Le secrétaire d'Etat américain, Mike Pompeo, a entamé hier dans la capitale de la Jordanie, Amman, une tournée au Moyen-Orient. Périple consacré, entre autres, à rassurer les alliés régionaux et occidentaux sur l'implication des Etats-Unis en Syrie, après l'annonce le 19 décembre du président américain, Donald Trump, du retrait de leurs 2000 soldats déployés dans ce pays pour combattre, dans le cadre d'une coalition, le groupe Etat islamique (EI). Outre la Jordanie, le chef de la diplomatie américaine se rendra en Egypte et dans les six pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG, Arabie Saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Oman et Qatar), selon le département d'Etat. La Maison-Blanche a aussi évoqué, mais sans la confirmer, une visite à Baghdad. Lors de sa tournée, Mike Pompeo tentera aussi de promouvoir l'initiative «Middle East Strategic Alliance», une alliance régionale pour contrer l'influence de l'Iran, sachant que les relations entre Qatar et ses voisins arabes sont brouillées. Des discussions seront consacrées au Yémen où un cessez-le-feu est entré en vigueur dans le port d'Al Hodeïda (ouest) après des négociations de paix. Néanmoins, l'administration Trump est sous la pression du Sénat américain, qui a voté en décembre une résolution pour que Washington cesse de soutenir militairement au Yémen la coalition menée par l'Arabie Saoudite contre les rebelles houthis appuyés par l'Iran. Les sénateurs américains sont particulièrement en colère contre Riyad depuis l'assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, le 2 octobre dans le consulat d'Arabie à Istanbul. Ils ont adopté une autre résolution, par consentement unanime, accusant le prince héritier saoudien, Mohammed Ben Salmane, d'être «responsable du meurtre», alors que Trump compte quoi qu'il en soit préserver l'alliance avec le royaume wahhabite. L'écueil turc Entre-temps, le conseiller américain à la Sécurité nationale, John Bolton, est à Ankara pour discuter du retrait américain prévu de Syrie. Visite qui a accentué une fois de plus les désaccords entre Washington et Ankara sur les Unités de protection du peuple (YPG), partenaires de Washington dans la lutte contre l'EI, mais considérées comme «terroristes» par Ankara. Lors de sa vite en Israël dimanche, John Bolton a déclaré que le retrait américain de Syrie serait notamment conditionné à des garanties concernant la sécurité de leurs alliés kurdes. Ces propos «sont pour nous inacceptables et impossibles à digérer», a déclaré hier Erdogan lors d'un discours, peu après la fin d'un entretien à Ankara entre J. Bolton et le porte-parole de la Présidence turque, Ibrahim Kalin. Et de prévenir : «Nous allons très bientôt passer à l'action pour neutraliser les groupes terroristes en Syrie.» De son côté, Ibrahim Kalin a démenti que le président turc s'est engagé auprès de son homologue américain à garantir la sécurité des milices kurdes après le retrait américain de Syrie, comme l'a affirmé, lundi, Mike Pompeo. «En ce qui concerne les déclarations de Pompeo, il n'est absolument pas question d'une telle assurance donnée lors des entretiens (entre Erdogan et Trump) ou via d'autres canaux», a-t-il indiqué. Et de poursuivre : «Que personne n'attende de la Turquie qu'elle donne des assurances à une organisation terroriste.» Selon la presse progouvernementale turque, Recep Erdogan a refusé de rencontrer John Bolton, mais selon Ibrahim Kalin, la tenue d'une telle entrevue n'a jamais été confirmée dans le programme de la visite. Par ailleurs, le haut responsable turc a affirmé que son pays attend des Etats-Unis qu'ils récupèrent les armes livrées aux YPG après le retrait des troupes américaines. «Ce que nous attendons, c'est que toutes les armes livrées soient récupérées», a-t-il déclaré. «Ils nous ont dit qu'ils étaient en train d'y travailler, mais les détails deviendront plus clairs dans les prochains jours», a-t-il observé, ajoutant qu'il n'y a pour Ankara «aucune alternative acceptable» à la récupération de ces armes. Ankara attend d'obtenir du conseiller américain à la Sécurité nationale venu avec le chef d'état-major, Joseph Dunford, et l'envoyé spécial pour la coalition internationale antidjihadiste, James Jeffrey, des détails sur le plan de retrait des Etats-Unis.