Photo :S. Zoheir Par Smaïl Boughazi Institué par la loi de finances complémentaire 2009 pour freiner un tant soit peu les importations anarchiques, l'élargissement du crédit documentaire (crédoc) à toutes les opérations d'importation a été perçu comme une source d'entraves à d'innombrables entreprises productrices algériennes. Ces dernières, de l'avis même de certains représentants du gouvernement, étaient dans l'incapacité d'utiliser cet instrument de paiement de leurs importations, ce qui a causé, dans certains cas, des arrêts de production de certaines unités. Cet état de fait, il faut le dire, a poussé les pouvoirs publics à revoir la copie en décidant d'assouplir son application pour une partie des entreprises lors de la dernière tripartite. Récemment, le délégué général de l'Association des banques et établissements financiers (ABEF), Abderahmane Benkhalfa, avait déclaré que l'usage du crédoc sera soumis à une «organisation appropriée» afin de permettre aux entreprises nationales productrices de valeur ajoutée de s'y habituer. Il a estimé que les pouvoirs publics ont «mis en place un corridor spécifique destiné à simplifier l'usage du crédoc par les entreprises nationales productrices de richesses. Celles qui font de la revente en l'état ne sont pas concernées. Ce corridor n'est pas un cadre juridique. C'est plutôt une organisation appropriée de travail», a-t-il expliqué par ailleurs. Selon la même source, «ce corridor devra aider les entreprises déjà fragilisées» à s'approvisionner en matières premières de manière moins contraignante. Dans ce sens, les banques nationales ainsi que les filiales des banques étrangères sont en train de faire un travail à même de «diminuer les coûts et les commissions rattachées au crédit documentaire», a ajouté M. Benkhalfa. En outre, les délais de mobilisation du credoc seront revus à la baisse, de même qu'une liste des correspondants à l'étranger sera établie. «Ce corridor spécifique est déjà mis en place et s'élargit selon le style maison de chaque banque», a-t-il indiqué. Selon lui, les chargés de l'application du crédit documentaire au niveau des PME bénéficieront en outre d'une formation «appropriée». Ce corridor spécifique, qui pourrait être comparé au couloir vert mis en place il y a quelques années pour certaines entreprises exportatrices, est un signal fort envers les producteurs, nous confiait un chef d'entreprise qui n'a pas caché que ce genre d'action pourrait être élargi à d'autres écueils qui handicapent énormément l'entreprise algérienne. Un comité conjoint pour faire le point Rappelons que, depuis l'institution de cette formule de paiement, «inconnue» de certaines entreprises, plusieurs parties se sont élevées pour la décrier. Elles ont mis à l'index, outre les trésorerie, des retards dans l'approvisionnement ainsi que le manque de formation du personnel chargé d'appliquer cette formule. Et parmi les griefs soulevés figure la complexité de ce mode de paiement qui nécessite l'intervention de plusieurs parties. Face à cette situation qui n'est guère en faveur du secteur productif, le gouvernement a décidé d'agir en mettant en place un comité conjoint, présidé par un représentant des services du Premier ministre qui regroupe des représentants du ministère des Finances et des banques et des représentants du patronat. Cette action a été décidée lors d'une réunion qui a regroupé le ministre des Finances, le patronat et la communauté bancaire. Une réunion durant laquelle les trois parties ont examiné dans le détail les contraintes que rencontrent les entreprises dans les approvisionnements nécessaires à leur outil de production. Selon le département des finances, le comité en question aura pour mandat de dégager, avant la fin du mois de mars prochain, toute mesure organisationnelle de nature à faciliter la tâche aux entreprises de production dans le recours au crédit documentaire pour le financement des importations. Ainsi, à la fin du premier trimestre 2010, une rencontre sera organisée pour faire le point des améliorations qui auront été dégagées au profit des entreprises productives dans l'usage du crédit documentaire pour le financement des importations de leurs intrants et l'amélioration du financement des petites et moyennes entreprises. Il faut noter dans ce cadre que, même si le gouvernement était intransigeant quant à l'application de cette mesure qui, avec d'autres, a pu mettre un frein à la facture des importations laquelle aurait pu dépasser les 50 milliards de dollars, il a préféré jouer la carte de la prudence pour ce qui est du secteur productif. Plus explicite, le ministre du Commerce El Hachemi Djaaboub avait dit récemment qu'il existait une différence entre l'importation pour la revente en l'état, d'une part, et l'importation pour les équipements, les pièces de rechange pour les usines et les matières premières. Et c'est pour cela qu'il a tenu à souligner que «s'il y a une confiance mutuelle entre le client algérien et son fournisseur étranger, ce dernier devrait accepter que son client réceptionne sa marchandise et d'être payé par la suite.»