cette visite », a-t-on indiqué de même source. Les contacts en vue d'une visite possible ont été noués par le ministre des Affaires étrangères israélien Sylvan Shalom, c'est-à-dire celui-là même qui affirmait, sans probablement être cru,que son pays tentait de nouer de relations diplomatiques avec dix pays arabes, a-t-il été précisé. Israël et la Tunisie n'entretiennent pas des relations diplomatiques, mais ils avaient établi en 1996 des « bureaux d'intérêts » réciproques et désigné des « représentants permanents ». Ces représentations ont été toutefois fermées en octobre 2000 à l'initiative de la Tunisie qui entendait ainsi protester contre la répression sanglante de l'Intifadha palestinienne par l'armée israélienne. Rappelons que les ambassadeurs égyptien et jordanien en Israël viennent de regagner leurs postes respectifs d'où ils avaient été rappelés pour consultations il y a quatre années en signe de protestation contre la répression israélienne. Est-ce à dire que celle-ci a cessé ? Ce qui n'est pas évident même s'il y a lieu de parler de simple accalmie. Sylvan Shalom, qui a donc préparé cette visite, était dans le vrai même en partie. « Nous avons déjà établi des relations diplomatiques au niveau des ambassadeurs avec l'Egypte, la Jordanie et la Mauritanie et je suis en contact avec d'autres pays arabes (...). Au moins dix autres pays arabes peuvent avoir une représentation diplomatique en Israël », a déclaré M. Shalom. Il a tenu ces propos après la décision la veille du gouvernement d'Ariel Sharon d'ordonner l'évacuation des 8000 colons des 21 implantations de la bande de Ghaza et de quatre autres en Cisjordanie, un plan qui n'est rien d'autre qu'une immence supercherie, puisque non seulement il ne s'agit pas d'un processus de paix comme cela aurait été souhaité, mais il ne se fait pas sans contrepartie puisque Israël va annexer de force de nouveaux territoires palestiniens en Cisjordanie. « Nous nous orientons vers la réconciliation d'Israël avec le monde et avec ses voisins. Le changement d'approche du monde à notre égard est énorme », a ajouté M. Shalom. Mais cet enthousiasme n'a plus de raison d'être quand on constate qu'Israël a réitéré officiellement son rejet de la décision de la Cour internationale de justice (CIJ) relative au démantèlement du mur de séparation, érigé en Cisjordanie. Le rejet est intervenu dans une réponse présentée par le parquet israélien à la Cour suprême israélienne, au nom du gouvernement, suite à une requête relative au mur de séparation. Le gouvernement israélien a estimé que la décision de la CIJ « ne l'engage à rien », soulignant que ce mur est « provisoire et constitue un moyen de défense en vue de parer aux attaques », en attendant de trouver une solution politique au conflit. Cette justification israélienne est contradictoire au débat houleux au sein du gouvernement israélien autour de la question du tracé du mur, puisque les colons œuvrent à travers ce tracé à délimiter les frontières de l'Etat israélien. Les Palestiniens estiment de leur côté que « les changements qui seront apportés au tracé du mur seront minimes ». Cependant, le gouvernement de Sharon poursuit la construction de ce mur qualifié par les Palestiniens de « mur de l'apartheid », notamment près d'El Qods. Selon une source palestinienne, les forces d'occupation israéliennes poursuivent la construction du mur au nord et au nord-ouest d'El Qods. Pour sa part, Sarhane Slaima, coordinateur du comité populaire central à El Qods, a qualifié ces travaux de « criminels et hostiles » , soulignant que ce mur vise « l'épuration ethnique de milliers de citoyens palestiniens et la destruction de leurs infrastrutures, notamment commerciales, éducatives et sanitaires ». Le climat rappelle celui de 1995, c'est-à-dire l'époque qui avait suivi la signature, le 13 septembre 1993 à Washington, de l'accord de principes palestino-israélien, avec ses fameuses conférences sur le développement de la zone MENA (Moyen Orient et Afrique du Nord) qui prévoyaient la normalisation arabe avec Israël. L'accord d'Oslo a été tué par Israël dès lors qu'il s'agissait d'aller au-delà de la simple autonomie, mettant dans la gêne ceux des pays qui avaient rompu le consensus quant à la normalisation avec Israël. Démarches et bureaux de représentation avaient été mis en veilleuse à cause de la répression israélienne. Israël a réussi à faire revenir la région au statu quo qui prévalait avant les accords d'Oslo. Et depuis, à vrai dire, rien n'a changé malgré les déclarations israéliennes.