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Conséquences de la généralisation du crédit documentaire : Des usines ferment, des produits se raréfient
Publié dans El Watan le 15 - 12 - 2009

Imposé aux entreprises comme unique mode de financement de leurs importations, le crédit documentaire est sur le point de paralyser les unités de production algériennes et d'installer progressivement la pénurie. Faute de matières premières et de pièces détachées, de nombreuses usines ont déjà commencé à ralentir leur cadence de production, lorsqu'elles ne sont pas carrément à l'arrêt, de même qu'il est loisible de constater la disparition d'un large éventail de produits de consommation au niveau des commerces de détail. Les chefs d'entreprise et les commerçants interrogés sur la question imputent la situation à la loi de finances complémentaire pour l'année 2009 qui a subitement fait obligation aux banques de n'accepter comme mode de paiement des importations susceptibles d'être engagées par leurs clients (entreprises de production ou simples importateurs de produits destinés à la revente en l'état) que le crédit documentaire.
C'est un mode de paiement de plus en plus abandonné de par le monde en raison de sa rigidité, son excès de prudence au seul avantage des fournisseurs et l'exigence d'une disponibilité de trésorerie que très peu d'entreprises peuvent se permettre. S'il est tout à fait vrai que le crédit documentaire offre l'avantage de la traçabilité dans les mouvements de capitaux exportés dans la mesure où les transactions commerciales ne peuvent s'effectuer que sur présentation des documents requis, il n'en demeure pas moins que son imposition sans préparation aucune, aussi bien pour les banques que pour les entreprises, n'a pour l'instant produit que des nuisances déjà largement perceptibles à travers les pénuries et les arrêts de production qui affectent certaines usines.
Les chefs d'entreprise et importateurs imputent ce malaise à l'excès de précipitation à mettre en œuvre ce mode de paiement subitement imposé à tous les opérateurs économiques algériens, sans exception, sans avoir donné aux banques le temps d'aménager leurs locaux en conséquence et de former leur personnel aux procédures complexes du crédit documentaire. En a résulté un encombrement des guichets de commerce extérieur des banques, qui ne sont plus en mesure de répondre dans les délais impartis aux sollicitations des entreprises, qui voient ainsi se rompre les cadences d'approvisionnement qu'ils étaient parvenus à assurer grâce aux relations de confiance patiemment tissées avec leurs fournisseurs. Imposé par la loi de finances complémentaire dans le souci de réduire la facture d'importation qui avait explosé en 2008 et de réduire les financements informels générant des fuites de capitaux, le crédit documentaire est perçu par les banques non pas comme un moyen de paiement parmi tant d'autres, mais comme un moyen de contrôle d'opérateurs qu'il faut surveiller de près.
D'où ce vent de méfiance, tournant parfois même à la paranoïa, de certains préposés aux banques qui refusent de prendre le moindre risque en faveur de leurs clients, quand bien même la vie des entreprises en dépendrait. Pour un simple document ou une somme dérisoire qui viendrait momentanément à manquer, des banquiers se sont ainsi subitement mis à refuser le montage de crédits documentaires au profit de fidèles clients avec lesquels s'était pourtant instaurée une certaine confiance. De nombreuses entreprises, parmi lesquelles des unités de production employant des milliers de travailleurs, sont de ce fait en rupture d'approvisionnement et beaucoup d'autres sont sur le point de les suivre, avec tout ce que cela va entraîner en matière de mise au chômage et de pénuries.
Des informations en provenance des zones industrielles de Rouiba et Oued Smar – mais cela ne doit certainement pas épargner certaines autres régions du pays – font état de nombreuses usines, notamment privées, à l'arrêt ou en voie de l'être faute de matières premières qu'elles peinent à importer depuis l'entrée en vigueur de cette obligation. Toutes les autorités politiques concernées sont informées du problème mais feignent de l'ignorer pour ne pas s'exposer aux foudres de ceux qui ont pris la responsabilité d'imposer, sans en mesurer les conséquences, le crédoc comme unique mode de financement des importations.


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