Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, doute que le président du Soudan Omar El Béchir, attendu en Turquie pour une réunion internationale, ait orchestré un génocide au Darfour. « Aucun musulman ne peut perpétrer un génocide », a-t-il déclaré hier dans un entretien accordé à la chaîne de télévision publique TRT, citée par l'agence Anatolie. M. Erdogan, qui dirige un parti puisant ses sources dans la mouvance islamiste, a souligné qu'il s'était personnellement rendu au Darfour (en 2006) mais n'y avait pas constaté de génocide « comme on le dit ». « De toute façon, un musulman ne peut perpétrer un génocide, il n'en est pas capable », a-t-il estimé, dans une allusion au président soudanais sous le coup d'un mandat d'arrêt international de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et contre l'humanité au Darfour. « S'il y a une telle chose (un génocide), nous sommes capables d'en parler face à face avec le président Béchir », a encore dit M. Erdogan. Il a ajouté que la participation attendue du président soudanais à un sommet économique de l'OCI, aujourd'hui à Istanbul, répondait à une invitation de cette Organisation et non de la Turquie. Le déplacement de M. Béchir a provoqué le mécontentement de l'Union européenne à laquelle la Turquie, qui n'a pas signé le traité de la CPI, souhaite adhérer. Hier en fin d'après-midi, El Béchir n'était pas encore arrivé dans la métropole turque. Lorsque la CPI a émis son mandat d'arrêt, en mars, la Turquie avait estimé que cette décision risquait de porter atteinte aux efforts pour stabiliser la région soudanaise du Darfour. Plusieurs pays africains et arabes, ainsi que la Chine, ont également critiqué le mandat d'arrêt. L'an dernier, le gouvernement turc avait déjà été blâmé pour avoir accueilli deux fois le président El Béchir : à l'occasion d'une visite bilatérale en janvier, puis en août pour une réunion de dirigeants africains. Les fantômes de l'Occident à Ankara De son côté, le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, est arrivé hier en Turquie pour assister à Istanbul à la réunion de l'OCI. M. Ahmadinejad, dont le pays est la cible de critiques internationales pour son programme nucléaire controversé, doit participer ce matin à un sommet économique de l'OCI. Les Etats occidentaux estiment que les activités nucléaires iraniennes cachent un programme militaire, ce que nie Téhéran. La venue de M. Ahmadinejad fait suite à un déplacement, le mois dernier, du Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan à Téhéran. Les deux pays avaient alors conclu des partenariats sur le commerce et l'énergie. Le sommet d'aujourd'hui doit également accueillir le Premier ministre palestinien Salam Fayyad, les présidents syrien Bachar Al Assad et afghan Hamid Karzaï. C'est dire que Ankara déroulera aujourd'hui le tapis rouge à des dirigeants qui ne sont pas en odeur de sainteté en Occident. Le programme du sommet de l'OCI, qui réunit 57 Etats pour une journée de débats, est axé sur les questions commerciales et la lutte contre la pauvreté. Agences, H. M.