Toufik Khelladi a le culte du secret. Il ne dit presque rien sur le budget de l'ENTV, qui s'est multipliée en quatre autres programmes satellitaires (Canal Algérie, A3, Chaîne IV et Chaîne V), rien sur les fonds dégagés pour l'acquisition des droits de diffusion des matchs de foot du Mondial du Brésil, sur la facture d'achat des feuilletons et sketch algériens ou sur les entrées publicitaires. Hier, lors de la traditionnelle conférence de presse de présentation de la grille du Ramadhan 2014, au boulevard des Martyrs, à Alger, le directeur général de l'ENTV a évité soigneusement de répondre aux questions relatives aux financements. «C'est une question de négociation. Nous n'avons pas encore finalisé le dossier. Cela fait partie du budget traditionnel consacré au mois de Ramadhan. Nous aurons terminé la consolidation et bientôt nous pourrons vous donner un chiffre précis», a-t-il dit à propos de la grille Ramadhan 2014 qui aurait coûté «quelques dizaines de milliards de centimes». «De centimes, pas de dinars. Il arrive souvent qu'on confonde entre centimes et dinars», a-t-il appuyé. Concernant le Mondial 2014, l'ENTV aurait, d'après Toufik Khelladi, acquis les droits de 24 matchs à «un excellent prix». Mais combien au juste ? Réponse évasive du directeur général de l'ex-RTA : «Il y a des choses qu'on ne peut pas divulguer. Nous avons très bien négocié les droits de retransmission avec le détenteur exclusif des droits de diffusion dans la région Afrique du Nord et Moyen-Orient (MENA). Nous avons payé ces droits moins que certaines chaînes étrangères, comme TF1 (première chaîne française), pour à peu près le même nombre de matchs.» Selon lui, la relation commerciale et professionnelle avec le réseau qatari de télévision Bein Sports (qui détient ces droits pour les pays arabes) est revenue à la normalité. Pour rappel, l'ENTV, contrairement aux règles commerciales, avait piraté le match Algérie-Burkina Faso qualificatif à la Coupe du monde de football. «Les négociations interviendront avec ce partenaire en septembre pour la diffusion d'autres compétitions de niveau international, comme les matchs qualificatifs à la Coupe d'Afrique des nations», a annoncé le DG de l'ENTV, indiquant que l'ex-RTA n'est pas une chaîne sportive mais une chaîne généraliste. Le drama arabe ou turc sera absent des écrans de la télévision d'Etat cette année. «Vous connaissez la situation actuelle du monde arabe. La production des feuilletons a chuté, notamment en Syrie et en Egypte. Nous avons pris la décision de consacrer nos moyens à la production nationale pour permettre à toutes les compétences existantes tant dans le secteur public que privé de travailler. Nous avons fourni un effort particulier pour algérianiser les programmes avec un taux de 89%, contre 85% en 2013. Ce taux est de 100% pour Canal Algérie. C'est une manière de développer la production audiovisuelle à l'extérieur de l'ENTV», a-t-il noté. Qu'en est-il de la concurrence ? «Nous avons nos stars. Le marché tranchera. Il est évident que nous prenons en compte ce que propose la concurrence dans l'élaboration de nos programmes. Nous gardons en tête que nous sommes une télévision publique», dit-il. L'ENTV ne veut donc pas de concurrence mercantile, même si la pub qu'elle diffuse la rapproche des chaînes de télévision hautement commerciales. Selon lui, l'ENTV n'engagera des relations de partenariat avec les autres chaînes privées (KBC, Echourouk TV, Ennahar TV, etc.) qu'une fois leur statut légal défini en Algérie. D'après lui, l'ENTV n'a pas les gros moyens financiers qu'on lui prête. Concernant la qualité des sitcoms et feuilletons algériens diffusables sur l'ENTV, Toufik Khelladi, qui parlait en présence de Lyès Belaribi, directeur de la production, a indiqué qu'une commission de lecture «composée de personnes extérieures à la télévision», se prononce sur «la nature» des textes à sélectionner pour la mise en production. «Nous faisons pour le mieux. Evidemment, nous ne pouvons pas diffuser que ce qui est proposé par le marché. Nous avons notre part de responsabilité dans ce qui est de la production interne. Nous veillons à ce qu'un minimum de qualité soit assuré. Nous ne pouvons pas aller au-delà de ce qu'offre le territoire audiovisuel national. C'est cela le tissu et nous faisons avec !», a-t-il noté. Pas de partenariat avec les chaînes privées L'amélioration de la qualité du produit dépend d'un environnement «qui doit évoluer». «Situation liée aussi à la mise en place d'école de formation. Il n'y a pas d'école de formation aux métiers de la télévision, son et image», a-t-il relevé. «Nous avons de gros déficits de qualification dans beaucoup de métiers en relation avec l'audiovisuel. La télévision a engagé un vaste plan de formation et de mise à niveau», a précisé Lyès Belaribi. Selon Toufik Khelladi, la grille Ramadhan 2014 est aérée, basée sur les shorts programs. Une grille où la littérature, le théâtre, le débat d'idées, les arts visuels n'ont pas trouvé place ! «La diffusion de la terrestre et de A3 sera commune chaque jour durant le Ramadhan de 18h à 22h, pour augmenter le taux d'audience. Canal Algérie diffusera des téléfilms inédits alors que la chaîne terrestre proposera trois films américains par semaine», a souligné M. Khelladi. Qu'en est-il des films algériens ? Nous n'avons pas les droits de diffusion. «Nous voulons faire revenir à l'écran le cinéma de qualité, y compris le cinéma d'auteur, sur la chaîne terrestre», a-t-il répondu, évoquant la restriction des droits de diffusion sur satellite pour les films occidentaux.