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Projet social de développement et mouvement de libération nationale : quels liens ?
Publié dans El Watan le 14 - 09 - 2013

Aujourd'hui, ce pays est devenu un acteur mondial incontournable. Nul besoin pour l'Inde d'acheter de la publicité dans les magazines occidentaux pour se faire connaître et vanter ses réalisations. Ce sont les Occidentaux qui défilent en Inde : tous les chefs de gouvernement des pays développés se sont déplacés en Inde, même deux fois : le président français, N. Sarkozy et l'Allemande, Mme Merkel…. En fait, le projet de développement de l'Inde n'est pas destiné à l'extérieur, il vise d'abord à résoudre les problèmes internes pour améliorer le bien-être des citoyens. Cette stratégie de développement a été définie dès l'indépendance. Celle-ci n'étant ni une fin ni une panacée, mais bien une étape et un moyen pour développer le pays. Dans cette contribution, je souhaiterais mettre en évidence les succès obtenus par l'Inde et tenter d'en comprendre les raisons : un des facteurs-clés, me semble-t-il, est la nature du mouvement de libération nationale ; c'est en effet la fondation même du projet de développement. Le contenu et la conduite du mouvement d'indépendance révèlent la nature du projet post-indépendance. Ainsi, dès la naissance du Congrès, en 1885, l'objet social de l'indépendance est affiché : il ne s'agissait pas de chasser les Britanniques par principe, mais bien pour la faillite de leurs actions et la brutalité de leur politique. Nous essayerons de montrer comment la stratégie de développement s'inscrivait dans le prolongement du mouvement de Libération nationale.
La stratégie de développement: Succès et défis
Les résultats de celle stratégie qui a constamment été ajustée sont aujourd'hui visibles. Sans entrer dans trop de détails, mentionnons les plus importantes réalisations.
Essor des services informatiques
Contrairement à la Chine qui a mis en valeur un puissant secteur exportateur manufacturier, l'Inde a opté pour un développement interne privilégiant d'abord l'agriculture et l'industrie, puis les services et surtout les nouvelles technologie de l'information.
La percée de l'Inde dans les services mondiaux est un phénomène récent : le poids des services exportés qui croît de plus de 25% pour une croissance mondiale de 8/9%, n'a démarré que vers 1998. Ce sont surtout les services informatiques et la sous-traitance aux entreprises qui ont rapporté plus de 30 milliards en 2005. Le rapatriement des experts a rapporté près de 10 milliards. Une force de frappe à travers les poids lourds de réputation mondiale que sont les entreprises comme TCS, Wipro, infosys, cognizant… soutenus par de puissantes associations comme Nasscom et appuyée sur le réseau des instituts et écoles d'ingénieurs et de technologie de réputation mondiale, comme les IIT, NIT, IIIT… et installées sur des parcs technologiques à Bangalore, Hyderabad, Chennai, Mumbai… Les entreprises du monde entier investissent ou sous-traitent en Inde non seulement les activités de logiciels, mais aussi les services de comptabilité, de communication à la clientèle (call centers). Aujourd'hui, c'est le KPO (Knowledge process outsourcina) qui a pris un essor prodigieux surtout en pharmacie, biotechnologie et dans les services juridiques et médicaux. De plus en plus d'avocats américains (litigation support) sous-traitent en Inde et à eux seuls rapportent plus de 10 milliards de dollars par an.
Les investissements dans ce secteur ont progressé de plus de 40% et représentent plus du quart des investissements. Plus de 200 entreprises des 500 du classement Fortune ont externalisé leur service informatique. Plus de 40% des projets informatiques à destination des PVD vont en Inde (19% en Chine et 11% à Singapour). Les exportations indiennes des services informatiques sont passées de 0,5 milliard en 1995 à 100 milliards en 2009 dont 50% pour les exportations de logiciels. D'autres services aux entreprises connaissent un développement important comme les IT enabled services dont une grande partie pour les MNC, comme American Express, BA.
Le développement prodigieux des technologies de l'information a certainement occulté les succès réalisés dans d'autres domaines importants.
L'Inde est en fait une puissance agricole
Quatrième puissance, 7e superficie mais deuxième surface cultivée après les USA et la deuxième population agricole après la Chine, l'Inde est le premier producteur de lait, thé et épices, deuxième pour les fruits, la canne à sucre et le troisième pour les céréales. Elle possède le plus grand cheptel.
Sur le plan industriel
Une politique équilibrée a permis de satisfaire les besoins essentiels et même d'exporter. L'encouragement des grands groupes familiaux (TATA, Birla…), le développement d'un secteur étatique puissant, dans la pétrochimie par exemple, l'Inde possède la plus grande raffinerie du monde dans le Gujarat et la libération du privé ont permis à l'Inde de devenir un acteur mondial, ouvert aux échanges dans de multiples domaines. Citons à titre d'exemple le secteur de l'automobile, l'acier, le textile et les télécom.
Développement des petites et moyennes entreprises
Cette orientation fait partie des préférences de Gandhi lui-même qui voulait ainsi que les entreprises contribuent d'abord au développement rural. La petite industrie réalise près de 40% de la production, dont un tiers pour l'exportation. Installées surtout dans les zones rurales, ces petites entreprises contribuent à la création de 65% des emplois.
Dans la pharmacie et les biotechnologies
L'Inde est le leader dans les produits génériques. Elle fabrique les produits anti-HIV les moins chers du monde et exporte 40% de sa production dans plus de 100 pays. Dans les biotechnologies, de grands groupes se sont formés, tels bio pharma ou Bio con et des laboratoires de réputation mondiale, comme Dr Redy Labs à Hyderabad.
Les facteurs explicatifs de ces résultats
Plusieurs facteurs, bien évidemment, expliquent ces résultats. Mais dans cette présentation, nous ne mentionnerons que quelques-uns.
Tout d'abord, rappelons un élément qui nous semble important : une connaissance moins stéréotypée de l'Inde montre que ces résultats ne sont pas vraiment surprenants. En effet, croire que l'Inde était un pays sous-développé au moment de la colonisation est erroné. avant les invasions musulmanes et l'occupation britannique, l'Inde avait une économie prospère et occupait une place importante dans les échanges mondiaux, c'est la raison pour laquelle elle avait attiré les marchands du monde entier sur la route des épices, puis de la soie : Arabes puis Occidentaux, avec l'arrivée des Portugais dès 1498, puis l'ensemble des compagnies européennes, hollandaise, East India, lancée à Londres en 1600, puis française, créée par Colbert en 1664. L'empire moghol s'inscrit dans cet apogée qui a permis l'enrichissement des princes moghols et la construction de prestigieux monuments comme le Taj Mahal, alors que la majorité des Indiens étaient écrasés par les impôts et maintenus dans un état de pauvreté extrême, comme l'attestent les famines qui se sont succédé jusqu'en 1943. L'Inde était bien prospère comme l'ont montré les économistes Maddisson et Boillot : en 1700, l'Inde était avec la Chine la première économie mondiale avec 23% du PIB mondial. Le pillage systématique des ressources et la politique économique tournée vers les exportations en direction des métropoles européennes ont appauvri l'Inde qui ne comptait plus, en 1947, que pour 4% du PIB mondial. Cette expérience a marqué la stratégie de développement post-indépendance axée essentiellement sur le marché intérieur et le self reliance. Il faut noter aussi que l'un des traités d'économie le plus prestigieux a été rédigé au IVe siècle AC : Arthasastra : science/traité de la richesse, bien avant Adam Smith. Ce traité, attribué au conseiller Kautilya du roi Chandragupta en 320 AC, révèle une maîtrise d'une économie prospère et des qualités d'une bonne gouvernance. Chaque autocrate se doit de le lire et s'en inspirer pour améliorer la gestion de l'Etat.
Une politique de formation et d'éducation de haut niveau
Dès l'indépendance, un programme ambitieux de formation est mis en place pour soutenir le projet de developpement : les instituts de technologie et d'ingénieurs voient le jour dès 1953 : IIT, IIM. Aujourd'hui, le programme vise à avoir 15 millions d'étudiants en 2015 et produire 1,5 million d'ingénieurs par an et 50 000 PHD par an. Aujourd'hui, plus de 5 millions de diplômés du supérieur sont produits par an avec un coût et une qualité des plus attractifs.
Un réseau de collèges et d'instituts d'ingénieurs de réputation mondiale a été mis en place : IIT, NIT, IIIT et un développement exponentiel du privé.
Enfin, une réalisation importante du mouvement d'indépendance est la Constitution qui consacre le régime démocratique de l'Inde. L'élaboration de la Constitution a été confiée à Ambedkar, un intouchable diplômé de Cambridge spécialisé en droit. Il présida durant trois ans l'Assemblée constituante. Certains principes-clés ont été affirmés :
– l'Inde est une démocratie vivante, qui fonctionne sans que l'armée ni la religion n'interviennent pour les raisons fallacieuses d'ordre, de morale ou autre principes creux ;
– L'Inde est un pays unitaire malgré ou grâce à la mosaïque : 28 Etats où toutes les religions de l'humanité cohabitent dans le respect, la tolérance, une multitude de partis politiques et une compétition sans concession, mais dans les limites et l'arbitrage de la Constitution. C'est ainsi que s'est mise en place une véritable diversité dans l'unité et une démocratie vivante et non désincarnée et figée. Cette diversité était une caractéristique du mouvement de Libération nationale : le courant gandhien n'a pas pris le dessus en excluant, voire en liquidant les autres courants et les opinions divergentes. Il n'a pas non plus exigé l'adhésion obligatoire au sein du Congrès. Aucune accusation de traîtrise, aucune menace ne s'est exercée sur les opposants au courant qui allait dominer le mouvement de libération : communistes, nationalistes, «collaborationnistes» avaient leur place dans le mouvement d'indépendance et après.
Le mouvement de Libération nationale : fondement du projet de développement
Le projet de développement et de société s'inscrit dans le prolongement du mouvement pour l'indépendance.
Des fondations ont été mises en place dès la création du parti du Congrès en 1885, créé pour permettre les débats non seulement sur la façon de conduire les relations avec le colonialisme britannique, mais surtout envisager l'après-indépendance : quel régime et quel projet de développement ?
Ce mouvement a évolué et pris des formes différentes, en fonction de l'attitude du colonialisme :
Deux phases essentielles peuvent être brièvement relevées :
– la première correspond à la domination, essentiellement britannique de la compagnie East India dont le monopole prit fin en 1858. Le rattachement direct des Indes à la couronne britannique après la répression des Marathes en 1818 et celle des cipayes en 1857 est alors décidé ;
– la deuxième phase correspond à la colonisation britannique directe sur l'ensemble du territoire, à l'exception de deux territoires Goa et Pondichéry laissés aux Portugais et Français qui allaient être invités à partir presque dix ans après l'indépendance. Sans violence… Cette période prit fin en 1947.
La colonisation britannique laissa une économie délabrée ne comptant plus que pour 4% du PIB mondial. Cette période s'est aussi caractérisée par plusieurs famines : 2 millions de morts en 1860, 4 millions de morts en 1865 dans le Sud et 5 millions de morts en 1896 et 4 millions de morts en 1943 dans le Bengale. La dernière grande famine avant l'indépendance.
C'est en 1885 que les nationalistes, tous les intellectuels diplômés des prestigieuses universités britanniques à Oxford, Cambridge, décidèrent de se réunir et trouver des solutions face à la domination britannique. Les objectifs du Congres étaient :
– promouvoir l'amitié et la coopération entre tous les nationalistes quelles que soient leurs idées et attitude vis-à-vis de la colonisation ;
– éradiquer le racisme de toute sorte et promouvoir l'unité (l'Inde était une collection de principautés plus ou moins puissantes et prospères que les Britanniques pouvaient manipuler facilement) ;
– élaborer une plateforme de revendications sociales et économiques pour améliorer le sort des populations ;
– former et éduquer l'opinion publique.
Les événements sociaux et économiques, les mesures répressives allaient radicaliser les positions du Congrès. Ainsi, la partition du Bengale en 1905 en Bengale ouest et Bengale est, qui deviendra Pakistan oriental puis Bengladesh et le transfert de la capitale de Calcutta à Dakha visait essentiellement à punir le Bengale pour les multiples agitations et attitudes hostiles aux Britanniques.
C'est au Bengale que l'opposition se radicalisa le plus : Auro bindo, Tagore et surtout Bose étaient les plus actifs opposants à l'occupation britannique, préconisant même des moyens violents pour en finir.
L'objectif de la partition était d'affaiblir le Congres : ainsi, en 1906 était créée la Ligue musulmane avec l'appui des Britanniques. La ligue soutint la partition.
Un mouvement anti-partition est déclenché (swadeshi). La réunification est réalisée en 1912 grâce à la mobilisation des populations. Calcutta était tout de même punie et perdit son statut de capitale au profit de Delhi.
Sans entrer dans le détail du processus, on peut brièvement noter les principales étapes :
– le mouvement de non-coopération est lancé en 1920 après les répressions de 1919 et la loi martiale ;
– le mouvement s'amplifie et devient un mouvement de désobéissance civile dès 1921. La «dandi march», la marche du sel, concrétise la désobéissance civile en 1930 ;
sous l'impulsion de Gandhi, les Indiens décidèrent d'aller extraire le sel malgré l'interdiction formelle ;
– des réformes accordant plus d'autonomie sont proclamées, mais tardives. «Quittez l'Inde est lancé par Gandhi en 1942 ;
Subha Chandra Bose Netaji crée l'année de libération de l'Inde. Il exprime son opposition à Gandhi et quitte le Congrès.
Le mouvement national était traversé par plusieurs courants. Les plus importants étaient portés par des personnalités puissantes et très populaires.
Le courant qui allait dominer le Congrès et le mouvement lui-même est porté par Gandhi, surnommé par Tagore Mahatma, «la grande âme» pour son comportement et attitude de compassion extrême incarnés par la non- violence, A Himsa, plébiscité par l'écrasante majorité de la population. Pour Gandhi, la violence non seulement menait à l'impasse face à une puissance militaire mondiale, mais elle est inefficace et coûteuse. Elle a déjà coûté des millions de vies. Enfin et surtout, elle ne correspond pas à nos valeurs d'humanité. A la violence du colonialisme et sa barbarie nous opposons la non-violence. Le conflit est surtout un conflit de valeurs.
L'aile dure du Congrès était représentée par Tilak et Annie Basant qui avait pris le dessus en 1915 et renforcée par les mesures répressives des britanniques. Cette aile dure se radicalisa en 1940 par la création de l'Armée de libération par Bose.
L'aile légaliste représentée par M. Nehru (le père de J. Nehru) et Gokhale. D'autres courants plus intellectuels étaient préconisés par Aurobindo, Tagore, Rammohan Roy qui cherchaient à réaliser la renaissance hindoue. Enfin, les courants communistes se sont renforcés, mais diversifiés aussi.
Ce mouvement était traversé par de multiples courants mais avait fonctionné dans le respect.
Cette non-violence caractérise l'élaboration même de la Constitution qui est une des rares constitutions qui n'ait pas été le produit de la violence, d'un soulèvement ou d'une dictature comme dans la plupart des cas hélas, malgré le contexte de quasi guerre civile imposée par la Ligue musulmane et Ali Jinnah, qui ont imposé la partition et dont on connaît les conséquences pour les peuple, surtout au Pakistan.
La Constitution indienne est le résultat d'un processus historique et non d'un bouleversement ou d'une rupture malgré les périodes de violence et de répression face à l'occupation britannique.
Ainsi, le mouvement social de libération n'a été ni un processus linéaire ni uniforme : les divergences importantes l'ont jalonné, mais l'esprit démocratique et l'intérêt national ont prévalu : aucune exclusion de point de vue divergent n'a eu lieu, aucune violence n'a été exercée contre un «déviant» ou opposant.
C'était un processus complexe et contradictoire : il réunissait les courants extrêmement différents avec des personnalités très fortes : Bal. G Tilak préconisait une attitude agressive et la résistance violente contre les Britanniques, Motilal Nehru était plutôt favorable à la négociation, Mada, M. Malviya pour une relation pédagogique avec les Britanniques, R. Lakshmibai, Chandra N. Bose était le plus radical et allait jusqu'à envisager une alliance avec les nazis pour battre les Anglais. Comment Gandhi avait-il réussi à imposer sa démarche en évitant d'exclure, voire d'éliminer tout point de vue qui lui était opposé ? Préconisant la non-violence, Gandhi était pour un processus évolutif : la rupture ne doit pas porter sur la forme et la structure de gouvernance seulement, mais surtout sur les valeurs. Sa politique basée sur l'«ahimsa» (la non-violence) et la sortie pacifique de la colonisation britannique ne recueillait pas l'unanimité au sein du Congrès mais était plus proche des populations, elles s'y identifiaient non pour les tactiques ou les et moyens, mais pour les valeurs qu'elle mobilisait.
Ainsi, Subhas Chandra Bose lui-même, le plus farouchement opposé à la fois à Gandhi et au gandhisme, jusqu'au bout, reconnaissait la puissance de la démarche de Gandhi : «Quand le Mahatma s'exprimait, il le faisait dans un langage tel que le peuple comprenait aisément. Il ne s'inspirait pas de grands philosophes respectables, rationnels comme le font plusieurs responsables du Congrès formés tous dans les universités britanniques, le mahatma puisait dans la Bhagavat Gita et Ramayana. Le peuple n'avait aucune difficulté à comprendre… Lorsqu'il parlait de Swaraj, de l'indépendance, il ne s'étendait pas sur les vertus de l'autonomie des provinces, de la fédération, de l'union et les liens entre la centralisation et décentralisation, des avantages du socialisme, il leur rappelait les gloires de Ramrajya, le royaume mythique de Rama et ils comprirent.» Il parlait de la conquête à partir de l'amour et la non-violence comme le préconisèrent Bouddha et Mahâvîra. Ils acceptèrent. Ces valeurs que l'on peut symboliser par la «satyâgraha et ahimsa» étaient le fondement du processus d'indépendance mais aussi du projet social qui doit être construit après l'indépendance. Ces valeurs ancrées dans l'identité de l'Inde étaient l'instrument de ralliement le plus sûr. Gandhi y puisait non pour des raisons tactiques, mais parce qu'elles étaient ses propres valeurs qu'il exprimait dans ses gestes, mais aussi dans son comportement et son mode de vie quotidien.
Aujourd'hui, S. C. Bose a son musée où on peut le voir s'opposer à Gandhi et s'afficher avec Mussolini et Hitler. Il n'a pas été exclu de la mémoire collective ! De même, le père de la Constitution, Ambedkar, hindou, avait osé se convertir publiquement au bouddhisme pour protester contre certains courants dominants du Congrès : il n' a été ni exclu ni lynché. Sa statue est érigée partout en Inde.
La démocratie, la liberté, la tolérance et l'acceptation de l'autre sont inscrites et ancrées dans la civilisation indienne et l'hindouisme : Bouddha est né en Inde et y a développé le bouddhisme. L'hindouisme a intégré plusieurs éléments du bouddhisme sans altérer ses propres valeurs. Asoka lui-même est devenu bouddhiste, a probablement contribué au développement du bouddhisme, mais sans réussir, malgré son pouvoir et sa popularité à faire basculer les Indiens dans le bouddhisme. Aujourd'hui, bien que le bouddhisme ne représente que 2% de la population, il reste une philosophie respectée, pratiquée librement et ses vestiges, ses enseignements et temples protégés.
Quelques remarques en guise de conclusion
Aujourd'hui, dans l'Inde hindoue à plus de 80%, un président de la République peut être musulman (Abdul Kalam considéré comme le préféré des Indiens), un Premier ministre sikh, Manohan Singh, une présidente femme, une présidence du parti au pouvoir dirigée par une femme d'origine étrangère. Le mouvement d'indépendance a été un mouvement d'inclusion et non d'exclusion
des différences. Cette inclusion est aujourd'hui la caractéristique-clé du projet de developpement. Par ailleurs, le développement de l'Inde et sa modernisation ne se font pas au détriment des traditions que les Occidentaux considèrent comme des archaïsmes et de la superstition, donc incompatibles avec le «moderne». Le traditionnel n'est pas exclu mais fait partie du processus de développement, le rationnel et l'irrationnel sont deux dimensions d'un même processus, complexe et non linéaire.
Quelles perspectives : Les défis pour la démocratie et la culture Indiennes
L'indépendance : ni fin en soi ni panacée
L'expérience indienne montre le lien entre le mouvement d'indépendance, lui-même ancré dans les valeurs ancestrales et le projet social de développement.
Celui-ci, certes, est confronté à des défis majeurs, mais il est bâti sur des valeurs fortes qui font de la démocratie indienne un système perfectible mais dont la remise en cause sera extrêmement difficile. Le développement économique à parfaire se situe dans le prolongement du mouvement d'indépendance : les deux sont fondés sur les valeurs incarnées par Gandhi et affichées dans son comportement et son attitude. Ces valeurs sont plus que jamais d'actualité dans un contexte mondial caractérisé par la violence et ses effets néfastes sur les populations : violence de la guerre et violence fondée sur les religions convergent : elles se fondent sur l'exclusion, l'intolérance et l'attitude de domination… Malgré sa faillite, ce système continue à dominer. Tant qu'on ne lui a pas substitué d'autres valeurs, celles de la non-violence, la tolérance et l'inclusion, il continuera à déverser haine, douleurs et horreurs. Seul un mouvement fondé sur la non-violence et la tolérance est susceptible de répondre aux attentes des citoyens qui, dans le monde entier, sont à la recherche du sens et de la paix.


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