Aïd El-Fitr : le président de la République reçoit les vœux de son homologue iranien    Djelfa : des associations partagent la joie de l'Aïd El-Fitr avec des malades et des enfants    La fête de l'Aïd au centre anti-cancer d'Oran : un moment d'espoir et de sourires pour les enfants cancéreux    AAPI : près de 13.000 projets d'investissement enregistrés jusqu'à mars courant    La présidente du CRA partage la joie de l'Aïd El-Fitr avec les enfants atteints de cancer au CHU Mustapha-Pacha à Alger    Ghaza : le bilan de l'agression génocidaire sioniste s'alourdit à 50.357 martyrs et 114.400 blessés    Les Algériens célèbrent l'Aïd El Fitr dans la compassion et la sérénité    Aïd El-Fitr : le président de la République adresse ses vœux aux éléments de l'ANP et des corps constitués et au personnel de la santé    France: la cheffe de file de l'extrême droite Marine Le Pen reconnue coupable de détournement de fonds publics    "Le couscous, racines et couleurs d'Algérie", nouvel ouvrage de Yasmina Sellam    La mosquée Emir-Abdelkader de Constantine, un phare de la foi et du savoir scintillant de mille feux durant le mois de Ramadhan    Arrivée du président de la République à Djamaâ El Djazaïr pour accomplir la prière de l'Aïd El Fitr    Le PDG de Sonatrach inspecte le port pétrolier d'Alger    Commerce: les conditions de présentation des fruits et légumes frais fixées par arrêté interministériel    France: début d'une marche pour la libération des prisonniers politiques sahraouis    Les pertes de Kiev ont dépassé les 70.000 militaires    Football : Suède – Algérie en amical début juin à Stockholm    Le MOB a fait trembler le CRB    Le représentant du département technique en Algérie    « L'industrie génétique américaine est pionnière dans le partage de son savoir-faire »    La bataille de Djebel Béchar, un acte d'une grande portée historique    Remise en service du train de voyageurs    Arrestation de deux dealers en possession de 9000 comprimés de Prégabaline 300 mg    Un plan sécuritaire spécial Aïd El-Fitr    Le ministre des Finances inaugure les bureaux de change    Quelles sont les stipulations relatives à l'exigence de capacités minimales en matière de procédure de passation de la commande publique ?    Ooredoo partage un Iftar de solidarité avec l'Association des handicapés moteurs    L'exode sans fin des Congolais    Le TNA rend hommage à plusieurs figures du théâtre algérien    Le régime des laïcards français partage l'obsession du voile avec son égal islamiste    « L'Algérie et la question des territoires historiques : un droit à la revendication ? »    Championnat d'Afrique de football scolaire 2025 : réunion de coordination FAF-DTN-FASS à Alger    Foot : le représentant du département technique régional de la Fifa en visite de travail en Algérie    Coupe d'Algérie: l'USM Alger et le MC El Bayadh en demi-finale    «La Présidente de la Tanzanie se félicite des relations excellentes unissant les deux pays»    « Préservons les valeurs de tolérance et de fraternité »        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    









D'«El Ghoul» à «Mesmar J'ha» : Un virtuose de l'humour politique
Publié dans El Watan le 03 - 12 - 2014

Mekbel part ensuite en France où il passe son bac à Aix-en-Provence. En 1962, il réussit le concours d'entrée à Saint-Cyr et le 26 janvier 1963, il rentre au bercail. En mai 1963, on le retrouve attaché d'administration à la Direction de l'énergie et des carburants. Il participe, à ce titre, aux côtés de Belaïd Abdesselam et de Sid-Ahmed Ghozali aux négociations avec la France sur le pétrole. En octobre 1965, il est embauché par l'ex-EGA (Electricité et gaz d'Algérie). Il officie à l'usine de gaz de Gué de Constantine, quartier où il va finir par s'installer, occupant un logement de fonction.
En 1974, Saïd Mekbel obtient son diplôme d'ingénieur électromécanicien spécialisé en mécanique des fluides. Il ne s'arrêtera pas en si bon chemin et s'engage dans des études de doctorat. En 1975-76, il poursuit sa formation à Paris. Il soutient, dans la foulée, un doctorat en mécanique des fluides à la faculté des sciences d'Alger. Dans les années 1980, il est professeur associé à l'Ecole polytechnique d'El Harrach. Comment donc ce brillant ingénieur est-il tombé dans le journalisme ? Ceux qui le connaissent savent évidemment que l'histoire d'amour entre Mekbel et la presse ne date pas des années 1990. Il avait fait partie de la première équipe post-indépendance d'Alger Républicain.
Rencontre avec Henri Alleg
Mekbel raconte qu'un jour de 1962, peu après l'indépendance, il envoie une critique de film à Alger Républicain. Henri Alleg, alors directeur de la publication d'Alger Rep', tombe tout de suite sous le charme du jeune chroniqueur et lui propose de passer le voir.
«Quand je l'ai vu, il m'a dit : ‘‘Tu sais, jeune homme, tu es fait pour l'écriture, viens ici, travaille chez nous. Tu commences par des critiques de films'' (Monika Borgmann, Une mort à la lettre, p. 72).» Dans la rédaction d'Alger Rep', il rencontre Kateb Yacine et M'hamed Issiakhem qui l'adoubent immédiatement. Mekbel collabore à une chronique satirique intitulée L'Ogre avant de lancer sa propre chronique sous le titre «El Ghoul» qui deviendra ensuite «Mesmar J'ha». 19 juin 1965 : coup d'Etat de Boumediène, Alger Rep' est frappé d'interdiction. «J'ai été interdit d'écrire parce que j'avais refusé d'écrire dans une revue de l'armée», dira Mekbel.
Toutefois, il n'a jamais cessé de taquiner la muse. «De 1965 à 1988, j'écrivais presque quotidiennement un billet et je savais qu'il ne serait jamais publié. Ce n'était que pour moi, pour me sauver, pour me préserver», confie-t-il (Une mort à la Lettre, P77). Peu après le soulèvement d'Octobre 1988, Alger Rep' retrouve enfin ses lecteurs. Mekbel est de l'aventure. Suite au clash entre une partie de la rédaction et la direction du PAGS dont Alger Rep' était proche, il rejoint l'équipe qui allait fonder le quotidien Le Matin (septembre 1991). Deux ans plus tard, il remplace Benchicou au pied levé, à la tête du journal. Dans l'intervalle, il participe au lancement de plusieurs tabloïds dont le journal satirique El Manchar ainsi que l'hebdomadaire Ruptures, fondé par Tahar Djaout, Arezki Metref et Abdelkrim Djaâd.
En avril 1992, il crée un autre journal satirique : Baroud. Ses responsabilités éditoriales ne l'empêcheront pas de «commettre» quotidiennement un billet au ton frais, à l'humour féroce, sous le titre générique «Mesmar J'ha» cloué à la dernière page du Matin, avec sa photo en médaillon. Il formera alors un duo de choc avec son éternel compère, le caricaturiste Ali Dilem. Une «paire rare». Esprit vif au regard lucide, voire extralucide, comme l'illustre son ultime chronique aux accents prophétiques (Ce voleur qui…), Mekbel s'imposera comme un as de l'humour politique, un billettiste d'exception qui va renouveler le genre et lui donner ses lettres de noblesse. Plus qu'un virtuose, «Mesmar J'ha» était, comme tous les grands esprits, un visionnaire. Deux recueils de ses textes paraîtront à titre posthume aux éditions Dalimen : Ce voleur qui… et Saïd Mekbel, dix ans déjà.
Le 3 décembre 1994, Saïd Mekbel est mortellement atteint de deux balles dans la tête dans un petit restaurant à Hussein Dey. Il sera inhumé le 6 décembre au cimetière Sidi Mohand Amokrane de Béjaïa. Ce matin-là, plusieurs titres étaient absents des kiosques en signe de deuil et de colère. Une foule immense se ruera vers le cimetière de Bougie.
«Ce sont les cimetières qui ont fait l'histoire»
Saïd Mekbel était papa de deux garçons, Hafid et Nazim, mais il avait laissé des centaines de milliers de lecteurs orphelins de sa plume au style inimitable. «Je n'ai jamais vu autant de monde à un enterrement. Toute la ville était au cimetière», se souvient Omar Belhouchet avec émotion. Le directeur d'El Watan était dans l'ambulance qui l'évacuait à l'hôpital avant de l'accompagner à sa dernière demeure. Et c'est lui qui avait lu l'oraison funèbre. Extrait : «Mesmar J'ha a su redonner espoir aux pires moments de désespoir, faire sourire quand les larmes l'emportaient. Il a eu ce don, ce génie de devenir un compagnon que des milliers de citoyens recherchaient. Son billet est ainsi devenu un grand moment de journalisme dans notre pays. Son engagement était total, sans faille, sans hésitation et sans retenue. Il se battait pour des idées nobles. Il se battait pour l'Algérie moderne et démocratique. Saïd avait, en ces moments durs et pénibles pour l'Algérie, la certitude que son combat était juste et porteur d'espoir, de modernité, de tolérance, de justice et de progrès. C'est tout cela qu'on a cherché à assassiner, qu'on a cherché à briser. Que les commanditaires de l'ombre sachent qu'ils n'ont pas réussi à te tuer. Ils n'ont pas réussi à éteindre l'espoir, ni venir à bout de notre détermination. Ce ne sont ni les égorgeurs, ni les émirs autoproclamés, ni ceux qui lancent de prétendues fatwas et qui établissent des listes de journalistes à abattre, qui nous décourageraient. Ils ne pourront jamais assassiner le rêve et l'espoir, le besoin d'expression et de changement. En un mot, la vie. Saïd, nous ne nous laisserons pas abattre par l'immense douleur que nous ressentons, ni par le désespoir et le défaitisme. Saïd, nous te faisons le serment, et Dieu nous est témoin, que nous resterons fidèles à ta mémoire, à tes idées, à ton combat. Nous resterons fidèles à l'Algérie qui veut rester debout. Nous poursuivrons le combat pour faire fleurir la liberté d'expression pour laquelle tu t'es sacrifié, et pour que triomphe la démocratie en Algérie.» Mekbel disait : «Ce sont les cimetières qui ont fait l'histoire.» Il nous plaît de croire que celle-ci n'a pas encore dit son dernier mot, et que «Mesmar J'ha» continuera à inspirer nos chants de résistance aussi longtemps que sa parole continuera à résonner dans nos cœurs.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.