Face à la dégradation de la situation socioprofessionnelle des travailleurs, générée par la chute du pouvoir d'achat et «l'absence de volonté politique des pouvoirs publics de prendre des mesures urgentes pour répondre à la situation de malaise social», le Syndicat national autonome des personnels de l'administration publique (Snapap) a convoqué son conseil, actuellement en session ouverte, pour dégager un échéancier d'actions de protestation. Les représentants de plus de 900 000 travailleurs, recrutés dans le cadre des différentes formules d'insertion professionnelle, du préemploi et du filet social, menacent de renouer avec les actions de protestation. «Manifestations de rue, rassemblements et sit-in seront observés jusqu'à la fin de l'année», précise le syndicat, membre de la Confédération générale autonome des travailleurs algériens, qui menace ainsi de durcir le ton après une période d'accalmie, pour dénoncer la précarité «appelée à durer encore dans le temps». Mis en place pour permettre aux jeunes diplômés d'acquérir de l'expérience avant leur intégration permanente dans le marché du travail, ces formules de préemploi et d'insertion professionnelle ont subi plusieurs mutations pour former une catégorie de travailleurs diplômés, occupant des postes réguliers, mais avec une rémunération précaire et un contrat renouvelable sans aucune issue. Et c'est dans la Fonction publique que la précarisation des fonctionnaires est le plus décriée. L'Etat est ainsi le premier à encourager l'emploi précaire. Dris Mekki, représentant de ces travailleurs, explique leur détresse. Ils touchent 6000 DA pour les techniciens, 8000 DA pour les techniciens supérieurs, 12 000 DA pour les bac+3, 15 000 DA pour les titulaires de licence et plus. Ainsi, c'est le diplôme qui fixe le montant de la rémunération versée par l'Etat. «Pour les travailleurs du secteur économique, l'employeur est censé verser un plus pour que le salaire net atteigne au moins le SNMG, mais cela reste de la théorie, en réalité, ces travailleurs ne perçoivent aucun sou de leur employeur, les charges restent entièrement supportées par l'Etat», dénonce le syndicaliste. «Les employeurs disposent ainsi d'une main-d'œuvre gratuite, diplômée et permanente, avec zéro charge», ajoute M. Mekki, qui pointe du doigt l'Inspection du travail et les autres institutions chargées de faire respecter la réglementation, qui prévoit pourtant une régularisation dans des postes permanents après deux contrats temporaires. Fonction publique : pourvoyeuse de postes précaires Si le dispositif d'insertion professionnelle et le préemploi datent d'une dizaine d'années, le filet social, lui, a été instauré au début des années 1990. Des fonctionnaires d'APC et des postes, de certains établissements scolaires et d'autres administrations ont fait leur carrière selon cette formule. Une jeune femme employée dans une APC d'Alger explique qu'à force d'attendre leur permanisation de contrat en contrat, les fonctionnaires perdent des années qui sont couvertes en assurance maladie et autres prestations fournies par la CNAS, mais sans aucune cotisation pour la retraite. Elle ajoute : «Non seulement les salaires sont minables, mais ces fonctionnaires et autres ouvriers professionnels sont appelés apparemment à avoir une vie difficile, sans pension de retraite. Ce sera terrible et c'est cet aspect qui nous interpelle aujourd'hui !» Le Snapap prévient également contre le recours à d'autres mesures d'austérité, tout en rappelant la situation dans les années 1994, les conditions imposées par le FMI et leurs conséquences sur les salariés. Les travailleurs du préemploi craignent la suppression de cette formule, entre autres mesures envisagées dans le plan austérité pour réduire les dépenses publiques. «Ce n'est pas à l'ordre du jour, du moins à l'horizon 2016», indique M. Chaalal, responsable de la communication au ministère du Travail, démentant ainsi les informations faisant état de l'abandon prochain de ces dispositifs d'aide à l'emploi et à l'insertion professionnelle. «Ces formules seront maintenues. Il n'y a pas de projet d'abandon de ces dispositifs, mais plutôt leur orientation vers le secteur économique. La Fonction publique reste le principal destinataire de ces placements, au moment où le secteur économique doit être ciblé», ajoute M. Chaalal. Pour ce qui est des actions de protestation en vue, le Snapap réclame la révision du statut général de la Fonction publique et l'annulation réelle et effective de l'article 87 bis et non sa modification. Les actions porteront également sur la la révision de l'IRG (impôt sur le revenu global) «pour une justice fiscale», la revalorisation des pensions de retraite en garantissant le pouvoir d'achat, la mise en place d'une politique salariale conforme au pouvoir d'achat et enfin l'intégration de tous les contractuels dans des postes permanents et décents.