Guo Shujuan s'est jetée à l'eau sur une plage de l'île de Hainan, souillée de détritus et bouteilles en verre, mais la jeune femme n'y prête pas attention, toute à sa passion nouvelle, le surf à la chinoise. « Il y a deux ans, je n'avais jamais entendu parler de surf », dit la jeune femme bronzée, guide touristique à Guilin, une ville du sud de la Chine. Elle s'y est mise il y a un an, après s'être demandée « ce qu'il y avait de si marrant à être debout sur une planche ». La Chine a beau avoir l'une des plus longues façades maritimes au monde, le surf ne fait jusqu'à présent guère de vagues dans ce pays, où le bronzage est la marque des paysans courbés dans leurs champs et où la pollution décourage les plus entreprenants. Pourtant, de plus en plus de jeunes Chinois en quête de sensations et d'aventures se lancent dans des sports de plein air. Pour les surfeurs, toujours en quête de nouveaux « spots », la Chine est peut-être l'une des dernières frontières à conquérir et notamment Hainan, sa grande île tropicale au large de sa côte sud, où le tourisme connaît un essor rapide, et qui organise ce week-end une compétition de surf. Brendan Sheridan, un Américain de 30 ans, s'efforce, en tous cas, de lancer l'île au nombre des destinations et faire des émules en Chine même. Après avoir surfé sur les plages de Californie, enseigné l'anglais en Chine puis travaillé dans une banque de Philadelphie à s'occuper de paiements électroniques, le jeune homme a décidé, il y a trois ans, de s'installer à Hainan. Il y a monté Surfing Hainan, qui organise cours et sorties vers les bonnes plages. Certes, les vagues de Hainan ne rivaliseront jamais avec celles de Hawai ou de Californie, selon les amateurs, mais pour Sheridan elles sont les meilleures de Chine, parfois même assez impressionnantes pour représenter un défi pour des pratiquants confirmés. Mieux encore, elles se trouvent sur les plages les moins fréquentées du pays, alors que les bons spots dans le monde sont souvent surfréquentés. « C'est ce que Hainan peut offrir à ceux qui aiment le surf : l'absence de foule », déclare Sheridan. Pour le moment, la clientèle de Sheridan a déjà doublé au cours de l'année écoulée, comme le nombre de participants attendus à la deuxième édition de la compétition qu'il organise ce week-end : le Hainan Open. De 18 l'an dernier, les participants sont passés à 40, en majorité des expatriés vivant en Chine. Deux créateurs de vêtements surfwear ont accepté de parrainer l'événement. Sheridan entend bien gagner à sa cause davantage de Chinois, notamment parmi cette « classe moyenne qui a de l'argent à dépenser et apprend à s'amuser », même si, reconnaît-il, les débuts sont encore timides. Un des obstacles est que si les Chinois vont désormais à la plage, c'est principalement pour y faire trempette car avant de leur enseigner le surf, Sheridan doit souvent leur apprendre à nager ! Le surf reste, même à Hainan, « quelque chose que pratiquent ces dingues d'étrangers ». Mais Guo Shujuan et ses pairs ont ouvert le bal et le sport pourrait se répandre après cette première génération de surfeurs. Avec pour conséquence secondaire de rendre ses adeptes plus conscients de leur environnement surpollué, espèrent certains.« Si vous voulez être heureux avec la nature, il faut que vous en soyez l'ami », souligne Angela Wang, une consultante de Pékin, convertie au surf en une leçon par Sheridan.