Les dirigeants de l'aile radicale de l'opposition de droite, à savoir la députée indépendante Maria Machado et le parti Volonté populaire, dont le chef est en prison et le n°2 recherché par la police, ont organisé hier des marches dans tout le Venezuela pour protester «contre la répression, la torture et les persécutions». Nicolas Maduro, héritier politique du défunt président, Hugo Chavez, leader de la gauche anti-impérialiste sud-américaine, qualifie de tentative de «coup d'Etat» le mouvement lancé le 4 février par des étudiants et auquel s'est jointe l'opposition politique qui appelle à descendre dans la rue pour faire tomber le gouvernement issu des élections d'avril 2013. Vendredi à Caracas, dans le quartier d'Altamira, un bastion de l'opposition, les forces antiémeutes ont assailli avec des canons à eau et des gaz lacrymogènes des manifestants, dont une partie masquée a répliqué en lançant des cocktails Molotov. Selon la télévision d'Etat VTV, «l'opération spéciale de la Garde nationale (GNB) à Altamira a permis d'arrêter 41 manifestants, dont huit étrangers soupçonnés de terrorisme international». Parmi les personnes arrêtées, vendredi, figure la photojournaliste italienne Francesca Commissari, collaboratrice du quotidien vénézuélien El Nacional. Le Syndicat national des travailleurs de la presse (SNTP) a aussi annoncé qu'un correspondant du quotidien américain Miami Herald et une équipe de l'agence de presse américaine Associated Press (AP) avaient été interpellés puis remis en liberté dans la soirée. Peu après, les correspondants étrangers à Caracas ont reçu par internet un document du ministère vénézuélien de l'Information et de la Communication, intitulé «Le Venezuela sous attaque médiatique» et dans lequel figurent des photos et des articles qualifiés par le gouvernement de «mensonges liés au coup d'Etat soft». Coup d'État soft ? Les principales revendications portent sur l'insécurité, l'inflation et la pénurie de biens de consommation de base. Cette situation est injustifiable, d'autant plus que le Venezuela est un important producteur de pétrole. Les opposants et des organisations non gouvernementales protestent aussi contre un usage excessif de la force lors des dispersions de rassemblements par la police. «Nous avons enregistré et vérifié 33 cas de traitements inhumains et de tortures» qui ont été transmis à la justice, a déclaré, vendredi, Alfredo Romero, président du Forum pénal vénézuélien, une ONG de défense des droits de l'homme. «Le ministère public ne permettra sous aucun prétexte que soient violés les droits de l'homme», a promis de son côté la procureure générale du Venezuela, Luisa Ortega Diaz. Elle a annoncé que 27 enquêtes avaient été ouvertes en raison de soupçons d'exaction des forces de l'ordre. Le président Maduro, qui assistait vendredi à la deuxième journée d'un dialogue national qu'il a convoqué pour tenter de résoudre la crise, a de nouveau appelé les étudiants à la concertation. «Il a été décidé de tout faire pour parler avec l'ensemble du mouvement étudiant vénézuélien», a déclaré M. Maduro devant des représentants des religions, des entrepreneurs, des intellectuels et des responsables politiques locaux, mais en l'absence de l'opposition, qui boycotte ces réunions. Après presque un mois de manifestations antigouvernementales, le bilan est lourd. Selon la procureure générale Luisa Ortega Diaz, les heurts ont fait 17 morts et 261 blessés, un bilan porté à 18 morts avec l'annonce, par le président Maduro, de la mort d'un militaire. Un millier de personnes ont été arrêtées.