Toutes les maisons y avaient été détruites par l'armée coloniale française au cours d'une de ses opérations de destruction et de bombardement à l'aide de l'aviation, ne laissant aucun mur debout. Une quarantaine de maquisards sont tombés alors au champ d'honneur». C'est par ces mots qu'a répondu un vieux du village à notre question de savoir pourquoi il n'y a pas une seule maison traditionnelle dans ce village.Ath Ouabane relève de la commune d'Akbil, à 80 km au sud-est de Tizi Ouzou. «A l'instar des habitants de nombreux autres villages de Kabylie, nous sommes revenus sur nos terres à l'indépendance et nous avons reconstruit notre village juste après1962», reprend notre interlocuteur avec une grande fierté sur le visage. En cette journée de vendredi 14 juin, les ruelles étroites du village perché à plus de 1.000 mètres d'altitude, au pied du Djurdjura, sont bondées de monde. C'est la troisième édition du marché des femmes cultivatrices. Un marché inauguré en automne dernier, et est tenu plus d'une fois par saison. Cette manifestation, qui se veut culturelle, économique, et aussi touristique, attire de plus en plus de citoyens. Les visiteurs affluent non seulement des villages et hameaux environnants, mais aussi des quatre coins de la wilaya, avec comme objectif de faire leurs emplettes en produits du terroir (fruits et légumes) propres à chaque saison, et fraîchement cueillis par les femmes de la localité dans leurs potagers. Les senteurs naturelles des produits maraîchers agrémentent les allées du marché tenu à l'intérieur de l'école primaire de ce village. Derrière les étales de ce «souk» inédit, ce n'est pas des jeunes commerçants qui vous servent, comme c'est le cas partout dans les autres marchés, mais bien de vieilles femmes paysannes qui ont elles-mêmes semé et récolté le fruit de leurs produits, «des produits purement bio», nous disent-elles. Dans ce marché des femmes, on retrouve également des produits de l'artisanat, tels que des burnous tissé à la main, avec de la laine de brebis locales et proposé à la vente par ces tisserandes elles-mêmes, qui ont hérité de ces métiers de mère en mère. En achetant au marché d'Ath Ouavane cet habit traditionnel, de laine blanche, propre à la Kabylie, il n'y a aucun risque de tomber sur des «chinoiseries», nous a-t-on assuré. Ce marché tend également à prendre une dimension et une vocation touristique.L'association touristique «Amnir» locale a saisi cette occasion pour faire découvrir le village à une trentaine de visiteurs, en majorité des étudiants venus de Tizi Ouzou. En tout état de cause, l'expérience a été une grande réussite. «Notre objectif est de concilier entre les traditions et le tourisme, et la Kabylie ne manque pas d'atouts de ce genre pour promouvoir le tourisme solidaire. Notre association est en train d'œuvrer pour recenser tous les lieux touristiques que compte notre wilaya en vue de les promouvoir», nous a indiqué Mme Fernane Djamila, secrétaire générale d'Amnir (le guide).