D'où cette crise tire-t-elle ses origines ? Pourquoi n'arrive-t-on pas à mettre fin à ce marasme qui affecte une commune de 35 000 habitants ? Aux fins de répondre à ces interrogations, nous nous sommes rendus dans la localité à la rencontre des citoyens, des fonctionnaires et des élus. Sortie avec une majorité absolue à l'issue des élections de 2012, la liste indépendante «Correction de la trajectoire», diligentée par l'actuel P/APC, Mira Smaïl, n'a pas tardé à connaître des dissensions et des démissions. «Il (le P/APC, ndlr) a d'abord commencé à évincer ses colistiers, y compris les femmes, oubliant qu'elles doivent représenter 30% de l'exécutif», relate Assam Tarek, chef de file de l'opposition. Si le maire, au cours des trois premières années du mandat, a su compenser les départs de ses colistiers, démissionnaires ou démis, par des élus des autres listes, ce choix ne lui a pas été présenté lorsque, en octobre 2015, 10 élus ont décliné l'invitation à tenir une assemblée ordinaire. Ce qui a été le début de bras de fer opposant l'exécutif à l'opposition, majoritaire. Boycott Dans une lettre adressée au wali, les dix élus signataires ont expliqué les raisons de ce boycott de l'assemblée. «Aujourd'hui, la sérénité au sein de notre assemblée est sérieusement ébranlée pour que cette session puisse se tenir dans un apaisement préalable», est-il écrit. Pourquoi ? «Le dysfonctionnement de notre assemblée est imputable à notre P/APC et est notamment généré par la gestion unilatérale, opaque et douteuse, violation de la réglementation, intimidations et menaces et les retards dans la réalisation des projets», est-il expliqué. «Depuis trois années, le P/APC n'arrive pas à assurer un fonctionnement normal des affaires communales. Pour cause, il ne cesse d'actionner des pratiques diaboliques pour écarter toute personne n'adhérant pas à ses projets obscurs», est-il développé. Aujourd'hui, huit mois après que l'exécutif a perdu la majorité, les citoyens, fonctionnaires et élus, que nous avons interrogés, ne parlent pas seulement d'une situation statique, mais «d'une aggravation sans précédent». «Depuis le 28 février, aucune assemblée ordinaire n'a été convoquée par le maire, alors que le code communal l'oblige à le faire chaque deux mois», nous a dit Ouaïssa Rabah, élu et membre de l'alliance «Tazmalt, vision et ambitions» constituant l'opposition. Et de continuer : «Après la sourde oreille qui nous a été faite suite à d'innombrables requêtes adressées à toutes les autorités compétentes, y compris le Premier ministre, et dans lesquelles toutes les carences qui caractérisent la gestion de l'APC sont énumérées, nous avons décidé d'agir et de sensibiliser les citoyens de Tazmalt afin d'éclaircir les raisons de ce chaos». Dans cette optique, à l'appel de l'opposition, un rassemblement citoyen a eu lieu le 14 avril dernier devant le siège de l'APC. S'ensuit une prise de parole où les animateurs de l'alliance «Tazmalt, vision et ambitions» se sont égosillés à expliquer aux citoyens les raisons pour lesquelles ils ont retiré la confiance au P/APC. Cette action a été suivie par une lettre adressée au wali l'appelant à intervenir afin de «pallier la crise» caractérisée, écrivent-ils, par une stagnation des affaires communales, une assemblée moribonde, une vaste stigmatisation des 11 élus de l'opposition et le marasme populaire exprimé par la fermeture de la RN26. A cela s'ajoute, écrivent-ils encore, la non-délivrance des 713 lots de Touiririne II dont les attributaires ont épuisé toute source d'attente. Une semaine après, le P/APC a animé un meeting pour essayer de convaincre qu'il n'est ni de près ni de loin responsable de ce blocage. «Durant toutes les longues années que j'ai passées à l'APC de Tazmalt, j'ai conjugué tous mes efforts pour travailler dans l'intérêt de la commune et ses citoyens», a-t-il clamé. «Harcèlements» Les citoyens que nous avons rencontrés dénoncent les intimidations dont ils font l'objet. «Pour avoir parlé à des élus qui sont aussi mes amis, le maire est en train de tenter par tous les moyens de détruire le mur de clôture de ma maison qui répond pourtant à toutes les normes», s'indigne Nait Amara Fodil, enseignant dans un primaire. «J'ai reçu des mises en demeure et voilà qu'un arrêté de destruction vient d'être signé par le maire, ce qui m'a poussé à recourir à la justice», dit-il avant de révéler : «le comble du paradoxe est que les constructions anormales ne sont pas visées parce qu'elles appartiennent aux acolytes du maire. Pour cela, nous exigeons une commission d'enquête pour lever le voile sur toutes ces ambiguïtés». Les employés de la mairie et de l'annexe d'Allaghen ne sont pas épargnés par ces «pressions». Ils ont adressé plusieurs lettres au wali pour dénoncer les «abus d'autorité du maire et de son adjointe», qu'ils accusent, citent-ils, de «ponction sur salaire après seulement deux minutes de retard», «traductions arbitraires au conseil de discipline» et «non perception des primes de rendement». Merabtine Madjid, gardien de la commune, relate «qu'il a été convoqué à un conseil disciplinaire pour avoir été vu parmi la foule protestataire contre la gestion de l'APC». «Qu'on arrive à me priver même de mes droits citoyens, cela relève d'une dictature !», a-t-il pesté. Pour Bensaid Hassina, administratrice, être réfractaire à la gestion de l'exécutif est synonyme d'une «pression horrible». Elle explique : «en l'espace de huit mois, j'ai été affectée dans cinq services, et ce car je ne me soumets pas aux volontés arbitraires de l'adjointe du maire. Actuellement, je travaille dans un guichet alors que je suis administratrice ! On m'a même affectée à l'annexe d'Allaghen pour qu'une commission d'enquête de la wilaya ne me croise pas». Même cas pour les élus qui accusent le premier magistrat de la commune de les «avoir intimidés et porté atteinte à leur honneur». C'est dans cette conjoncture que Nait Mohand Nasser, élu de la liste FFS, révèle les tentatives du maire de «saborder» ses activités avicoles. «Mon poulailler où toutes les règles sont respectées fait l'objet de plusieurs contrôles de la gendarmerie, pompiers, DCP, services d'hygiène et d'environnement. C'est aberrant!», tonne-t-il. Constat «désastreux» à La SRBT Interrogé sur la situation du football à Tazmalt, Merabtine Madjid, président de Sahel Riyadi Baladiyat Tazmalt (SRBT), dresse un constat «désastreux». «La subvention estimée à 100 millions de centimes, qui est loin d'être conséquente, nous l'avons perçue en février 2016 alors qu'elle a été approuvée en juillet 2015», regrette-t-il, avant de s'interroger sur le sort des deux milliards de centimes débloqués par l'APC et quatre milliards promis par le wali, tous pour le réaménagement du stade communal. Des centaines de citoyens «soucieux de l'avenir de leur commune» ont procédé à la fermeture du siège de l'APC et de l'annexe d'Allaghen. «Cette action citoyenne et pacifique est l'expression d'un ras-le-bol généralisé ayant atteint ses limites», ont-il écrit dans une déclaration rendue publique. «Cette fermeture est un rejet des méthodes staliniennes d'un despote local maintenu par une poignée d'inconditionnels zélés sous l'œil protecteur de l'administration», est-il ajouté. Et de s'interroger : «Sinon, comment expliquer que la tutelle tolère qu'une seule personne préside aux destinées de plus de 35 000 habitants ?». Pour mettre fin à ce qu'il qualifie de «stalinisme», ils exigent la dissolution inconditionnelle de leur APC. Ils «privilégient la piste de fermetures périodiques jusqu'à l'aboutissement de leur revendication».