Il est des moments dans la vie d'une personne et d'une Nation que le temps ne peut effacer. La journée d'hier est à marquer d'une pierre blanche dans l'histoire de l'Algérie indépendante. Les jeunes Algériens, qu'on accusait faussement de manquer de nationalisme, ont prouvé hier combien sont chères à leur cœur les couleurs nationales. Alger, hier n'était plus blanche, elle s'est fardée de vert, de blanc et de rouge pour saluer bien bas la performance de ses pacifiques gladiateurs partis en combat dans l'arène de la sportivité. Alger qui a ouvert grands ses bras à nos valeureux joueurs s'est faite le porte-voix de tous les Algériens des 48 wilayas pour souhaiter la bienvenue aux défenseurs des couleurs nationales. Hier, il nous a été aisé d'imaginer la liesse populaire au lendemain de l'indépendance. Le contexte est certes différent, mais la joie peut être comparable, car l'Algérie a livré un combat contre l'intolérance, la haine, l'ignominie. Comment accueillir un tel triomphe, comment récompenser une telle générosité, si ce n'est en tapissant les rues de la capitale d'un amour infini à l'égard d'une équipe victorieuse, belle et prometteuse. Dès le début de la matinée, les Algérois affluaient en nombre vers l'aéroport d'Alger dans l'espoir de voir de près ces façonneurs de miracles et faiseurs de bonheur. Continuant sur les tonalités festives de la veille, des milliers de supporters et à coups de « One, two, tree, viva l'Algérie ! », accourent vers l'aérogare d'Alger, abandonnant leurs voitures. Les plus patients gardent tout de même leurs véhicules en espérant que l'heure d'arrivée des héros est proche. Même les bus se sont mis de la partie, en imitant les autocars londoniens à deux étages sans toutefois prévoir de barrières de sécurité pour les usagers prenant le risque de voyager sur leur toit. Certains supporters, en panne de drapeaux, n'ont pas hésité à grimper sur les poteaux pour arracher les étendards longeant la route moutonnière. La forte affluence des curieux et amoureux de l'équipe nationale a imposé l'annulation de tous les vols en partance d'Alger. Le peuple voulait montrer sa joie à ses héros, il exigea sa présence en dépit de toutes les barrières de sécurité. Même le temps n'a pas eu raison de sa témérité. Annoncée pour midi, puis pour 14h, l'équipe nationale de football n'arriva sur le sol algérien qu'à 16h50. La vision de cette « dream team », cette équipe de rêve, valait toute l'attente du monde. Les nombreux journalistes présents sur la piste d'atterrissage oublièrent vite les couacs de l'organisation par les services de la présidence dont ils ont été victimes. Une barrière de sécurité sépare la presse et les personnalités artistiques et sportives, du tapis rouge mis à l'entrée du salon d'honneur pour accueillir les pieds bénis des joueurs algériens. Tout le monde retient son souffle jusqu'à l'ouverture du sésame du Boeing de la compagnie Air Algérie. Le président de la Fédération algérienne de football, Mohamed Raouraoua, est le premier à descendre et à fouler le tapis magique qui mène au cœur de l'Algérie joyeuse. A son accueil, le ministre d'Etat représentant du président de la République, Abdelaziz Belkhadem. Raouraoua est suivi par le coach Rabah Saâdane qui se refusa à toute déclaration, comme le reste de l'équipe d'ailleurs. Les poulains de Saâdane descendent l'un après l'autre, affichant de larges sourires et une mine de victorieux. Le staff se dirige promptement vers le bus aménagé spécialement pour leur permettre de saluer le public nombreux venu leur exprimer sa gratitude. Les youyous suivent leurs pas de professionnels. Ghezzal, Chaouchi, Gaouaoui, Antar Yahia, Ziani, Halliche, Meghni, Saïfi, Belhadj, Djebbour, Matmour et toute l'équipe ont marqué définitivement de leur empreinte l'histoire du football en Algérie. Ce sont les dignes héritiers des Madjer, Belloumi, Assad, Kouissi, Guendouz, Cerbah et de tous les grands noms des perles algériennes du ballon rond. Ils ont amplement mérité cet accueil digne des grands héros pour avoir réinscrit avec des lettres d'or le nom de l'Algérie dans le registre de la plus grande compétition footballistique qu'est la Coupe du monde après 24 ans d'absence. Lançant des « Vive l'Algérie » à partir de leur bus faisant office de trône de victorieux, nos héros sont à leur tour joyeux et semblent excités à l'idée d'aller à la rencontre de leurs fans. Après quelques séances photos, l'aventure heureuse commence à l'ouverture du portail menant aux bras de la capitale. Impressionnant, magnifique et prodigieux a été le nombre de supporters qui sont venus à leur accueil. La chaleur et la joie qui se dégageaient de ce formidable public n'ont pas d'égales. Autant l'équipe était belle par sa composante, son jeu, sa hargne pour gagner, autant ce peuple était beau par son nombre, son union, et son sens inégalable de la fête. « One, two, tree, viva l'Algérie ! » chantaient-ils, comme un grand remerciement à ces nouvelles idoles qui vont habiter leurs cœurs autant que l'Algérie vivra. Hommes, femmes, enfants, gendarmes, policiers, agents de la protection civile, les Algériens étaient unis pour dire merci. Comme ils ont accompagné ces idoles augurant d'une nouvelle ère tout au long de leur parcours, les Algériens ont aussi décidé de les accompagner sur leur chemin du retour sur le territoire national. A croire que tout Alger s'est donné le mot pour sortir. Devinant le parcours de la dream team, de leur sortie de l'aéroport d'Alger, jusqu'à leur arrivée au Palais du peuple – à 20 heures – où les attendait le chef de l'Etat, en passant par l'avenue de l'ALN (ex-route moutonnière), les rues étaient noires de monde. Qu'il s'agisse de l'autoroute, des ponts, des arbres, des balcons, des terrasses, sur le toit des voitures, chaque espace a été investi par les Algérois pour marquer ce grand jour. A coups de feux d'artifice et entonnant des « Vive l'Algérie », « Allah Akbar le pharaon est mort », « yaatikoum essaha ou merci », les Algériens étaient tout simplement beaux, fiers et heureux. Tout au long de leur parcours, malgré l'absence d'un cordon sécuritaire efficace et la mauvaise organisation du défilé, les Algériens ont démontré leur grandeur d'âme et leur sens élevé de la mesure. Malgré tout ce qui a été dit sur une certaine jeunesse difficile dans certains quartiers, l'accueil réservé aux héros de la Nation a été à la hauteur et a prouvé que la joie transcende tous les préjugés. Bravo à l'équipe nationale, et bravo au public algérien. Des visas gratuits pour l'Afrique du Sud L'ambassade d'Afrique du Sud à Alger a annoncé hier la gratuité du visa d'entrée en territoire sud-africain pour les détenteurs de tickets d'entrée aux stades durant la Coupe du monde. « L'Afrique du Sud a décidé de donner des visas gratuits durant la Coupe du Monde pour les visiteurs qui justifieront de billets d'entrée aux stades. Ces derniers devront aussi justifier d'un certificat de bonne santé, d'un billet d'avion de retour et d'un passeport », a souligné hier le conseiller politique de l'ambassade d'Afrique du Sud à Alger, M. Kaya Somgqeza. Organisant un point de presse à l'aéroport d'Alger avant l'arrivée de l'équipe nationale algérienne, le même responsable a tenu à féliciter l'Algérie pour sa victoire qui prouve que « le géant africain du football s'est réveillé », dira-t-il.