L'ampleur du problème est restée méconnue pendant longtemps. Il a fallu attendre 1997 pour que l'opinion publique internationale en prenne conscience. Les plastiques ont envahi les mers du globe. Sa forme la plus saisissante a pris corps dans le Pacifique nord : un continent de plastique à la dérive, fait de dizaines de millions de débris, qui, selon les experts, ferait jusqu'à cinq fois la surface de la France. Problème : il n'y a pas que le Pacifique qui en est victime. La Méditerranée subit de plein fouet les rejets de nos sociétés de consommation et les chercheurs arrivés à bord du Tara sont venus l'expliquer lors d'une conférence aux étudiants de l'ENSSMAL. Avec 450 millions de personnes vivant sur son littoral, la grande bleue est devenue la 4e mer la plus touchée par le fléau. «Par endroits, on retrouve dans la mer quasiment autant de micro-déchets plastiques que de phytoplancton», explique Marie Barbieux, chercheuse française venue à Alger à bord du Tara. Pourtant, les recherches dans le domaine restent encore marginales. Seule la France a pour l'instant mandaté des chercheurs afin qu'ils travaillent sur les concentrations de plastique dans le nord de la Méditerranée. L'Algérie, comme tous les pays de la rive sud du bassin méditerranéen, n'a jusqu'à présent mis sur pied aucun programme de surveillance ni d'analyse. Il y a pourtant péril en la demeure : les poissons que nous mangeons contiennent potentiellement des taux de plastique alarmants et ces particules en se dégradant viennent fixer des produits chimiques dangereux pour la santé des hommes. Une menace d'autant plus inquiétante pour, que la filière du recyclage des plastiques étant encore émergeante dans le pays, sacs plastique et bouteilles finissent trop souvent par se dégrader dans le milieu marin. RDV en 2015 En 2013, en Algérie, seulement 5% des déchets sont recyclés, selon le secrétariat d'Etat à l'Environnement. Mais alors, l'Algérie est-elle plus ou moins touchée que ses voisins par le phénomène ? La réponse est loin d'être connue. Les autorités ont refusé à l'expédition Tara de procéder à des échantillonnages le long des côtes. Une fin de non-recevoir sans aucune justification. «On ne sait pas pourquoi cela a été refusé. Pourtant d'un point de vue scientifique, les eaux algériennes sont intéressantes», déplore Marie Barbieux. Selon elle, à quelques milles du littoral s'est formé un phénomène de tourbillon marin qui aspire les déchets plastiques vers le fond et impacte le milieu naturel en profondeur. Seule lueur d'espoir à l'horizon : d'ici 2015 un laboratoire de l'ENSSMAL, en partenariat avec d'autres laboratoires publics, devrait lancer la première campagne d'analyse des taux de plastique dans les eaux nationales.