La valeur de l'euro a été fixée à 192 DA à l'achat, tandis que celle du dollar était de 170 DA, jeudi, sur la «Bourse» illégale du square Port Saïd, unique alternative à l'offre bancaire en devises. Le pouvoir d'achat de la monnaie nationale s'affaiblit sans cesse, laminé par un regain d'intérêt pour les devises, valeur refuge, face à un doute qui ne fait que s'amplifier à l'égard du dinar. La valeur de l'euro oscille désormais autour de 200 DA, au point que les rumeurs grandissent sur le spectre d'une rupture de l'offre tant la demande a atteint un rare niveau de frénésie. Le rétrécissement de l'offre face à une demande grandissante cristallise les spéculations depuis quelques jours sur une possible crise de disponibilités. Si l'argent de l'émigration ne promet pas de se tarir de sitôt, s'érigeant en principal pourvoyeur du marché local, le contrôle du commerce extérieur a, néanmoins, tari l'origine délictuelle des fonds qui prenait source dans les produits de la surfacturation de biens d'équipement et de consommation. Le resserrement de l'offre ne risque pas d'être conjoncturel tant la source délictuelle va en s'affaiblissant. Les produits de la surfacturation représentaient depuis plusieurs années déjà une part non négligeable de la masse en devises tournant dans les circuits invisibles du change. Au plan de la demande, le marché est frappé par une conjoncture adverse marquée par la multiplicité des acheteurs et la diversité des besoins. La tension sur la demande est entretenue depuis quelques mois déjà par une tendance à la thésaurisation. Plutôt que de répondre à l'opération de bancarisation — moyennant une taxation forfaitaire libératoire de 7% — lancée par le gouvernement, des détenteurs de fonds en dinars d'origine injustifiable tentent de les sécuriser dans une monnaie autre que le dinar. Les cambistes parlent désormais d'un mouvement de fonds qui transforme de fond en comble les tendances du marché. L'Exécutif et la Banque centrale sont en position de statu quo, préoccupés par l'impact de grande ampleur du choc externe sur les fondamentaux de l'économie. Lequel choc a induit une dépréciation, d'un autre genre, du cours du dinar face à l'euro et au dollar sur le marché officiel des changes. Sur le circuit interbancaire, la valeur du dollar est fixée à 104,13 DA à l'achat et à 110,48 DA à la vente. La valeur de l'euro est de 117,46 DA à l'achat et de 124,67 DA à la vente, selon les cotations hebdomadaires des billets de banque et des chèques de voyage, valables du 14 au 20 février 2016, communiquées jeudi par la Banque d'Algérie. Un tableau comparatif des cotations de cette semaine avec celle du 7 au 13 février 2016 fait ressortir une nouvelle dépréciation du dinar face à la monnaie unique. La valeur de l'euro était fixée la semaine dernière à 115,27 DA à l'achat et à 122,34 DA à la vente. En variation annuelle, l'érosion monétaire est encore plus prononcée tant la valeur du dollar était fixée à 92,67 DA à l'achat et à 98,33 DA à la vente, alors que celle de l'euro était de 104,88 DA à l'achat et de 111,30 DA à la vente, selon les cotations allant du 15 au 21 février 2015. Ainsi, force est de constater que les devises ne se sont jamais aussi bien portées tant sur le marché officiel que dans les circuits invisibles, profitant de la panique ambiante liée à la crise et d'un défaut de confiance en la monnaie nationale.