Le Maroc profitera-t-il de la présidence du Conseil de sécurité par la France en février pour imposer à la communauté internationale son plan d'autonomie pour le règlement du conflit du Sahara occidental qui l'oppose au Front Polisario ? Paris De notre correspondante Le chef de la diplomatie française a rencontré mardi dernier son homologue marocain. C'est Bernard Kouchner lui-même qui l'a annoncé lors de la cérémonie de vœux de nouvel an à la presse quelques heures plus tôt. « Je voulais vous donner quelques exemples qui, enracinés dans le travail du Quai d'Orsay, depuis deux ans et depuis plus longtemps d'ailleurs, vont faire l'objet de notre attention en 2010 et en 2011… Je rencontre M. Fassi Fehri aujourd'hui à propos du Polisario », a indiqué Bernard Kouchner aux journalistes présents. Au point de presse du lendemain, interrogé au sujet du Sahara occidental, sur la teneur de l'entretien entre les deux ministres dans la perspective de la présidence du Conseil de sécurité par la France en février, le porte-parole du Quai d'Orsay a répondu : « L'entretien de Bernard Kouchner avec son homologue marocain s'est tenu dans le cadre de nos échanges bilatéraux très réguliers. Je rappelle que le chef de la diplomatie marocaine était à Paris à la mi-décembre dernier. Cette rencontre d'hier témoigne de l'excellence qui caractérise notre relation bilatérale. C'est dans ce cadre que les deux ministres ont abordé des questions régionales, notamment la Guinée, le Sahara occidental et la situation sécuritaire dans la zone sahélienne. » En l'espace d'un mois, c'est la deuxième rencontre à Paris entre les chefs de la diplomatie français et marocain. Ainsi, Rabat, avec le soutien bienveillant de Paris, compte profiter de la présidence du Conseil de sécurité de l'ONU par la France pour relancer son plan d'autonomie au Sahara occidental, voire faire le forcing auprès de la communauté internationale pour imposer sa solution. Rabat n'est-il pas reparti en campagne pour faire avaliser ce projet sur un territoire qu'il occupe depuis 1975 et écarter par là-même l'organisation, qu'il a maintes fois repoussée sous différents prétextes, du référendum d'autodétermination du peuple sahraoui ? Son nouveau plan de « régionalisation avancée » ne vise-t-il à faire légaliser son projet d'annexion du Sahara occidental ? Rabat a dépêché à Paris, début janvier, Abdelhamid El Ouali, membre de la dénommée « Commission consultative de la Régionalisation », installée le 3 janvier dernier par le roi Mohamed VI, le chargeant de faire campagne pour ce projet. C'est ainsi que l'émissaire royal a multiplié, avec le soutien actif et zélé de l'Observatoire d'études géopolitiques (une association de chercheurs et de diplomates français) les rencontres publiques et les contacts avec des parlementaires français et des journalistes. Prenant le devant, lors d'une conférence de presse, au CAPE, le 9 janvier, Abdelhamid El Ouali s'est efforcé de défendre l'idée que ce projet de régionalisation n'a rien à voir avec la question du Sahara occidental. Mais Mohamed VI n'a-t-il pas déclaré explicitement, à l'occasion de l'installation de cette « Commission consultative de la Régionalisation », que « la région saharahienne », soit le Sahara occidental, sera « la première région du Royaume à bénéficier de la régionalisation avancée » ? Quant à la position de la France sur la question du Sahara occidental, force est de constater qu'elle n'a pas changé. Alors que Bernard Kouchner venait d'être nommé ministre des Affaires étrangères par Nicolas Sarkozy, et après avoir rencontré son homologue marocain, le porte-parole du Quai d'Orsay rappelait que « la France avait salué le plan d'autonomie marocain comme une contribution positive, comme un élément constructif de nature à relancer les négociations ». L'ancien ministre des Affaires étrangères, Philippe Douste-Blazy, avait déjà exprimé l'accueil favorable par la France du plan d'autonomie présenté par le Maroc lors de sa présentation du projet de « partenariat renforcé » entre la France et le Maghreb.