Human Rights Watch (HRW), à la faveur de son rapport annuel quant à la situation des droits de l'homme dans le monde, dresse un tableau sombre de l'environnement qui prévaut en Algérie. Dans le préambule, le ton est donné : « Sous l'état d'urgence imposé en 1992, et sous la présidence d'Abdelaziz Bouteflika, qui a été réélu sans peine pour un troisième mandat, l'Algérie a continué de connaître des violations généralisées des droits humains. » Le réquisitoire est entamé par l'élection présidentielle du 9 avril 2009, qui a vu le président sortant, Bouteflika, réélu. « Il s'est présenté après que le Parlement eut adopté sans aucun débat un amendement constitutionnel en novembre 2008 pour l'abolition d'une limite de deux mandats à la Présidence. Trois partis d'opposition, bien établis, ont boycotté l'élection, affirmant que les conditions d'un vote équitable et transparent n'étaient pas réunies », mentionne le rapport. Puis est développé un – très long – chapitre qui a trait à la restriction des libertés d'expression et d'assemblées. Médias audiovisuels contrôlés par l'Etat, sans émissions critiques et d'opinions divergentes sur les politiques gouvernementales, journaux privés qui « bénéficient d'un espace considérablement plus libre. Mais les lois répressives sur la presse, leur dépendance vis-à-vis des revenus de la publicité du secteur public et d'autres facteurs limitent leur liberté de critiquer le gouvernement, l'armée et les puissants », tempère HRW. De même, le code pénal et les lois de la presse « imposent des peines de prison allant jusqu'à deux ans, assorties d'amendes ». Le rapport de citer les exemples des journalistes Nadjar Hadj Daoud et Hanfaoui Ghoul, tous deux emprisonnés sous diverses accusations de diffamation. Sans omettre les difficultés faites dans l'octroi de visas aux journalistes et aux défenseurs des droits humains étrangers, à plus forte raison lorsqu'ils sont Européens ou Nord-Américains, ou sont entrés, comme cela a été le cas pour cette année 2009, lorsqu'ils ont couvert les élections présidentielles d'avril. Autre point noir des libertés, le décret interdisant les manifestations à Alger. « Les autorités exigent que les organisations obtiennent l'autorisation du gouverneur local avant la tenue de réunions publiques », déplore le rapport, qui note l'empêchement par « d'importants contingents de policiers » de nombreuses conférences, à l'instar de celle de la LADDH en octobre 2009. Critique d'actualité, l'ordonnance 06-03, « une loi de 2006 prévoit des peines de prison pour prosélytisme de la part des non-musulmans et leur interdit de se rassembler pour prier, sauf dans des lieux approuvés par l'Etat. Les autorités refusent les demandes présentées par les groupes chrétiens protestants pour utiliser des bâtiments pour le culte, exposant ainsi leurs membres au risque d'être persécutés s'ils prient dans des lieux non autorisés », affirme HRW. Actes terroristes et impunité Même si les attaques commises par les terroristes ont « diminué de façon spectaculaire par rapport au milieu des années 1990, Al Qaîda au Maghreb islamique (AQMI) a continué de lancer des attaques mortelles, destinées pour la plupart pour des cibles militaires et policières », accuse le rapport, poursuivant « parfois, l'AQMI a également tué des civils ». Et si la décennie sanglante semble s'être apaisée, n'en demeure que ses séquelles se font encore ressentir auprès des populations, d'autant plus que « les auteurs des atrocités de cette période continuent de bénéficier de l'impunité ». De même, sont mis en exergue le douloureux dossier des disparus et autres enlevés, la détention secrète, la torture et la peine de mort, ou encore le cas de cet Algérien anciennement détenu à Guantanamo, et qui « reste emprisonné dans un lieu inconnu ». Par ailleurs, HRW conclut son rapport en accusant les autorités algériennes de « rejeter systématiquement les demandes formulées dans le cadre des procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme des Nations unies, relatives à des visites par les rapporteurs spéciaux sur la torture, sur la promotion et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, ainsi que sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires et arbitraires, ainsi que par le groupe de travail sur les disparitions forcées ou involontaires ».