La corruption socialisée en Algérie menace la sécurité nationale, dont les scandales récents du Programme de développement agricole (PNDA), de différentes banques, de l'autoroute Est-Ouest (dont le montant a plus que doublé par rapport au montant initial) et de Sonatrach en sont les exemples vivants, mais qui concernent également bon nombre d'autres secteurs. Dans ce cadre, il y a lieu de faire les précisions suivantes loin des règlements de compte inutiles, car une personne même inculpée par la justice est innocente jusqu'à preuve du contraire. Le récent scandale, s'il ternira l'image de Sonatrach et donc de l'Algérie expliquant la résonance internationale, puisque procurant 98% des recettes en devises, comme j'ai eu à l'affirmer récemment lors du débat à la télévision française France 24 le 15 janvier 2010, à court terme, n'aura pas de répercussions sur la production et les exportations de Sonatrach puisque depuis trois années, de nouvelles grandes compagnies étrangères d'envergure n'ont pas soumissionné et que la production et les nouvelles découvertes ont été faites soit en partenariat entre les compagnies étrangères existantes et Sonatrach ou par Sonatrach seule qui possède beaucoup de cadres compétents qui n'ont rien à envier aux étrangers. Aussi, je pense qu'avec le temps, après la stabilisation du management, les choses reprendront leurs cours normaux sous réserve que cela entre dans le cadre d'une plus grande moralisation des institutions. Car si la corruption existe dans tous les pays du monde, comme en témoignent les scandales financiers mis en relief pendant l'actuelle crise mondiale, elle est relativement faible en rapport à la richesse globale créée. En Algérie, elle s'est socialisée touchant toutes les sphères de la vie économique et sociale remettant en cause la sécurité nationale du pays. Il faut aller vers le contrôle démocratique de deux segments stratégiques, la production de la rente des hydrocarbures (donc Sonatrach) et la distribution de la rente des hydrocarbures (tout le secteur financier) puisque l'ensemble des secteurs public et privé sont irrigués par cette rente. D'ailleurs, invoquer des taux fantaisistes pour 2009 de 10% de taux de croissance et de 10,2% de taux chômage (taux officiel incluant les sureffectifs des administrations et des entreprises publiques, les emplois temporaires de 3 à 5 mois au titre de la solidarité nationale, et d'une manière générale tous les emplois fictifs improductifs), alors que la Banque mondiale vient d'annoncer un taux de chômage pour l'Algérie de 25%, la sphère informelle non comprise, relève de l'utopie. L'extension de la sphère informelle n'est que le produit du terrorisme bureaucratique, qui tire sa puissance dans l'existence de cette sphère puisque fonctionnant dans un espace de non-droit et favorisant la corruption, renvoyant, pour dominer son influence, à la refonte de l'Etat et à la mise en place de mécanismes de régulation transparents. En effet, comme je l'ai rappelé souvent, la lutte contre la mauvaise gestion et la corruption renvoie à la question de bonne gouvernance, de démocratie, de rationalisation de l'Etat dans ses choix en tant qu'identité de la représentation collective. Concernant l'aspect économique en Algérie, il faut s'interroger sur le faible impact des 200 milliards de dollars d'investissements publics entre 2005/2009 sur la sphère économique et donc sur la sphère sociale : corruption (surfacturation) ou mauvaise gestion des projets devant responsabiliser les cadres dirigeants, mais également l'inefficacité des institutions de contrôle et des ministères. Car nous assistons à une gestion administrative avec différentes interférences où souvent les gestionnaires ne sont pas libres de manager leurs entreprises. Sont-ils réellement les seuls responsables ? Qu'en sera-t-il des 150 milliards de dollars programmés 2010/2014 ? La lutte contre la corruption n'est pas une question de lois ou de commissions, vision bureaucratique, autant que la lutte contre la hausse des prix ; comme le paradoxe de vouloir revoir récemment les statuts du Conseil national de la concurrence qui d'ailleurs n'a jamais fonctionné depuis sa création (plus de 15 années), comme ce gel inexplicable de la Cour des comptes, comme si les modifications des statuts de ce Conseil allaient par enchantement faire baisser les prix. Ce sont les pratiques d'une culture dépassée, l'expérience en Algérie montrant clairement que les pratiques sociales quotidiennement contredisent le juridisme. Il est utile de rappeler que le président de la République, lors de l'année judiciaire le 28 octobre 2009, se donne pour objectif de combattre la corruption, la bureaucratie dévalorisant le couple intelligence/travail sur lequel doit reposer tout développement fiable et donc d'asseoir un Etat de droit. Ce rêve si cher à tous les Algériens sera-t-il réalisé ? Car comment mobiliser les citoyens au moment où certains responsables au plus haut niveau ou leurs proches sont impliqués ou supposés impliqués dans les scandales financiers ? En fait, cela implique la refonte de l'état et donc une nouvelle gouvernance si l'on veut combattre efficacement la corruption qui gangrène tout le corps social et qui tend, malheureusement, à être banalisée alors qu'elle constitue le pus grand danger pour la sécurité nationale, pire que le terrorisme qu'a connu l'Algérie entre 1990/2000.