Routes, aménagement des ports, installations ferroviaires… Le groupe ETRHB Haddad est devenu, en vingt-deux ans, un des leaders du BTP, des transports et de l'hydraulique en Algérie, suscitant de nombreuses polémiques. Alors qu'il se prépare à entrer en Bourse, le PDG de l'entreprise, Ali Haddad, s'est confié en exclusivité à El Watan Week-end sur l'octroi des marchés publics en Algérie, son projet de chaîne de télévision, le marché du stade de Tizi Ouzou et ses contrats avec Djezzy. Le groupe ETRHB Haddad est une entreprise familiale, composée de six frères. Comptez-vous ouvrir votre capital à des investissements extérieurs ? C'est l'un des objectifs primordiaux de notre groupe. D'ailleurs, nous avons lancé l'emprunt obligataire comme première étape pour intégrer le marché boursier. Par la suite, nous ambitionnons d'ouvrir le capital au grand public. Pour relever ce défi, nous faisons tout notre possible en matière de qualité et de respect des délais pour gagner la confiance des investisseurs. Pourquoi avoir attendu vingt-deux ans ? En 1987, année de la création de notre entreprise, nous sommes partis de rien, avec un employé. Aujourd'hui, le groupe compte 9000 employés, et l'année prochaine, nous passerons à 18 000 ou 20 000. Pendant ces vingt-deux ans, nous nous sommes développés et bien organisés afin de monter une entreprise compétitive. Ce qui n'était pas le cas les premières années. Des rapports internationaux soulignent qu'en Algérie, pour bénéficier des marchés publics, les patrons d'entreprise doivent se rapprocher des sphères de décision. Quel est votre avis sur la question ? Personnellement, je ne suis pas d'accord avec ces rapports. Les étrangers, s'ils n'ont pas la part du lion en matière de marchés publics, essaient par tous les moyens de nuire à l'image de l'Algérie. Ils pensent que si les Algériens arrivent à décrocher un marché, c'est forcément parce qu'ils sont de connivence avec l'Etat. Mais les Algériens sont aussi tout à fait capables de réaliser de grands projets ! Notre pays est riche, et c'est la raison pour laquelle il suscite des convoitises. Pour cela les Algériens sont en droit de préserver jalousement les richesses de leur pays. Le groupe ETRHB a remporté le marché de réalisation du futur stade de Tizi Ouzou. D'autres entreprises ont réagi avec colère. Qu'en est-il aujourd'hui ? Le projet du stade de Tizi Ouzou a provoqué énormément de remous parce que c'est une opération importante. D'autant que le football est devenu, aujourd'hui, l'affaire de tout le monde. Il y a eu dans cette affaire cinq ou six soumissionnaires, et c'est l'ETRHB qui a été retenue pour la réalisation du stade. Suite aux délibérations, les Chinois ont introduit un recours qui a été débouté par la suite. Si l'entreprise chinoise n'a pu bénéficier du marché en question, c'est parce qu'elle était plus chère que nous, de 7 milliards de dinars. Ainsi, nous allons réaliser le stade avec notre partenaire espagnol FCC Construction (qui a entre autres réalisé les stades de Barcelone et de Berlin) dans des délais de 30 mois à partir de l'approbation par la commission nationale des marchés, probablement donnée en fin janvier. Le président de la JSKabylie se plaint du manque de sponsoring… Je tiens à préciser que nous avons beaucoup aidé la formation kabyle financièrement. Je promets au président Hannachi qu'il pourra compter sur l'Etrhb pour le sponsoring, voire plus. Plus ? Vous voulez donc acheter le club... Avec la nouvelle loi sur le sport qui entrera en vigueur dans les jours à venir, j'envisage de prendre attache avec le président du club afin de lui proposer mon aide. Mais pas pour prendre le club. Vous avez récemment résilié vos contrats avec Djezzy Orascom. Est-ce une sorte de boycott du produit égyptien ? Les Egyptiens n'ont pas digéré notre victoire, et ont très mal traité les Algériens en Egypte, journalistes, footballeurs… Ils ont encore poussé le bouchon plus loin en insultant nos martyrs et le peuple algérien. Pour cet acharnement gratuit, je considère que la moindre des sanctions que nous puissions infliger aux Egyptiens est de boycotter leurs produits et leurs services. D'ailleurs, les Algériens ont l'habitude de boycotter ce qui les dérange… Votre groupe ambitionne d'exporter son savoir-faire à l'étranger. Etes-vous prêt pour ce challenge ? Oui, parce que cela fait trois ans que nous y réfléchissons et que nous y travaillons. L'Algérie a des cadres compétents. La plupart des personnes qui travaillent dans les travaux publics en France sont des Algériens ! Nous avons des génies et nous mettons toutes les chances de notre côté pour les récupérer, même s'ils sont à l'étranger, et pour les mettre au service de notre entreprise. Quelle est la nature des entraves que rencontre votre groupe ? Notre groupe fait face à d'énormes contraintes, dont le manque de ciment. Parfois, nous sommes programmés dans une cimenterie pour enlever 100 tonnes par jour pour nos différentes opérations. D'un coup, la cimenterie tombe en panne et perturbe tout le programme de livraison. Nous avons également un souci d'approvisionnement en agrégats. Même en prenant toutes les dispositions, il y a toujours des surprises auxquelles on ne s'attend pas. Si nous ne parvenons pas à livrer des projets dans les délais réglementaires, c'est parce que nous sommes confrontés au manque de matériaux. Vous vous êtes lancé récemment dans l'aventure médiatique, avec deux journaux, et bientôt, d'après les rumeurs, une chaîne de télévision en dépit du verrouillage audiovisuel dans le pays… Dès que l'autorisation me sera accordée, je lancerai une chaîne de télévision apolitique. En d'autres termes, une chaîne pour les jeunes avec beaucoup plus de place pour le sport. Le groupe Etrhb vise également à asseoir une certaine notoriété à travers ses deux quotidiens arabophone et francophone. En ce sens, nous allons nous investir davantage pour entrer en force dans ce créneau en lançant une société de distribution. Et pour plus d'autonomie, nous enchaînerons, vers le mois de mars, avec la construction de quatre imprimeries au centre, à l'est, à l'ouest et au sud du pays. Bio express : Président directeur général du groupe ETRHB depuis sa création, Ali Haddad est né le 27 janvier 1965 à Azeffoun dans la wilaya de Tizi Ouzou. Après des études d'ingéniorat en génie civil en 1988, il obtient en 2005 un MBA (Master of business administration). Vice-président du Forum des chefs d'entreprises (FCE), également membre du Conseil d'affaires algéro-saoudien, il est aussi président de l'Entente sportive d'Azeffoun. A 44 ans, l'homme d'affaires a déjà reçu plusieurs distinctions, dont le prix spécial du jury lors du concours du meilleur manager de l'année 2003, décerné par le Club excellence management, le prix de la meilleur image de marque décerné par Trade leaders club en 2007, ainsi que la médaille du mérite industriel décernée par la Fondation pour l'industrie nationale algérienne en 2007.