Les déboires du constructeur automobile Toyota menacent sérieusement la réputation de la marque nippone, dont l'action a fondu en Bourse de près de 21% depuis le début de la crise survenue en automne et a perdu un quart de sa valeur depuis le 21 janvier. Les rappels massifs de véhicules ainsi que les ventes perdues suite à la dégradation de son image coûteront près de 200 milliards de yens – soit 1, 5 milliard d'euros – estime le numéro un mondial du secteur automobile. Le constructeur, qui a dû rappeler plus de 8 millions de véhicules dans le monde en raison de défauts techniques affectant les pédales d'accélérateur et les freins, est soumis depuis quelques semaines à un déluge incessant de critiques au Japon. Toyota est accusé de « porter atteinte au prestige international du pays ». La plupart des grands journaux nippons ont fustigé hier, rapportent les agences de presse, la gestion chaotique de la crise par le groupe dont le PDG, Akio Toyoda, qui a tardé à s'exprimer après les nombreux accidents causés par les véhicules de la marque. Ce n'est, en effet, que vendredi soir que le patron de la prestigieuse marque est sorti de son silence pour présenter ses excuses. « Je suis profondément désolé du dérangement et des craintes causés aux clients à cause des rappels dans de nombreuses régions », a déclaré M. Toyoda au cours de sa première conférence de presse depuis le début de la crise. Avant son intervention publique, M. Toyoda s'est également excusé auprès des actionnaires de Toyota : « Les actionnaires sont des partenaires importants et la chute de la valeur du titre doit les inquiéter. » Le ministre japonais des Affaires étrangères, Katsuya Okada, a estimé pour sa part que la crise des défauts techniques affectant Toyota « constitue un problème pour la réputation de l'ensemble des produits de ce pays ». « D'un point de vue diplomatique, ce problème ne regarde pas qu'une seule entreprise. C'est un problème pour l'ensemble de l'industrie automobile japonaise et pour la confiance envers les produits japonais », a indiqué M. Okada, cité par les médias locaux. La presse nippone a été très virulente envers le constructeur automobile, sévèrement pris à partie. Ainsi, pour le quotidien conservateur Yomiuri Shimbun, premier tirage du pays, « il ne fait pas de doute que Toyota a été trop sûr de lui concernant les équipements de haute technologie de ses modèles et qu'il a pris à la légère les plaintes des usagers ». « L'absence de réaction appropriée au fiasco actuel pourrait porter atteinte à la confiance internationale envers les technologies industrielles du Japon », a également estimé le Yomiuri. Il est à relever que Toyota fait l'objet de plusieurs actions en justice en nom collectif aux Etats-Unis et au Canada, déposées par des automobilistes qui l'accusent d'avoir longuement passé sous silence l'existence du défaut à cause duquel l'accélérateur peut rester bloqué en position enfoncée. Selon des informations de presse, le groupe en avait connaissance depuis 2007. Le constructeur a vigoureusement nié ces accusations. « Notre entreprise ne dissimule jamais ce genre de cas. Nous les signalons au ministère des Transports et nous enquêtons », a déclaré le vice-président chargé de la qualité, Shinichi Sasaki. Toyota a commencé, vendredi, à réparer les huit modèles affectés par le défaut de l'accélérateur aux Etats-Unis. Toyota envisage par ailleurs de rappeler la dernière version de la Prius en raison d'un retard de réaction du système de freinage hydraulique par temps froid. Détecté en décembre, ce défaut a été corrigé en usine en janvier, mais des milliers d'exemplaires sortis auparavant des chaînes de montage sont en circulation au Japon et aux Etats-Unis. Selon les médias nippons, ce rappel pourrait concerner 270 000 voitures. La Prius, présentée comme une voiture « respectueuse de l'environnement », est l'emblème de Toyota et au centre de sa stratégie mondiale. Plus de 200 plaintes concernant les freins ont été recensées jusqu'à présent.