Le peuple égyptien est un peuple magnifique. On le connaît surtout pour sa douceur, son absence d'agressivité, son humour ravageur. Tous les Algériens qui ont fait le voyage du Caire n'ont jamais eu à se plaindre. Au contraire, ils ont loué l'accueil chaleureux, la fraternité, la générosité du citoyen du Nil. L'Egyptien ne sait pas ce que sont la haine et la rancune. Il le prouve aujourd'hui encore en accueillant les touristes israéliens sans animosité alors que depuis sa création, Israël n'a cessé d'humilier l'Egypte. C'est dire la grandeur de ce peuple. Mais alors pourquoi brusquement ce comportement extrêmement violent, parfois meurtrier, à l'égard des Algériens et tout ça pour un match de football, comportement au demeurant qui sera vite laissé aux vestiaires dès que les passions se seront apaisées. Il faut chercher du côté du pouvoir de Hosni Moubarak pour trouver la réponse à cette déferlante anti-algérienne. Le régime du Caire, comme tous les régimes antidémocratiques, a transformé le football en véritable opium du peuple et une arme utilisée à outrance dans l'espoir de détourner l'attention du citoyen égyptien de ses véritables problèmes pour orienter son mécontentement vers un hypothétique ennemi extérieur, qui n'est pas Israël s'entend. Surtout que le Raïs égyptien se trouve dans une situation délicate depuis qu'il s'est mis à manœuvrer dans la perspective de laisser son fils lui succéder à la présidence, une idée, si elle venait à se concrétiser, qui renverrait l'Egypte à l'époque du roi Farouk et lui fermerait définitivement l'accès à la modernité, à la démocratie et au développement. Une idée qui, malheureusement, fait son chemin dans de nombreux pays arabes. Pour les autocrates égyptiens, tout ce qui peut détourner l'attention de cet objectif anti-civilisationnel est le bienvenu. La qualification pour la Coupe du monde tombe à pic, surtout qu'un concurrent inattendu, susceptible de barrer la route vers l'Afrique du Sud s'est imposé sur la scène. A partir de ce moment-là, haro sur l'Algérie, cette Algérie ingrate qui a été libérée du colonialisme français par l'Egypte. Depuis deux mois, une campagne d'une rare hostilité et d'une rare violence a été déclenchée contre notre pays par les médias égyptiens. Un animateur d'une chaîne de télévision a même souhaité « une catastrophe à l'Algérie ». Le matraquage a donné ses fruits, ou plutôt un incroyable déclenchement des passions. Ce pouvoir a atteint son objectif. Il s'est aussi du coup vengé de cette outrecuidance des Algériens qui ont osé commettre un crime de lèse-majesté, lorsqu'ils ont dénoncé la mainmise absolue de l'Egypte sur la Ligue arabe et demandé la rotation pour son secrétariat général, monopole des Egyptiens depuis sa création en 1946. Les Algériens payent ainsi pour avoir osé vouloir remettre en cause le leadership autoproclamé de « Masr Oum Eddounia ». Le régime du Caire vient de prouver, encore une fois, qu'il n'a pas d'état d'âme, qu'il veut défendre ses intérêts. N'aide-t-il pas Israël dans le blocus de Ghaza pour affamer les Palestiniens ?