La finance islamique demeure balbutiante en Algérie. Elle ne représente que 1% du marché global, dominé par les banques publiques, et 15% du marché bancaire privé, révèle Nacer Hideur, juriste financier et directeur central à Al Baraka Bank Algérie, un établissement bancaire à capitaux privés et publics. « La finance islamique en Algérie est encore embryonnaire par rapport au marché bancaire conventionnel », a-t-il affirmé, hier, lors de son intervention durant les travaux de la seconde édition du Forum algérien de la finance islamique, organisé à Alger, par la société française Isla Invest Consulting. D'après lui, la naissance de cette banque en 1991 n'était pas de tout repos. « Les débuts étaient difficiles, notamment avec un environnement constitutionnel contraignant. Il y avait de la méfiance et du scepticisme par rapport à cette expérience naissante », raconte-t-il. Outre l'offre d'une gamme de services spécifiques, Al Baraka Bank Algérie dispose de 25 agences à travers le territoire national. Malgré l'entrée en lice de l'autre banque Al Salam Algérie des Emirats arabes unis en 2008, le marché de la finance islamique est resté statique. M. Hideur s'est beaucoup plaint de certains écueils qui continuent d'empêcher, selon lui, l'essor de la finance islamique. Il citera, entre autres, la double imposition que les établissements subissent lors de transactions immobilières. M. Hideur plaide pour un réaménagement juridique et fiscal avantageux. « Le marché de la finance islamique est régi selon les dispositions du code de la monnaie et du crédit. Or, ceci ne répond pas à nos attentes », indique-t-il, en déplorant l'attitude « timide » de l'Association des banques et établissements financiers (Abef) dans la défense de la cause de la finance islamique en Algérie. Depuis quelque temps, la banque Al Baraka Algérie tente de se redéployer à travers le territoire national en offrant une nouvelle gamme de services. « On n'est pas présents sur le marché rural. Nous sommes assez prudents. Nous avons préféré les grandes zones urbaines. Mais, nous avons l'intention de nous attaquer à ce volet en finançant la population rurale qui n'est pas bancable, à travers un mode de financement qui est la moucharaka », souligne M. Hideur. Cette banque a déjà lancé, en partenariat avec un établissement suisse (Fides) dans le cadre de la micro-finance, un projet destiné à financer 45 petites entreprises de la région de Ghardaïa. « C'est une performance par rapport aux risques que pose ce mode de financement. Le taux de remboursement est de 98% », se félicite-t-il. Lachemi Siagh, président-directeur général du cabinet Strategica Finances, a estimé, quant à lui, que la finance islamique n'a pas été affectée par la crise financière mondiale, contrairement à la finance conventionnelle. Alors que cette dernière s'appuie sur l'intérêt, la spéculation, dira-t-il, les activités financières basées sur la loi islamique proscrivent l'usure et la spéculation. Les taux élevés de subprimes, la spéculation, les parachutes dorés, les produits dérivés sont à l'origine de la crise financière, note M. Siagh. Il ira jusqu'à dire que la finance islamique se propose comme un exemple de financement « dont il faudrait s'imprégner ». Née dans les années 1970, la finance islamique est forte aujourd'hui de 300 banques à travers le monde, établies dans 75 pays. Elle pèse quelque 700 milliards de dollars, soit 1% de la finance mondiale, d'après M. Siagh.