Le nombre de personnes hospitalisées pour AVC augmente chaque année en Algérie. Environ 85% des cas sont d'origine ischémique et 15% hémorragiques. Aussi, la charge financière que représente cette affection pour le système de santé est «énorme». Le traitement et la prévention sont d'une importance primordiale, conseillent les spécialistes. Pour sensibiliser la population aux signes de cette pathologie souvent négligée et les dangers que représentent l'hypertension artérielle, plus important facteur de risque associé aux AVC et un des principaux facteurs de risque associés aux maladies du cœur, une rencontre scientifique a été organisée le 22 juin à l'auditorium du CHU Nedir Mohamed de Tizi Ouzou. Elle a été animée par les professeurs Daoudi Smail, chef de service de neurologie, et Kichou Brahim, chef de service de cardiologie au sein de cette structure sanitaire d'envergure régionale. Selon le Pr Kichou, l'HTA est un facteur de risque cardiovasculaire majeur pour tout un spectre de maladies cardiovasculaires et apparentées. «Il existe une grande prévalence de l'HTA dans la population générale. Elle est la première cause de décès à travers le monde pour une prévalence de 30-45%». En Algérie, l'hypertension artérielle affecte les femmes (36,9%) plus que les hommes (32%) pour une prévalence globale de l'ordre de 35%, selon des statistiques de 2004. En cette période de jeûne, une vigilance particulière s'impose chez les sujets souffrant de cette maladie, qu'on surnomme le «tueur silencieux», a recommandé le Pr Kichou Brahim. «La plupart des hypertendus ont d'autres facteurs de risque de maladies cardiovasculaires : diabète, dyslipidémie, tabac, obésité abdominale. Quand l'HTA est contrôlée, stable depuis plusieurs mois sous monothérapie ou bithérapie fixe, non compliquée, sans comorbidités sévères associées, le jeûne est autorisé. Il suffit de modifier l'horaire de la prise médicamenteuse. Il n' y a aucune étude prouvant la différence entre prise matinale ou nocturne des médicaments antihypertenseurs sur les événements cardiovasculaires (ECV). Dans d'autres situations, avec atteinte d'organes cibles ou compliquée, syndrome coronarien aigu, (SCA), AVC, insuffisance cardiaque, insuffisance rénale sévère, ou avec autres comorbidités associées : diabète, broncho-pneumopathie chronique obstructive, nécessitant une plurithérapie et une répartition dans la journée, le jeûne n'est pas autorisé. En cause, des risques de décompensation cardiopathie sous-jacente ou ECV graves», a-t-il détaillé. Les AVC et le Ramadhan étaient le deuxième thème abordé par le chef de service de neurologie du CHU de Tizi Ouzou. De l'avis médical du Pr Smail Daoudi, l'impératif du jeûne n'est pas obligatoire dès qu'il met en danger la santé de l'individu. «Le jeûne induit une modification transitoire du rythme de vie, des habitudes alimentaires et des modalités thérapeutiques pour les malades. Chaque année, les professionnels de santé et les patients se trouvent confrontés à des problèmes de prise en charge. Un faible taux de consultation médicale des patients est enregistré pendant ce mois de Ramadhan, d'où une diminution de l'autosurveillance glycémique et une sous-estimation de l'incidence des complications», a déploré Pr Daoudi. Il a indiqué par ailleurs que quelque 60 000 nouveaux cas d'AVC sont enregistrés annuellement dans notre pays, dont 1/3 des malades décèdent. Les accidents vasculaires cérébraux sont considérés comme la première cause de handicap acquis non traumatique invalidant de l'adulte. Son incidence est de 1,5 pour 1000 habitants. L'amélioration des conditions de vie et la mise en place de programmes de santé, l'amélioration des soins d'urgence, ont fait apparaître une transition démographique. L'espérance de vie est passée de 50 ans en 1962, à 76,3 ans en 2010. Ce qui a pour corollaire un vieillissement progressif de la population et l'augmentation de maladies chroniques, telles que l'hypertension artérielle et le diabète. Ces deux facteurs de risque favorisent la survenue d'un accident vasculaire cérébral avec risque d'hémiplégie. Dans la wilaya de Tizi Ouzou, une étude rétrospective menée au CHU fait ressortir un nombre croissant d'AVC admis aux urgences du CHU ces dernières années : 100 cas entre 2004 et 2006, 700 cas en 2012, 700 cas en 2013 et 1000 cas en 2014. Quelque 1500 cas/an sont enregistrés à Tizi Ouzou. «Une vingtaine d'urgences liées aux AVC sont prises en charge chaque mois au sein du CHU de Tizi Ouzou. Les malades sont évacués des 4 wilayas limitrophes faute de scanner. Quand le malade arrive chez nous 3 heures après avoir fait l'attaque, il est déjà trop tard. Le traitement d'urgence, à savoir la thrombolisation doit intervenir avant les quatre heures qui suivent l'événement», a expliqué un neurologue.