Le centre anticancer de Batna pourra prodiguer les soins en radiothérapie d'ici le début du mois d'avril. C'est la énième date buttoir à laquelle s'engage le chef de projet et directeur du CAC, Aïssa Madhoui. Serait-ce la bonne ? En effet, depuis l'achèvement des gros travaux du centre, il y a plus de deux années, le responsable du projet a maintes fois promis son ouverture imminente. Lors de la visite de Djamel Oueld Abbas, alors ministre de la Santé, ensuite celle de Abdelaziz Ziari, lorsqu'il occupait le même poste et enfin la visite du Premier ministre Abdelmalek Sellal, il y a près de huit mois. Cette fois-ci semble être la bonne en raison de plusieurs faits observés sur le terrain. Lors d'un entretien accordé à El Watan, Aïssa Madhoui a qualifié l'attitude des responsables de tutelle et du wali de Batna comme un «véritable forcing».«Parmi tous les centre anticancer en voie de réalisation ou en extension, celui de Batna a été choisi pour ouvrir le premier ses portes», a-t-il dit. L'intérêt soudain des autorités est significatif et pose de réelles questions. Pourquoi ce «forcing» n'a pas été appliqué auparavant ? Pourquoi attendre le mois d'avril, coïncidant avec l'échéance présidentielle, pour aménager le service de radiothérapie ? Le directeur du CAC s'est étalé sur des explications détaillées autour de la procédure d'installation du matériel nécessaire à la radiothérapie, entre autres les trois accélérateurs de particules du constructeur américain Varian. Après la fourniture de ces derniers, considérée comme un accomplissement, l'équipe d'experts américains, qui travaille à leur installation, sera renforcée par huit techniciens de plus et ce, suite à la demande du directeur du CAC. A son lancement, le service de radiothérapie pourra drainer pas moins de 30 patients par jour, comme un minimum. Ce chiffre ira en augmentant avec la mise en fonction de tous les accélérateurs. Toujours selon notre interlocuteur, le matériel dont disposera bientôt le CAC est à la pointe de la technologie, Il sera mis à la disposition de tous les patients, même ceux qui ne souffrent pas de cancer. Cependant, la réalité du terrain dévoile les insuffisances qui pourrissent la vie quotidienne des patients atteints de cancer. La présidente de l'association Amel, lors d'une intervention à la radio locale à l'occasion de la journée mondiale de lutte contre le cancer, a dénoncé la souffrance chronique des malades, causée, pour une grande part, par la négligence des responsables du secteur. D'abord, les malades doivent faire tous leurs examens à l'extérieur du CAC (l'imagerie, les explorations biologique, les radios, etc.), dépenses supplémentaires qui ne sont souvent pas à la portée de la bourse de la plupart des patients. Or, le centre anticancer de Batna possède plusieurs services dédiés à cet effet, mais qui ne sont toujours pas ouverts. En outre, les malades qui subissent la chimiothérapie sont livrés à eux-mêmes puisqu'il n'existe que le service d'hôpital du jour en oncologie. Ceux qui viennent d'autres wilayas sont priés de quitter le service dès la fin de leur traitement, parfois dans un état lamentable : vomissements, vertiges, lésions cérébrales, etc. Le petit hôtel intra-muros reste lui en état de carcasse. Le plus étonnant est que cette approche de la promotion de l'hôpital de jour est celle du directeur de l'établissement. «C'est mon cheval de bataille. C'est le chemin à suivre pour tous les services. On hospitalisera dans les cas où c'est vraiment nécessaire», dit Aïssa Madhoui. Toute l'attention des dirigeants du projet étant focalisée sur l'ouverture pressante du service de radiothérapie, les autres services n'ont pas eu encore la chance d'être aménagés et approvisionnés en matériel médical. Le centre anticancer sera fonctionnel, quant à lui, d'ici le mois de juin, conclut notre interlocuteur. Un autre phénomène complique considérablement la procédure normale de traitement des malades. Selon le directeur du CAC, la prescription de médicaments non inclus dans la nomenclature des médicaments fournis au CAC est un réel handicap. «Les patients, issus de couches sociales différentes, exigent souvent d'être soignés exclusivement par le médicament prescrit, bien que nous leur fournissons la même molécule sous son nom scientifique», a-t-il dénoncé. Et d'ajouter «la liste de médicaments est révisée chaque année par une commission dont font partie d'imminents professeurs exerçant dans différentes régions du pays. Elle contient donc tous les types de médicaments nécessaires à un traitement efficace.» On se demande si l'ouverture du centre anticancer ne servirait pas d'autres intérêts que ceux des patients. N'est-on pas là en train d'instrumentaliser la santé pour servir d'autres desseins ?