Nombre d'artisans, dans l'ancienne médina d'Ibn Mezghenna, voient leur métier péricliter et ce, en dépit de quelque effort consenti ces dernières années en leur faveur, notamment en matière d'IFU (Impôt forfaitaire unique). A dire vrai, ces métiers anciens, comme les dinandiers étameurs ou ceux qui exercent l'artisanat de maroquinerie, sont sur le point de mettre le valet sur le maillet de manière définitive. Une virée dans l'ancienne médina nous renseigne que les artisans, qui se comptent sur les doigts de la main, peinent à faire fonctionner leurs petits ateliers. La raison ? Le manque criant de matière première. Ni le département de l'artisanat ni la CAM (Chambre de l'artisanat et des métiers) ne daignent leur faciliter la fourniture les intrants à même de préserver leur exercice, disent-ils. Un métier qui leur permet d'une part, d'assurer une maigre pitance et d'autre part, de pérenniser des métiers traditionnels qui constituent, à bien des égards, une valeur ajoutée pour le tourisme. Car faut-il souligner, cette disette n'est pas sans déplaire au visiteur qui désire, lors d'une balade à travers le dédale de La Casbah, s'offrir quelques souvenirs. A la rue Dr Mohamed Seghir Benlarbey, l'artisan maroquinier, Mostefa Boulachab, ronge son frein depuis des lustres. «L'été est la saison où je suis censé travailler sans répit, mais faute de matière première, je me roule les pouces», lance-t-il d'un ton aigri. Et d'ajouter : «nous ne demandons rien à l'Etat sinon nous approvisionner en input pour perpétuer notre activité artisanale». Son échoppe est quasiment vide : à peine quelques objets accrochés au mur depuis des mois pour de potentiels chalands. Ni basane, ni vachette, matières premières incontournables pour fabriquer des sacs à main, des portefeuilles, des ceintures et autres objets pratiques pour la gent féminine, fait savoir, plein d'amertume, le maroquinier à notre endroit. Nos dinandiers, qui élisent leurs quartiers rue Katarougil, ne sont pas mieux lotis. Les artisans Boudjemaâ et Hachemi font contre mauvaise fortune bon cœur et résistent aux aléas du temps. Tapis dans leur cagibi au milieu d'un fatras d'objets, ils s'emploient à marteler et ciseler des objets décoratifs ou étamer des ustensiles destinés à la ménagère pour le mois de Ramadhan. Quant à la fabrication d'objets, ce n'est pas une sinécure, ils luttent bec et ongles pour s'alimenter en feuilles de cuivre dont le prix du mètre carré dépasse tout entendement, sinon partent en quête d'objets anciens à l'intérieur du pays pour leur redonner une seconde vie, se plaisent-ils à dire.