Programmé hier en audience tenue à huis clos, le procès du présumé auteur de l'assassinat du professeur Ahmed Kerroumi a été renvoyé sine die à la prochaine session par le juge Souier, président du tribunal criminel près la cour d'Oran. Contacté, l'avocat de l'accusé principal, maître Abdelaziz Medjdouba, n'a pas caché son «désarroi» et son «regret» de voir qu'«un tel procès se déroule loin du public. La procédure veut que le huis clos soit annoncé le jour du procès et non pas décidé bien avant sans que les parties ne soient mises au courant». Selon lui, le magistrat «a dès son entrée à l'audience commencé par former la composante du tribunal en passant au tirage au sort des membres du jury. Cela a pris quelques minutes avant qu'il fasse l'appel des témoins. Sur les 93 cités dans le dossier, plus d'une soixantaine n'ont pas répondu. Il en était de même pour la partie civile. La veuve du défunt n'était pas présente dans la salle. Mieux, une grande partie des expertises établies par la police scientifique n'étaient pas disponibles. Dans ces conditions, maître Fahim Habib a informé le tribunal de l'importance du témoignage des parties citées dans le dossier, mais aussi des expertises en faveur de l'accusé. Le juge ne voulait pas prendre en compte sa demande. Selon lui, il peut se contenter des procès-verbaux d'audition auprès de la police et du juge qu'il avait entre les mains. En réaction à cette réponse, Me Habib lui a répondu : ‘Dans ces conditions, je ne peux assumer mon rôle de défenseur. Je préfère me retirer du dossier.' Il a quitté l'audience. J'ai réitéré les demandes de mon confrère à propos de la nécessité de la convocation de l'ensemble des témoins, mais le juge a été intraitable. Il était pressé d'entamer le procès. J'ai annoncé mon retrait de l'affaire et le président s'est adressé à Mohamed Belbouri, l'accusé principal : ‘Vos deux avocats se sont retirés, en voulez-vous d'autres?' Mais l'accusé a répondu : ‘Je ne veux pas être jugé sans mes avocats.' Il a alors demandé le report du procès, obligeant le président du tribunal à ajourner le jugement de l'affaire à la prochaine session criminelle». Pour Me Medjdouba, «il est hors de question» de juger une telle affaire dans les conditions d'hier. «Il s'agit d'un assassinat qui a bouleversé l'opinion publique, la vérité et toute la vérité doit être connue. Notre décision de nous retirer de l'audience est l'ultime recours à même de nous permettre d'obliger le tribunal à créer les conditions idoines pour un procès équitable et juste», dit-il. Ce procès équitable est aussi la revendication de la famille de l'accusé, dont le père a dénoncé de nombreux vices de forme dans la procédure policière et judiciaire, mais aussi du parti, le Mouvement démocratique et social (MDS), pour lequel militait la victime ainsi que la Ligue algérienne de défense des droits de l'homme (LADDH).