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Régime au bord de la crise de nerfs
Publié dans El Watan le 26 - 12 - 2014

Il eut été encore plus aisé d'interpréter la présence d'une dizaine de ministres, dont celui de l'Energie, à l'inauguration de la 23e Foire de la production nationale comme un cri d'alarme. Celui d'un Exécutif tétanisé de voir ses marges de manœuvre budgétaires se réduire comme peau de chagrin. La faute à une économie shootée aux hydrocarbures qui, des années durant, s'est vue davantage cigale que fourmi. Mais nul besoin de «métaphorer» ou d'interpréter quand les données suffisent.
Le Sahara blend, le brut de référence algérien, a perdu près de la moitié de sa valeur en six mois. Les analystes les plus optimistes prévoient un retour du baril à 80 dollars en 2016 au mieux, quand le pays a besoin d'un baril à 120 dollars pour équilibrer son budget. «Dans la situation actuelle, nous pouvons tenir quatre ans», a confié d'un air grave Abdelmalek Sellal, sans que l'on sache s'il voulait rassurer ou mettre en garde. Le Fonds monétaire international, plus alarmiste, estime que les réserves de devises de l'Algérie peuvent assurer un peu moins de deux ans et demi d'importations. «La réalité, c'est que 2015 doit être une année de solidarité et de confiance entre gouvernants et gouvernés», a ajouté le Premier ministre, avant de promettre que le niveau de vie des citoyens ne sera pas affecté.
Autrement dit : pas touche aux transferts sociaux ! Les coupes se feront ailleurs : gel des recrutements dans la Fonction publique, gestion drastique des budgets des administrations, report de certains projets comme les chemins de fer ou le tramway… A quelques mètres, un ministre glisse aux journalistes : «Une loi de finances complémentaire devrait être évoquée dans les prochains jours.» Pour rectifier celle votée en novembre par l'Assemblée populaire nationale (APN) et le Conseil de la nation. C'était il y a un mois, une éternité. A l'époque, tout allait pour le mieux pour le meilleur des mondes. Et puis, le Président a convoqué un conseil restreint pour remettre de l'ordre…
Nerfs
16 décembre. Gala du Forum des chefs d'entreprises (FCE). Dans les couloirs d'El Aurassi, un grand patron nous fait signe et nous attire à l'écart. «Dites-moi… le président de la République est vraiment à Paris ?» demande-t-il. Réponse gênée : «Sans vouloir vous offenser, vous êtes censés être mieux renseignés que nous.» «Ah… Dans ce cas, vous ne me servez à rien», sourit-il, avant de retourner à sa table et à sa chorba. La rumeur a depuis été démentie par le médecin français du chef de l'Etat. A la baisse des cours du pétrole, l'économie algérienne ne peut se permettre d'ajouter une polémique sur la santé du président et son aptitude à garantir la stabilité politique. «Ce n'est pas avec un pouvoir vacant et des institutions en panne que l'on peut raisonnablement compter pour faire face à cette crise», tonne déjà Ali Benflis.
Anticipant les coups, le Président a donc tenu à montrer qu'il était encore à la manœuvre. Nécessaire pour faire taire les critiques. Insuffisant pour rassurer sur le long terme. Mezzo voce, des corps habituellement acquis au régime évoquent leur lassitude. A la Safex, les langues se délient. Celles des députés, ministres, conseillers, policiers, gendarmes, chargés du protocole… Dans son bleu de travail, un drapeau algérien cousu sur le pectoral droit, casquette vissée sur la tête, Ahmed (le prénom a été changé) parle de son rêve de partir en France : «Là-bas, les policiers sont respectés. Là-bas, quand vous envoyez une lettre au Président, il vous répond. Mais ici…»
Il ne finit pas sa phrase et s'en excuse : «Je ne suis pas autorisé à parler de politique.» Le protocole aussi est sur les nerfs. Un colosse se dispute avec un journaliste : «Je vous ai dit de reculer ! Reculez !» Le lendemain, à l'APN, un autre barre l'entrée de l'hémicycle à un conseiller ministériel : «Vous n'avez pas votre badge, vous n'entrez pas !» «L'année a été chargée», justifie l'un de des camarades. Avant d'enchaîner sur l'actualité internationale : «Vous avez vu, les Tunisiens ont élu un Président qui a 11 ans de plus que le nôtre ! Après ça, ils ne pourront plus nous critiquer.» Il ne compte pas prendre de vacances prochainement. Ses collègues non plus. «A chaque fois que je veux poser des jours, on nous annonce un remaniement», soupire-t-il.
Un autre jour, c'est un autre ministre qui nous coince entre deux portes : «Quelles sont les rumeurs qui circulent ? Vous avez des informations sur qui reste, qui part ? Ce ne sont que des rumeurs, n'est-ce pas ?» Un autre confesse être exténué : «On est en poste depuis début mai seulement et on est déjà crevés. Ça fait quoi ? Six, sept, huit mois ? Je ne sais plus. Et impossible de prendre des congés, ce serait mal vu.» Leurs conseillers sont dans le même état. Certains redoutent déjà de se retrouver à la rue. Derrière les sourires de façade, le climat est au découragement au sommet de l'Etat.
Impuissance
«De toute façon, c'est n'importe quoi ce remaniement. On enlève untel, on en place un autre, personne ne connaît ses dossiers. Les ministres se succèdent et apportent les mêmes réponses. La même langue de bois.» Le coup de gueule vient d'une députée d'Oran, elle aussi «dépitée par l'ambiance actuelle». Elle accuse : «Tout cela, ce n'est qu'un jeu d'échecs. On se fout de nous.» A ses côtés, une autre confirme que l'atmosphère est plutôt morose : «Vous savez, les ministres ont peur pour leur poste, pour leurs avantages. Mais ils habitent tous à Club des Pins, dans leur monde, entre eux ! Nous, on est au contact de la population. On voit la souffrance des gens, explique-t-elle. Et je vous le confirme : le moral des Algériens est indexé sur les prix du pétrole. En ce moment, c'est la chute libre.»
Un troisième se plaint du manque de diligence des journalistes. De leurs obsessions. De leurs approximations. «Depuis deux ans, ils ne parlent que de nos salaires. On nous attribue une rente mensuelle de 300 000 DA. D'abord, c'est faux. C'est 260 000. Ensuite, vous savez combien de directeurs, de sous-directeurs, de gratte-papiers dans les administrations gagnent mieux que nous ? Beaucoup trop.» Sa collègue reprend la parole. Se plaint du manque d'estime. Confesse que «le pire, c'est le sentiment d'impuissance». «On est censés contrôler le gouvernement. Faire le suivi des politiques publiques. Mais je vais vous dire quelque chose. En vrai, on ne sert à rien.»
L'aveu est terrible. En fin de séance, une fois les lumières éteintes, la même revient à la charge près du hall d'entrée : «Vous voyez, le seul pouvoir dont on dispose, c'est de poser des questions. D'ouvrir notre bouche.» Le ministre de la Santé, Mohamed Boudiaf, prend le temps d'écouter. A la sortie de l'hémicycle, il devise de longues minutes avec les élus qui l'apostrophent. D'autres ont déjà filé depuis longtemps, en prenant soin d'esquiver les questions des journalistes.
Un cameraman s'agace : «On a donc attendu pour rien ?» «Leur obligation, ce n'est pas de vous répondre à vous, mais aux députés», le provoque un conseiller ministériel. Un fonctionnaire en profite pour distribuer un texte : «Ce sont des gens que je connais, qu'on a spoliés. Je vous ai glissé la pétition qu'ils ont rédigée. Si vous pouviez les aider dans leur cause… J'en fais partie, mais il ne faut pas le dire.» Déprime généralisée ? Presque. Aux questions orales du jeudi, un député semble particulièrement serein.
En pleine crise pétrolière, il alerte Amara Benyounès… sur l'arabisation des devantures des magasins. «Il serait convenable qu'elles soient rédigées dans notre langue et non dans des langues étrangères», insiste l'élu. «Aussitôt nommé, avant même d'avoir le temps de dire ‘bismillah', vous m'interpelliez déjà sur le sujet», s'éclaffe le ministre. «Vous avez vu comme ils sont détendus ? décrypte un habitué des lieux. C'est parce qu'ils sont sûrs d'avoir leur salaire jusqu'en 2017, eux. Pour les faire paniquer, il faut leur parler de dissolution.» Il n'en est pas question pour l'instant.


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