Fasciné au XIXe siècle, méprisant au XXe, effrayé dans les années 80', il est devenu paranoïaque : alors que les musulmans ne représentent que 3,5 à 5% de la population européenne, soit 16 millions, la majorité des Européens parlent d'une «invasion» et estiment qu'ils sont 52 millions. «L'horreur !» affirme un «philosophe» qu'on croyait moins stupide, ou plus lucide, et pour qui les musulmans sont, au moins potentiellement, des «égorgeurs» : «Si vous lisez le Coran, écrit Michel Onfray, on n'est pas dans une logique pacifiste, on défend la peine de mort, on défend l'égorgement des infidèles». Mais, comme se garde bien de le rappeler le même Onfray, les Zemmour et autres Finkielkraut de même acabit, la Bible n'est pas mieux inspirée. Rappelant le massacre à grande échelle des hérétiques cathares, l'Inquisition ou la nuit sanglante de la Saint-Barthélémy, «la Bible, écrit le philosophe Rapahël Liogier, est un récit souvent cruel et immoral au sens moderne : la polygamie y est banalisée ; des massacres de populations entières y sont légitimés». Ce dont ne parlent pas les Onfray et consorts, c'est le rôle positif et pacificateur que joue l'islam dans la vie des croyants authentiques : des enquêtes qu'a menées Raphaël Liogier dans les régions marseillaise, lyonnaise et bordelaise, il ressort que «l'islam est, pour la majorité de leurs habitants, un facteur régulateur, pacificateur des rapports sociaux, un moyen de retrouver une dignité face aux autres, face aux nantis, mais aussi face à soi-même, sans pour autant rejeter les valeurs de la société globale. L'adhésion à l'islam permet de retrouver un repère moral dans un environnement en déréliction.» Là où «la socialisation religieuse» occupe la place vacante des structures publiques, un tissu associatif se met en place, qui soutient la population. Il est regrettable que tant d'intellectuels de gauche portent des œillères et plutôt que d'apprécier intelligemment la situation, se contentent d'ânonner des slogans que la réalité ne justifie pas.