Des cellules de peau de souris ont été transformées directement en neurones fonctionnels, sans passer par l'étape de reprogrammation en cellules souches pluripotentes jusque-là jugée indispensable, selon une étude publiée mercredi par la revue Nature. « Cette découverte pourrait révolutionner l'avenir des thérapies à partir de cellules souches humaines et conduire à revoir notre compréhension de la façon dont les cellules choisissent et maintiennent leurs fonctions spécialisées dans le corps », selon l'université américaine de Stanford. « Nous avons directement induit la transformation d'un type de cellule en un type de cellule complètement différent », déclare Marius Wernig (Institut de biologie des cellules souches et de médecine régénérative de l'université de Stanford). « C'est un gigantesque bond en avant », assure Irving Weissman, directeur de cet institut, dans un communiqué. Les neurones obtenus en laboratoire « sont complètement fonctionnels », c'est-à-dire capables d'établir des connexions et d'envoyer des signaux à d'autres cellules nerveuses, souligne le Dr Wernig. Les cellules souches embryonnaires sont dites pluripotentes, parce qu'elles sont capables de devenir n'importe quel type de cellules spécialisées (du cœur, du cerveau, du sang...). Mais leur utilisation, source d'interrogations éthiques, reste controversée. Les cellules souches dites « adultes » sont déjà plus spécialisées. La découverte, en 2007, d'un moyen de reprogrammer des cellules de peau humaine en « cellules souches pluripotentes induites » (IPS), avait été présentée comme une avancée scientifique majeure, ouvrant la possibilité de traitements sur mesure, en contournant le débat éthique. C'est cette même étape des cellules IPS que les travaux de l'équipe de l'université de Stanford devraient permettre d'éviter. Car la reprogrammation de cellules ordinaires en cellules IPS peut altérer le génome de ces dernières, avec le risque de provoquer des tumeurs. Une nouvelle méthode de reprogrammation, présentée en mars dernier dans la revue scientifique Science, avait toutefois été jugée capable d'éliminer ce problème-clé de sûreté. Marius Wernig et ses collègues ont joué sur l'expression de trois gènes seulement pour transformer en neurones, sur la paillasse d'un laboratoire, des cellules de peau (fibroblastes) d'embryons de souris ou de souriceaux âgés de trois jours. « Le changement a été opéré en l'espace d'une semaine, avec une efficacité de près de 20% », c'est-à-dire bien meilleure que celle pour obtenir des cellules IPS, fait valoir l'université de Stanford, laissant entrevoir la possibilité d'études futures en laboratoire sur les maladies d'Alzheimer ou de Parkinson. « Un des nouveaux pas importants » sera de générer ce type de neurones induits « à partir de cellules humaines », concluent les chercheurs.